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Dépravation des mœurs : le rôle trouble des influenceurs du web

Christelle Atangana alias Cynthia Fianagan

Fri, 15 Jul 2022 Source: Carole Moukwa

La jeunesse camerounaise aujourd’hui pose problème. Elle s'illustre d'avantage dans la dépravation des mœurs. Si le sexe, l’alcool, la drogue et la violence ont toujours existé dans nos cités, avec l’avènement des réseaux sociaux ils sont désormais banalisés. Il ne manque pas de jours où nous nous retrouvions face à des images montrant des jeunes ayant des comportements douteux.

L’on se souvient encore il y a quelques jours de la diffusion des vidéos de la jeune fille d’à peine 20 ans en pleine ébats sexuels qui a tenu en haleine les réseaux sociaux. L’affaire a même viré sur un débat sur les figures que ces jeunes prennent pour model dans la société. Cette situation a mis à nu le phénomène d’influenceur au Cameroun. Qui devrait être considéré comme influenceur, et pourquoi.

Le phénomène de la web influence traîne parfois derrière lui une mauvaise réputation. L’objectif pour bon nombre d'influenceurs étant de devenir célèbre, de faire le "buzz" par tous les moyens, y compris les plus sordides. Ils sont absorbés par le désir de récolter le plus grand nombre de "likes", d'émoticones de cœurs, d'applaudissements virtuels. Pour cette fin, ils publient quasi-quotidiennement des "posts", des photos, des audios, des vidéos, des "stories". Ils soignent les apparences, montrent sur la Toile une image surfaite et sublimée d'eux-mêmes, très souvent éloignée de la réalité. Ils surfent sur la vague des fantasmes populaires, notamment la richesse, la jeunesse, la beauté physique, la réussite matérielle. Ils veulent se faire passer pour des privilégiés en brandissant ostensiblement des signes extérieurs de réussite, à savoir des vêtements, accessoires, bijoux de marque hors de prix ; ils prétendent rouler carrosse, boire du champagne et des bons vins millésimés. L'argent, les biens matériels sont mis en exergue ici, mais nul ne se soucie de la manière dont ils sont gagnés. Qu'ils soient le fruit de détournements de deniers publics, de la corruption et autres malversations, de la prostitution, du grand banditisme ou feymania, cela ne pose aucun problème car, pour la majeure partie des citoyens, l'argent n'a plus d'odeur. Des publications sur les réseaux sociaux qui sont pour la plupart du temps à l’origine de la dérive de beaucoup de jeunes qui prennent pour exemple ces pseudos influenceurs qui ont emprunté des voix peu orthodoxes pour être célèbre. Une fois sous les feux de projecteurs ils sont adulés par une jeunesse qui pense que pour réussir sa vie elle devrait suivre le même chemin que ces derniers, oubliant au passage qu’il ne faut pas croire à tout ce qu’on voit sur les réseaux sociaux car tout ce qui brille n’est pas de l’or. C’est le lieu ici d’interpeller certains géniteurs ou tuteurs sur le rôle qui est le leur dans la construction de leurs progénitures. Ces parents trop occupés, à la recherche effrénée du matériel, l’obsession de leur affirmation sociale coûte que vaille et qui sont donc incapables de passer quelques minutes avec leurs enfants. Ces parents doivent comprendre qu’un portable dans les mains d’un adolescent, à l’heure des réseaux sociaux, sans contrôle parental, est un cadeau empoisonné.

Comment comprendre que la jeunesse africaine, en quête de notoriété et des likes sur les réseaux sociaux publie des obscénités bafouant dans la volée les règles de conduite en société ?

Que ce soit Instagram, Facebook, tweeter ou des applications telles que Snapchap, Tiktok, ces différentes plates-formes permettent à cette jeunesse de se fédérer, de se réunir, de se créer des liens ou d’échanger sur tout ce qui les entoure. Malheureusement tout n’est pas toujours rose avec les Réseaux sociaux puisque nos jeunes deviennent facilement accros. Les jeunes filles, sont de plus en plus à la recherche du corps parfait. Elle s’assimile à des célébrités, ce qui entraine chez elle une perte de l’estime de soi. Ce regard sévère sur son corps est accentué par les réseaux de placements des produits des influenceuses, les crèmes pour le corps, les potions amincissantes ou autre remède miracle. Tout ceci pouvant provoquer une sorte de dysmorphie chez la jeune fille qui aura des pensées obsédantes sur des défauts imaginaires ou obsédée par l’imperfection de l’apparence physique.

Internet et les réseaux sociaux s’apparentent donc à une jungle où se côtoient les informations utiles et éducatives, comme les futiles et nocives. Avec l’arrivée de nouvelles sources d’information pas très souvent contrôlées par l’Etat ou les parents, les utilisateurs de ces réseaux sociaux deviennent de potentielles victimes de l’avènement de ces nouvelles technologies de l’information. En plus de l’avènement des réseaux sociaux dont le contenu n’est pas toujours soumis au contrôle parental, il faut reconnaitre que nous sommes responsables de nos propres turpitudes. C’est à croire que les africains n’étaient pas encore prêts pour l’ère des nouvelles technologies de l’information et de la communication.

De nos jours pour être considéré comme un modèle de réussite sociale et avoir le vent en poupe sur Internet et les réseaux sociaux, il faudrait être prêt à tout pour de l’argent, et faire la part belle à la futilité, à la superficialité, à la facilité, et aux apparences. Malheureusement, aujourd’hui on peut être un malfrat, un pervers, une personne de petite vertu, mais faire les choux gras et avoir pignon sur rue, uniquement parce qu'on est célèbre sur les réseaux sociaux, qu'on a de l'argent et des biens matériels. Ce nouveau modèle de réussite sociale fondé sur l'avoir au détriment de l'être conduit inévitablement à la chosification de l'humain, à la désorganisation d'une société privée de repères, sans valeurs, sans foi ni loi.

Il apparaît donc indispensable, voire vital pour l'internaute, de faire preuve d'esprit critique, de sagesse et de discernement afin de séparer le bon grain de l'ivraie, de promouvoir l'utile et combattre le futile. Rappelons qu’il y’a encore quelques années au Cameroun, les adolescents n’avaient pas accès aux médias audiovisuels. Les familles qui possédaient un poste de télévision se comptaient au bout des doigts. L’éducation qui primait en ce temps était celle des parents, celle de l’ancienne génération qui accordait une grande importance à la morale ou encore l’éducation des maîtres. Il est donc temps pour les parents qui ont toujours été les premiers éducateurs de leurs enfants de s’y remettre.

Ces parents ont donc le droit et le devoir, de mettre en place des bases intellectuelles et émotionnelles et de développer le système de valeurs et d’attitudes de leurs enfants, d’autant plus que l’avenir d’un enfant est fortement annoncé en filigrane durant la période préscolaire. Ils doivent en toute conséquence exercer leurs responsabilités de parents d’élèves. De son côté, l’Etat, par le système éducatif, doit former les jeunes à devenir de bons citoyens et de bons professionnels et leur donner les bases d’un apprentissage et développement personnel tout au long de la vie.

Auteur: Carole Moukwa