Il est curieux de nos jours de voir des Camerounais trouver des raisons de satisfaction lorsque leur pays est en proie à des troubles de tous genres.
Au moment où le Cameroun commémore le trente-neuvième anniversaire de l’accession du Président de la République à la magistrature suprême, force est de constater la prépondérance d’actes inciviques. Depuis un certain temps, le Cameroun a cessé d’être ce pays où le sport en général et le football en particulier, était le creuset de l’unité nationale, où le malheur des uns était partagé par les autres. Aujourd’hui les choses ont radicalement changé.
Les défaites de l’équipe nationale de football fanion, les Lions Indomptables, sont fêtées dans les chaumières à cause des considérations d’ordre conjoncturel. Tout ceci montre à l’envi et à suffire que le patriotisme au Cameroun, à défaut d’avoir foutu le camp, tient désormais sur un fil.
diraient simplement que ce pays est ‘atteint de la sinistrose au point où même les victoires sont rangées, dans le registre des défaites. « Existe-il encore une fierté d’être Camerounais? Je ne pense pas vraiment. Le Cameroun est sévèrement bastonné dans les cœurs de ses pères, de ses fils et filles. Les Camerounais vomissent du n’importe quoi quand il faut parler de leur pays, même là où il faut le vanter. Qu’est-ce qui explique ce dégoût? C’est aussi simple que bonjour. L’homme ne vit pas avec le gaz carbonique ! » S’offusque un citoyen lambda.
Enfer
« On dirait qu’il n’y a plus d’oxygène dans ce Cameroun », murmurait récemment quelqu’un dans un taxi. Au demeurant, ces comportements antipatriotiques peuvent s’expliquer dans la grisaille quotidienne et les difficultés de plusieurs ordres auxquelles sont confrontés les Camerounais et, particulièrement les jeunes qui, en dépit des mesures que l’État n’a de cesse de prendre pour leur épanouissement, restent songeurs face à leur avenir.
«Les robinets sont fermés pour favoriser le marché de l’eau minérale dont les promoteurs de sociétés pourraient évidemment être certains coqs de la basse-cour. L’énergie électrique est hospitalisée, notamment dans les quartiers pauvres où ne réside aucun membre influent du cercle des géants. L’obscurité est devenue notre lumière», déclare, avec une once de pessimisme, un jeune étudiant de l’université de Yaoundé 2 Soa, ayant requis l’anonymat.
Finalement au Cameroun, tout est peint en noir par les Camerounais themselves. L’état des routes livre à nos narines de bonnes doses de poussières. Des routes parfaitement enclavées. Les portes de l’emploi sont fermées à double tours avec les cadenas en fer de l’enfer. L’écart se creuse davantage entre les riches et les pauvres.
“Sardine”
Dans nos hôpitaux, c’est plutôt le malade qui doit soigner le médecin. La déontologie est mise entre parenthèses. On assiste aux feux d’artifices du terrible désordre dans nos institutions. La misère est devenue le beau-frère du bas peuple qui n’attend que les élections pour basculer du côté de celui qui leur donnera plus de têtes frites de maquereau, de sardine et un demi-morceau de plantain.
Quel désastre alors que des stratégies foireuses sont implémentées : santé pour tous à l’an 2000, Dsrp, Dsce, Snd30 etc… ! Alors que les détournements de fonds publics battent pavillon haut et font jaillir çà et là, de fastueuses villas, et obstruent nos rues avec de grosses cylindrées qui empêchent même les taxis et autres moto-taximen de gagner au moins leurs deux cents francs. Voilà quelques cris d’orfraie de la jeunesse camerounaise.
C’est tout ça qui tue le patriotisme, comme qui dirait, un cœur en charpie n’a point de sentiment ! « Avides d’oxygène et se sentant traités comme des idiots, chacun est prêt à monter sur le dos d’un poisson pour s’enfuir le plus vite et trouver un abri à l’extérieur du pays », écrivait, fort opportunément, Raviel Karmady, un jeune poète camerounais. Certes c’est dur, toutefois, aucune raison n’expliquerait qu’un citoyen couvre d’opprobres et jette l’anathème sur son pays.
Alors supportons, battons-nous. «En cultivant davantage notre jardin … ». Évitons de peindre en noir notre cher et beau pays. Aimons et servons notre pays jusqu’au sacrifice suprême. Les ancêtres feront le reste. De grâce ! Et, en retour, les dirigeants doivent également avoir une frimousse humaine, loin de la misanthropie ambiante.