La dernière explosion de colère pathétique d’Issa Tchiroma Bakary, ministre de la communication de Paul Biya et porte-parole de son gouvernement, a mis fin à la question de savoir si M. Bakary est un manipulateur magistral des médias ou simplement un être frustré et en colère. En effet lorsque Tchiroma et son patron ont réalisé qu’ils ne pouvaient pas scalper Nganang, à cause de l’ultimatum des États-Unis d’Amérique: le griot du tyran, Issa Tchiroma Bakary s’est alors tellement senti humilié au point de proférer des injures publiques, pour donner l’impression qu’il est toujours en charge et donc maître de la situation. Mais en fait, il ne l’est pas et ne l’a jamais été!
En pratique, l’explosion de colère de Tchiroma est l’expression d’une maladie « neuronale » qui montre le stress et les dégâts générés par le manque de crédibilité et l’exorable dégradation culturelle d’un régime qui ne se nourrit plus que de l’attribution du statut d »ennemi » aux Camerounais ordinaires. C’est un régime entré en guerre contre lui-même dans un monde globalisé, où il n’est plus facile pour lui de définir qui est mauvais camerounais et qui ne l’est pas. Pour un régime qui gouverne ainsi à partir d’une distinction manichéenne entre les « bons » et les « mauvais » camerounais, il devient de plus en plus difficile de définir le «soi» et « l’étranger », car même les membres du gouvernement de Biya et d’autres décideurs hauts placés de son administration ont une double nationalité. Aussi, quand bien même le Dr Nganang a été « expulsé » du Cameroun, sous ordre direct de l’administration Américaine, le Dr Nganang est et demeure autant camerounais qu’un Issa Tchiroma Bakary.
En fait, les semblables de Nganang et les prisonniers politiques reconnus par le CL2P rappellent constamment au régime Biya combien il est une dictature implacable et non la « démocratie apaisée» que prétend sa propagande. Cette tension fait visiblement des ravages chez Tchiroma qui a du mal à poursuivre sereinement l’éloge habituel de son patron, qu’il est en est à grossièrement qualifier de « magnanime », là où tout le monde a parfaitement compris que le despote de Yaoundé n’a en réalité pas eu d’autre choix que de céder au département d’État de Donald Trump. Issa Tchiroma sait pertinemment qu’il ne peut pas, en toute conscience, chanter « Yes we can – Oui nous pouvons » comme un Barack Obama qui précisément las de ces hommes forts d’Afrique, a toujours insisté qu’il faut des institutions fortes à leur place.
Trouver un succès à mettre à l’actif du régime de Paul Biya semble tellement difficile.
En effet ça doit être épuisant et fastidieux d’essayer au quotidien de trouver quelque chose de génial à chanter, quand en réalité il n’y en a pas. Et je n’ai jamais vu dans ma vie d’adulte un ministre d’une démocratie prétendument apaisée aussi en colère que M. Tchiroma! Il règne une haine presque universelle et pathologique des « opposants » dans ce pays, comme s’y répand lentement une haine de la même nature des soi-disant «anglophones». Quand une «créature de Biya» découvre que le CL2P ne le soutient pas, du moins ne soutient pas cette escalade réactionnaire et identitaire, je regarde souvent leur visage se transformer en un masque de rage. Car les partisans de Biya paraissent si préparés à se battre y compris dans une guerre civile généralisée – qu’ils n’hésitent plus à définir clairement qui ils combattent et aspirent même à combattre sans même se soucier contre qui ou contre quoi.
Ils voient désormais leurs ennemis partout: Vous n’aimez pas les « adversaires »? Mettez-les en prison. Vous n’aimez pas Nganang? Mettez-le en prison. Fatigué des Marafa, Olanguena, Mebara, Fotso etc. … Mettez-les en prison …Mais jusqu’à quand?
Car dans une large échelle, les tristes personnages comme Tchiroma défendent au fond ces comportements de Paul Biya, qui les auraient précisément choqué s’ils venaient d’un soi-disant «adversaire». Ils furent ainsi tous choqués par Nganang et les anglophones qui osent réclamer leur liberté. Il y a bien sûr toujours une mesure d’hypocrisie en politique – et la courtisanerie peut même partiellement tous nous aveugler. Mais lorsque cela atteint ces proportions et une telle échelle, ça frise avec démence ou du mysticisme (voire les deux à la fois).
Personne ne devrait autant tolérer qu’un président appelle et orchestre avec cette frénésie des représailles anticonstitutionnelles contre ses ennemis politiques. Le CL2P croit que les présidents vont et viennent. La Constitution – et la culture de la liberté qu’elle est censée protéger – demeurent.