Déclaration sur la visite d'Etat de Hollande au Cameroun

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Wed, 15 Jul 2015 Source: Ngouo woungly-Massaga

Le dernier survivant des leaders de la lutte pour la Réunification et l’indépendance du Cameroun menée par l’UPC, grand parti nationaliste du pays, s’exprime sur la reconnaissance par la France de la guerre de libération, et des crimes des troupes coloniales françaises au Cameroun, et explique à la jeunesse Camerounaise et africaine l’échec militaire de la lutte armée de l’UPC puis parle des données actuelles et des perspectives de la lutte pour le changement au Cameroun et en Afrique.

Oui, c’est plutôt un paradoxe : la plus banale et la plus brève des visites d’Etat des Présidents de la République Française au Cameroun depuis l’indépendance de notre pays, risque d’avoir les répercussions les plus profondes et de marquer plus que toutes les autres les relations entre les deux pays.

En effet, survenant en plein débat sur le Franc CFA qui agite les opinions ces derniers temps dans les quatorze pays africains de la zone franc, la signature solennelle de quelques accords de coopération n’a plus de résonnance philanthropique auprès de nos populations, désormais largement conscientes du fait que la France nous aide avec l’argent qu’elle nous vole à travers les mécanismes du compte d’opération de la Zone Franc.

Ce sont donc, à n’en point douter, les propos de M. François HOLLANDE, Chef de l’Etat français, reconnaissant pour la première fois la barbarie des troupes coloniales de son pays au Cameroun, déplorant cette barbarie et s’engageant à restituer au Cameroun les archives de cette sale guerre jusque-là couvertes par le secret défense, qui ont fait sensation ! Qu’en pensons-nous, en connaissance de cause, et ès qualité ?

1.- Un pas positif.

Nous prenons acte de la reconnaissance par la France de la guerre qu’elle a menée et de crimes odieux et barbares de ses troupes dans notre pays ; et nous saluons cette reconnaissance comme un important pas positif pour les relations futures de nos deux pays.

Enfin, nous prenons acte du noble repentir de la France pour les crimes de guerre et les crimes contre l’Humanité commis par les troupes françaises contre notre peuple , et saluons ce repentir comme l’expression honorable d’une Nation de Civilisation et de Culture qui ne se replie pas dans une crispation orgueilleuse et barbare de refus de reconnaître humblement les torts historiques commis aux autres nations et aux autres peuples.

2.- De la « montée du sentiment anti-français au Cameroun ».

Il nous plaît de souligner ici que malgré les crimes du colonialisme et du néocolonialisme français dans notre pays, la lutte de libération du peuple camerounais n’a jamais été porteuse de francophobie.

Grâce aux enseignements de Ruben UM NYOBE et de ses compagnons, exhortant les patriotes et le peuple camerounais à ne pas confondre les colonialistes français et le peuple de France, grâce aux relations d’amitié des nationalistes camerounais avec le grand Parti Communiste Français et toute la gauche française, le sentiment antifrançais n’a jamais habité notre lutte de libération nationale jusqu’à ce jour.

C’est donc dire que la « montée du sentiment anti-français » dont il a été question dans notre pays ces derniers temps, si elle ne relève pas d’une manipulation médiatique, ne peut être que l’œuvre d’agents du régime, jouant sur commande aux radicaux tonitruants et grandiloquents pour faire pression sur la France pour qu’elle continue à soutenir aveuglément un dictateur en fin de course déclaré « panafricaniste » sans peur du ridicule.

3. Qui donc a interpellé M. François HOLLANDE ?

Ce n’est bien évidemment pas le régime de Yaoundé qui a interpellé le Président Français sur la guerre de la France au Cameroun ! M. HOLLANDE a réagi sans feu vert de ses hôtes camerounais à une campagne d’opinion de plus en plus forte, œuvre de médias et de chercheurs indépendants s’appuyant sur les témoignages de patriotes camerounais.

On peut citer la vidéo cassette de TV5 sur le cheminement tumultueux de notre pays vers l’Indépendance. J’y apparais comme « chef militaire de l’UPC » en tenue de sport blanche et casquette assortie. On y voit le grand général Pierre Semengue, ancien tirailleur français, jubilant du sang des patriotes camerounais (et sans doute aussi des milliers d’innocentes victimes de la vengeance aveugle des lendemains de la tentative de putsch avortée du 6 Avril 1984). L’ancien Haut Commissaire Pierre Messmer, visiblement embarrassé par cette confrontation avec son passé semble en avoir honte.

On peut également citer le volumineux ouvrage de l’historien et chercheur français Thomas Deltombe, « Kamerun, une guerre cachée aux origines de la Françafrique ». J’ai contribué à la préparation de ce livre par de longues interviews enregistrées pendant des jours au domicile de l’épouse coopérante de l’auteur, à côté de l’Hôpital Central de Yaoundé (nous n’avons jamais reçu ne serait-ce qu’un exemplaire de courtoisie de la cassette ou du livre… Europe ta civilisation fout le camp).

On ne saurait enfin négliger ce que l’on doit à ce sujet aux nombreux mémoires d’Etudiants en Histoire et en sciences politiques, et aux travaux de chercheurs dont j’ai souvent été un « homme ressource » comme témoin et acteur de l’Histoire.

Cette nouvelle attitude de la France qui reconnaît la lutte de libération du peuple camerounais devrait inciter notre pays à sortir des honteuses ambigüités actuelles. Pour ne prendre que ces deux exemples, nous citerons la question des Héros Nationaux, et celle de l’agression permanente du parti au pouvoir contre l’UPC.

L’Assemblée Nationale du Cameroun a reconnu les pères fondateurs de l’UPC notamment Ruben UM NYOBE, FELIX MOUMIE, ERNEST OUANDIE et KINGUE ABEL comme Héros nationaux par une loi de 1992. Mais le régime n’a jamais voulu honorer ni laisser honorer ces vrais pères de la Nation.

Dans son livre « Pour le libéralisme communautaire » le Président du RDPC a fait semblant de reconnaître que c’est à l’UPC que le pays doit son Indépendance, «arrachée de

haute lutte ». Dans la réalité l’auteur et son parti n’ont toujours reconnu que les faux upécistes qui se prostituent à eux pour tenter de décrocher un poste ministériel.

C’est ce qui nous laisse penser qu’il n’y aura pas le moindre progrès dans la reconnaissance de la lutte de libération de notre pays par notre propre Etat, si les patriotes ne l’imposent pas.

4.- Réponse à notre jeunesse qui s’interroge sur l’échec militaire de l’UPC : pourquoi l’Indochine, l’Algérie et pas nous ?….

La reconnaissance par la France de notre guerre de libération nationale a provoqué dans notre jeunesse une forte interrogation sur les raisons de l’échec militaire de l’UPC. Un jeune chercheur est venu de Douala pour nous interroger à ce sujet au lendemain des déclarations de M. François HOLLANDE. Voici l’essentiel des éclairages historiques donnés à ce sujet à M. Etienne SEGNOU avec un complément d’informations inédites.

a) A la naissance de l’UPC le 10 Avril 1948, le Cameroun est un pays sous tutelle de l’Organisation des Nations Unies. La stratégie que le parti adopte pour la réalisation de son programme : Réunification et Indépendance du pays est de s’appuyer sur son statut international et les engagements de la France à conduire le Territoire sous-tutelle à l’indépendance.

Il n’y a aucune divergence à ce sujet entre les Dirigeants nationalistes : c’est sur la base de ce consensus que UM NYOBE se rend à l’ONU pour plaider la cause de l’Indépendance. Même après le déclenchement par la France de la répression militaire et policière, avec les massacres de Mai 1955, l’interdiction de l’UPC le 13 Juillet de la même année, le parti reste axé sur l’espoir d’un règlement Onusien et interpelle en permanence l’ONU. La création du CNO (Conseil Nationale d’Organisation) par UM avec passage aux actions de guérilla apparait beaucoup plus comme une auto-défense que comme le résultat d’un plan d’ensemble pour l’entrée en guerre du peuple. Cette situation perdure, jusqu’à l’Assassinat du Secrétaire Général de l’UPC le 13 Septembre 1958.

b) La Session spéciale de l’Assemblée Générale de l’Onu sur le problème camerounais en Février 1959 se prononce contre les élections générales avant la levée de la Tutelle de l’ONU fixée au 1er Janvier 1960. C’est une injustice criante : au Togo, qui a le même statut de Territoire sous tutelle de l’ONU, cette même ONU avait fait tenir des élections avant la levée de la tutelle afin que le pouvoir passe aux élus du peuple. La France, dans le cas du Cameroun, avait obtenu des Etats-Unis d’Amérique (qui contrôlent à cette époque la majorité absolue des Etats membres) que le pouvoir fut confié à ses hommes de main qui auraient la responsabilité d’organiser les élections après la proclamation de l’Indépendance.

c) La Direction de l’UPC (Moumié, Ouandié et Kingué) était consciente de la gravité de cette situation, et lance le mot d’ordre de « Révolution Totale » fin Décembre 1959 à partir de Conakry. Quelques cadres furent sollicités pour l’élaboration d’un programme (« La Révolution Kamerunaise ») et un guide de formation militante est mis au point (« l’Unique Voie du Succès »), on commence à envoyer des militants en formation militaire. Ceux qui recrutent des candidats aux bourses de formation ou d’Etudes dans les pays socialistes sont des connaissances des dirigeants. Ils ne peuvent pas avoir une vision globale des besoins de la lutte et du pays, et pratiquent naturellement le recrutement de proximité ou le

régionalisme et le népotisme. Bref, le mot d’ordre ci-dessus, (vu avec « l’expertise » ou l’expérience qui est la nôtre aujourd’hui, et que ne pouvaient pas avoir nos responsables à cette époque), ne tient pas assez compte des données suivantes :

- Le Secrétaire Général de l’UPC venait d’être assassiné, et la lutte était en déficit de Direction grave à l’intérieur du pays et sans véritable encadrement politique et militaire.

- Avec l’accession du Cameroun à l’Indépendance, même avec des fantoches au pouvoir, nos amis socialistes ou progressistes allaient être sollicités par leurs intérêts d’Etat diplomatiques et commerciaux et ne pourraient pas laisser le terrain libre à leurs concurrents capitalistes… Ils n’allaient probablement plus pouvoir nous aider, nous nationalistes en lutte contre des Etats soumis au « néocolonialisme » (ce terme est des dirigeants de l’UPC (Moumié) comme l’expression « politique du ventre » d’un Président de l’UNEK), que par l’intermédiaire de pays progressistes africains.

- Or, en 1959 et début 1960, pratiquement aucun pays progressiste africain n’était suffisamment libéré et consolidé pour servir de base arrière ou de base d’appui éloignée aux nationalistes camerounais. (Lorsque le Président Moumié se rend au Congo en été 1960, - il rencontre à l’aller une délégation de responsables d’Etudiants dont je fais partie et je dors dans la même chambre que lui - il a déjà essuyé le refus catégorique et prudent du Président Sékou Touré d’abriter un « Gouvernement Révolutionnaire upéciste en Exil »).

d) Alors, quelle aurait pu être à mon avis la stratégie de réplique à la décision onusienne ? A mon avis il aurait fallu annoncer le retour de tous les dirigeants et cadres de l’UPC au Cameroun, demander l’appui de l’ONU à toute la logistique de ce retour au pays des nationalistes exilés pour que notre parti puisse participer aux élections prévues, en demandant par ailleurs le contrôle desdites élections par l’ONU… Même si nous n’obtenions pas toutes les garanties demandées, l’Onu aurait été fort embarrassée de refuser un appui minimal, nos amis auraient été interpellés et en plus nous aurions eu le bénéfice de l’enthousiasme populaire….Tout le monde reconnaissait à l’époque, à commencer par les colonialistes français et leurs fantoches la très forte audience et la solide implantation de l’UPC dans le pays.

e) L’assassinat du Président Félix Roland Moumié montrait que la sécurité de nos dirigeants en exil était illusoire, nous aurions pu mieux protéger nos dirigeants et nos cadres dans l’hypothèse ci-dessus. Cet assassinat plongeait l’UPC dans une longue stratégie défensive pour tenter de rattraper les potentialités révolutionnaires offensives du mouvement :

- Retour d’Ernest Ouandié sous maquis : C’est de justesse que fut réussie l’infiltration du Vice Président Ouandié au maquis. Dès que je fus nommé Secrétaire Administratif de la Conférence des Peuples Africains à Accra, en replacement de Frantz Fanon, j’organisai avec l’aide du Ministre Résident de Guinée au Ghana, également Secrétaire Général de la Conférence des Peuples Africains, toutes les étapes du déplacement du Ghana au Nigeria du Camarade Ouandié…

- Comme Conseiller Membre du Research Group chargé des mouvements de libération, j’avais introduit après du Président Ghanéen le dossier de l’UPC et obtenu un Bureau pour le Parti à côté de la présidence (Flagstaff House) et des camps d’entraînement dans la région de Nkroful, sa petite ville natale. La fourniture d’armes pour le maquis était prévue (le Camarade Ouandié était bien connu du Président Ghanéen). Ce projet de Base d’appui lointaine fut enrayé par le coup d’Etat qui renversa Nkrumah en Février 1966.

- Lorsqu’intervint le coup d’Etat contre Nkrumah, nous avions déjà ouvert les installations de l’UPC au Cabinda sous camouflage d’installations angolaises. L’interruption des communications avec le Président Ouandié après la mise en place du Comité Révolutionnaire (CR) a fait engager la préparation d’une liaison par le Sud-Est du Cameroun. Le IIème Front de l’ALNK fut très près de rompre « l’encerclement stratégique », nous verrons comment plus loin. Répondons d’abord à la question : Indochine, Algérie, pourquoi pas nous ?

f) En comparant les développements des luttes révolutionnaires dans ces trois pays, on touche du doigt le problème fondamental de l’environnement géostratégique, de quoi s’agit-il ?

- Indochine, Dien Bien Phu,… La glorieuse victoire du peuple Vietnamien aurait-elle été possible dans un contexte où n’aurait pas existé la grande base arrière de la République Populaire de Chine ?

Algérie, Héroïsme des Moudjahidine, Accords d’Evian… L’éclatante victoire du Peuple algérien était-elle envisageable sans l’environnement du monde arabe, le soutien de Gamal Abdel Nasser et des pays du Maghreb ?

Au Kamerun, L’UPC lutte dans un environnement géostratégique totalement fermé. Au nœud des intérêts français en Afrique centrale.

A l’Ouest la lutte armée était en butte au problème du ravitaillement et à des difficultés logistiques insurmontables. Le IIème Front de l’ANLK formait au Cabinda une centaine de commandos (jeunes camerounais recrutés à la frontière-Sud du pays, à plus de mille kilomètres à vol d’oiseau. Une fois formés, ils traversèrent Congo du Sud au Nord pratiquement en s’imposant aux autorités du régime du Président Massamba-Débat. Quelques Conseillers du Président sympathisaient avec l’UPC. Mais quelques « marxistes-léninistes prochinois » qui un an plus tôt, avaient débarqué le Dr Ossendé Afana manu militari sur la rive camerounaise de la Ngoko sans armes, où il fut arrêté et décapité, signalèrent sans hésiter à Ahidjo que Massamba-Débat avait laissé passer des maquisards lourdement armés en direction du Cameroun. Il s’agissait de profiter de la situation pour déstabiliser leur propre ennemi… Nous dûmes prématurément engager les combats…

Notre projet initial qui prévoyait une infiltration, le contact avec le Président du CR et le ravitaillement minimal de ses forces, une programmation de la libération d’une zone, fut totalement bouleversé. Au Cabinda, nous avions refusé les sollicitations insistantes d’internationalistes Cubains qui voulaient absolument venir au Cameroun se battre à nos cotés. Nous pensions que nous devions d’abord nous-mêmes patriotes camerounais, nous battre contre les fantoches, infliger quelques bonnes défaites aux mercenaires de la France et que les problèmes de logistiques se résoudraient plus tard. Nous verrons plus loin que le vrai problème qui eut raison de notre offensive militaire fut le problème de la qualité humaine des combattants ; celui-là même que rencontra le Ché au Congo. Il me faut d’ailleurs signaler qu’après ma sortie du maquis, une délégation d’Officiers d’Etat Major venus de Cuba me rencontra à l’Ambassade de ce pays à Brazza pour m’auditionner sur la conduite des opérations militaires au IIème Front. Je dois dire en toute modestie qu’à la fin de la conférence elle n’hésita pas à féliciter chaleureusement le Cdt Kissamba.

5. Bilan et perspectives de la lutte de l’UPC

La lutte armée de l’UPC s’est arrêtée dans notre pays avec l’arrestation et l’assassinat du Président Ernest OUANDIE exécuté sur la place publique le 15 Janvier 1971. La jeunesse camerounaise doit célébrer la mémoire de nos Héros. Les combattants des maquis doivent être salués. Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté à ce sujet, nous devons dire qu’à notre avis nous tenons aussi pour légitimes les avantages dont bénéficient nos compatriotes qui prirent part à la libération de la France et aux guerres coloniales françaises.

Et pour bien préciser les choses, nous pensons que la lutte du peuple camerounais n’a pas souffert que d’un environnement géostratégique très hostile, les insuffisances humaines l’ont aussi marquée.

1958 Nous avons longtemps douté de la trahison de Mayi Matip. Mais en découvrant la réhabilitation administrative de sa carrière originelle de fonctionnaire de police ; les nombreux avantages dont il a bénéficiés, le poste de Vice Président de l’Assemblée Nationale et la chefferie du premier degré qui lui ont été attribués sans la moindre objection, nous constatons qu’il a été remercié pour services rendus.

1960 Lorsque Moumié rejoint Lumumba au Congo, en pleine crise du coup d’Etat de Mobotu, les deux leaders décidèrent de la mise en place d’un Gouvernement congolais panafricain : les militants de l’UPC devaient y être associés et plus tard des progressistes d’autres pays africains éventuellement. Le Président Moumié sollicita un premier groupe de cadres : Ossende Afana, Tchaptchet Jean Martin, Woungly Massaga, Ndoh Michel et Frédéric Augustin Kodock… Ce dernier avait été introduit sur la liste à partir de considérations tribalistes de quelques camarades de la Section de France de l’UPC, il vendit la mèche à Aujoulat et se servit de cette convocation par Moumié qu’il n’avait en réalité jamais rencontré pour soigner son ralliement au régime. Mais l’information fut évidemment communiquée aux grandes puissances et on peut réellement penser que le sort des deux leaders « communistes » fut scellé à partir de ce moment. N’oublions pas qu’au Congo, un Secrétaire Général de l’ONU le Suédois Dag Hamadjoeld perdit mystérieusement la vie. L’impérialisme occidental ne blaguait pas à propos du Congo. Avant son voyage au Congo, le Président Moumié, au courant de cette trahison de Kodock, l’avait exclu de l’UPC.

1962 Hogbe Nlend venu au Ghana avec Kapet de Bana, demande qu’on les intègre dans le Comité Révolutionnaire de l’UPC. Il vit cette demande rejetée tout simplement parce qu’elle était absurde, le Comité Révolutionnaire de l’UPC n’avait pas été crée à Accra comme le propageait Ntumazah et d’autres saboteurs. Hogbe remonta à Alger en colère et tint une Conférence de presse pour exposer des documents volés au domicile de fonction de Woungly-Massaga où il avait été fraternellement hébergé : il rendit public des plans de livraison d’armes au Maquis par Nkrumah. Les militaires du coup d’Etat qui renversa Nkrumah utilisèrent abondamment ces informations sur les « camps d’entrainement et la subversion de Nkrumah »…

1969 Information inédite : la fin des activités militaires du 2ème Front :

Après les combats de l’axe Djoum-Sangmelima, au niveau d’Efoulan et Ndongmendima le Commandant Kissamba envoie s’enquérir de la situation de deux Détachements restés à la frontière Cameroun-Congo après les combats d’Alati.

Il apprend que les deux détachements ont stationné dans une zone de forte production et de libre consommation de banga (chanvre) puis ont replié et ont été récupérés par les autorités congolaises et ramenés à Brazzaville.

Finalement le Commandant doit descendre à Brazza pour négocier le retour au maquis de ses hommes et prendre du matériel laissé au Congo. Il tombe sur le Coup d’Etat du Capitaine Ngouabi. Contacté aussitôt par le Secrétaire Général des Syndicats (M.Bantou), Kissamba doit prendre sous sa protection militaire la quasi-totalité du Gouvernement du Président Massamba-Débat, au domicile du Ministre de l’Intérieur (Bindzi) qui a fui au Congo-Kinshasa. Après examen de la position militaire, le Cdt Gama (Kissamba) replie avec tous les ministres congolais sur le quartier Bakongo. Cette zone est baptisée aussitôt Biafra… les communications étaient faciles avec la région du Pool et avec Boko où s’est replié le Président de la République. Le Cdt Kissamba ne tarde d’ailleurs pas à recevoir une note écrite du Président Massamba-Débat lui demandant de prendre le commandement des forces loyalistes avec comme adjoint le Colonel Kinganga qui a une sulfureuse réputation de tribaliste. Je réponds immédiatement aux représentants du Président (dont le Ministre André Hombessa) que je suis un militant révolutionnaire africain et non un mercenaire : je ne peux pas m’impliquer dans un conflit à caractère tribal et ne peux prendre parti ni pour les Bacongo du Sud contre les Kouyou ou les Nordistes et inversement. Je propose la négociation immédiate entre le Capitaine Ngouabi et le Président Débat. Ceci dit, je fonce sous couvre-feu à l’Etat Major, en compagnie d’un officier de police congolais (Ngasaki) : Le Capitaine Ngouabi accepte la négociation et la crise se règle sans effusion de sang.

Mais la vraie conclusion va reposer sur le résultat d’une négociation tripartite : Cdt Kissamba – Capitaine Ngouabi et l’Ambassadeur Cubain. Trois conclusions s’en dégagent :

Primo : Ngouabi accepte de faciliter le retour au maquis du deuxième Front des hommes de Kissamba,

Secundo : Kissamba accepte d’être expulsé à Cuba, ou se trouve son épouse française et ses quatre enfants.

Tercio : Les deux Etats conviennent d’appuyer le Commandant pour une opération héliportée de retour au maquis dans le Dja et Lobo, pour rejoindre ses camarades en temps opportun.

Mais, alors que Kissamba se trouve à La Havane et se prépare à l’opération héliportée, il apprend que la troupe du Capitaine Sylvain, bien arrivée au maquis, a trouvé un drame horrible: le Capitaine Francisco Makaïa (de son vrai nom ; Daniel EWOUNGOUO) le plus proche collaborateur de Kissamba sous maquis, un précieux cadre bien formé militairement et politiquement au Vietnam, a été sauvagement assassiné par un autre cadre (MONDJENGUE BENGONO Samson) qui propageait maintenant le thèse minable que la lutte en pays bulu doit être dirigée par un Bulu… Il avait probablement d’autres motivations.

Le crime était d’autant plus traumatisant pour tous les combattants qui avaient évidemment une grande estime pour leur Commissaire Politique, que le criminel, pour camoufler le cadavre l’avait dépecé… La troupe de Sylvain ne put pas gérer la situation résultant de ce drame dans la zone, et dut se replier sur Brazzaville. Le Camarade Sylvain (Nenkwo) est mort à Paris du diabète… A Cuba où l’on devine que d’autres auraient souhaité qu’il restât … Kissamba ayant profondément médité et examiné tous les problèmes de la lutte avait décidé dans une grande souffrance intérieure mais avec une détermination farouche de revenir en Afrique, d’affronter le devoir. S’il était resté à La havane, qui aurait assumé la reconstruction du parti après l’assassinat d’Ernest Ouandié, qui aurait formé de nombreux cadres pour maintenir vivante la flamme du combat ?

L’Histoire établira le bilan du travail de sauvetage et de redressement de l’UPC que nous avons abattu jusqu’au grand congrès de 1996 de plus de dix mille participants au Palais des congrès de Yaoundé. Elle dira aussi qui a organisé ce congrès et quel fut par la suite le rôle des uns et des autres dans la longue déconstruction et désorganisation du mouvement upéciste.

Malgré des sollicitations de tous bords, nous avons persisté dans le refus de créer un groupe upéciste propre alors que nous condamnons comme sans issues et néfastes les politiques groupusculaires, en continuant inlassablement de militer pour l’unité de l’UPC.

Aujourd’hui, non seulement parmi les patriotes se réclamant de l’UPC mais aussi parmi ceux qui se disent d’opposition, « on sait désormais qui est qui et qui peut faire quoi », selon la formule de notre fidèle collaborateur Jean-Pierre Djemba.

Voilà pourquoi, sachant que cette responsabilité historique nous incombe, nous profitons de la visite d’Etat au Cameroun du Président français pour fixer le nouveau cap de la lutte et dire comment l’aborder.

Cadrage idéologique

« La seule réponse valable à la situation néocoloniale africaine, c’est la création des Etats Unis d’Afrique dotés d’une monnaie africaine commune et d’une armée commune intégrée.

Cette réponse est abordée aujourd’hui d’un double point de vue : le point de vue du « Panafricanisme de pétition » qui attend tout des Chefs d’Etat à qui l’on distribue le qualificatif de « panafricaniste » en les couvrant de louanges de griots, et le point de vue du « Panafricanisme révolutionnaire » qui privilégie l’action des masses populaires pour revendiquer la monnaie africaine unique, exiger l’intégration de nos forces armées, tout en restant ouvert à l’appui aux Chefs d’Etat qui font des avancées réelles en faveur de la sortie du Franc CFA et sont disposés à adopter des mesures d’intégration des forces armées de nos pays ».

Politique et méthodologie

Nous devons clairement poser d’emblée que la lutte pour les Etats-Unis d’Afrique doit être l’œuvre d’un Front solide de toutes les forces du changement. Le Front des Patriotes et Panafricanistes (FPP) est le seul qui porte actuellement la démarche conséquente du rassemblement.

Et « dans l’effort actuel de rassemblement des forces du changement, nous devons rester vigilants sur le passé des uns et des autres, n’adhérer à aucun procès en trahison ou aux insinuations plus ou moins prouvées des uns contre les autres, mais ne tenir compte en priorité que de l’engagement de tous dans une stratégie de rupture de tout lien avec le régime néocolonial est ses tentatives de mystification du peuple pour survivre .

Stratégie et campagne d’explication et de mobilisation en Trois Thèses

Nous Patriotes et Panafricanistes camerounais sommes pleinement conscients du fait que la phase actuelle de notre lutte s’ouvre… encore hélas, sur un énorme contentieux avec la France. C’est précisément pourquoi il nous importe beaucoup d’exposer et d’expliquer nos

thèses et d’interpeller la France et l’opinion internationale à l’occasion de la visite d’Etat du Président François HOLLANDE au Cameroun.

PREMIERE THESE

Chacun sait - et la France doit en convenir - que les Peuples Africains ne peuvent connaître aucun développement significatif dans le système du Franc CFA. Sortir du Franc CFA est donc pour nos pays un impératif catégorique et non une question de haine de la France : c’est une nécessité objective du développement économique et social de nos pays et du bonheur de nos peuples.

DEUXIEME THESE

Il est tout a fait évident – et nous admettons volontiers- que toucher au Franc CFA c’est s’attaquer aux intérêts les plus profonds de la France (sérieuse diminution de la masse du Trésor français, des facilités pour l’équilibre de la balance des paiements, et pour l’équilibre budgétaire…) etc..

Mais, bonnes gens, n’en était-il pas de même naguère du régime colonial dans son ensemble dont le Franc CFA n’est qu’une honteuse séquelle ?

Fallait-il pour autant défendre à mort « le colonialisme à papa » parce que ce système colonial profitait beaucoup aux grandes fortunes de France ?

Cette politique réactionnaire qui triompha un temps ne prouva-t-elle pas incontestablement son caractère erroné et aberrant avec l’effondrement mondial du colonialisme malgré de ruineuses et inutiles guerres coloniales ?

Alors que faire ?

Nous disons haut et fort que nous ne sommes pas des anti-français ! Nous ne cherchons pas la ruine de la France.

Primo : Nous patriotes camerounais, dans la ligne historique de notre combat, pensons seulement qu’une grande nation comme la France ne saurait indéfiniment faire reposer sa prospérité sur le pillage des autres peuples. C’est un grand risque historique.

Secundo : Nous sommes convaincus que le génie créateur de la France pourra d’autant plus facilement retrouver des relations économiques et financières mutuellement profitables avec les Etats-Unis d’Afrique, que les dirigeants actuels de la France auront eu l’intelligence d’accompagner en douceur la disparition inéluctable du Franc CFA, sans obstruction malsaine vouée à l’échec.

TROISIEME THESE

Nous appelons enfin le peuple camerounais à la plus grande vigilance, et nous disons solennellement aux Dirigeants de la France « Prenez Garde ! ».

Les opportunistes camerounais et africains qui se posent en « meilleurs amis de la France » en défendant cyniquement l’inique Franc CFA ou en choisissant d’en faire un sujet tabou, ce qui revient au même, MONTRENT QU’ilS METTENT LEUR SOIF DU POUVOIR AU DESSUS DE TOUT !

Cela signifie clairement et logiquement que si par accident de l’Histoire, ce genre de politiciens sans foi ni loi accédaient au pouvoir dans nos pays - ce qu’à Dieu ne plaise - ils ne mettraient jamais le Franc CFA en cause, POUR NE PAS PERDRE LEUR POUVOIR ….

Or, en vérité, ce genre d’opportunistes cyniques, qui refusent de défendre les intérêts vitaux du pays et des peuples africains pour bénéficier de la caution de la France (qu’ils croient décisive), n’auront en réalité jamais, même avec l’illusion d’un atout tribaliste, le soutien du peuple camerounais qui a désormais les yeux ouverts, soutien indispensable au succès.

La France a-t-elle alors intérêt à apporter sa caution ou son soutien a ce genre de personnage ? Nous ne le pensons pas. Aussi disons-nous, en toute sérénité,

Auteur: Ngouo woungly-Massaga