Dure reconversion des anciens combattants

Wed, 28 Oct 2015 Source: Monique Ngo Mayag

Donny Elwood a chanté pour son « cousin militaire » ; disant tout le bien qu’il pense de lui, surtout lorsque celui-ci revient de guerre. « Il me garde des pommes de terre, etc. », disait la rime. Que se passe-t-il lorsque ce « cousin militaire » prend sa retraite après des décennies d’exercice de sa profession ou qu’il se retrouve paralysé après une bataille ?

Qu’arrive-t-il lorsque l’heure vient pour lui de tomber la tenue et d’arrêter de travailler pour les intérêts de la nation ? Ces questions taraudent les esprits d’une centaine d’officiers réunis actuellement à Yaoundé, pour un séminaire de quatre jours sur la reconversion des anciens combattants et victimes de guerre.

« Actuellement, leur situation laisse à désirer », déplore le colonel Abba Tongari, directeur de la réinsertion et de l’assistance au Secrétariat d’Etat à la Défense, chargé des anciens combattants et victimes de guerre (Sed/ Cacvg).

Il s’exprimait ainsi hier sur le perron de l’immeuble orange abritant les bureaux de cet organe créé en septembre 2012 par un décret présidentiel. Ainsi, doit-on croire que la retraite d’un militaire camerounais n’est pas enviable ? En filigrane des discours prononcés hier par des voix autorisées, un ancien combattant s’expose à l’oisiveté, l’ennui, aux moyens financiers assez limités, à une difficile réinsertion au sein de sa famille et la société, entre autres maux.

Devenir citoyen lambda a manifestement ses revers. « Depuis les indépendances, plusieurs mesures ont été prises pour améliorer les conditions de vie des anciens combattants et victimes de guerre », relève M. Koumpa Issa, secrétaire d’Etat à la Défense chargé des anciens combattants et victimes de guerre (Sed/ Cacvg).

Problèmes

Ce dernier renseigne qu’un « partenariat a même été signé avec le Crédit foncier dans l’optique d’aider les militaires à se doter d’une maison de retraite par l’octroi de crédit. » Mais tous ces efforts, regrette M. Koumpa Issa, n’ont pas abouti. Le séminaire en cours vise ainsi à concevoir un projet de guide de reconversion des militaires en retraite.

« Ceci, après avoir analysé, disséqué, tourné et retourné la question, les problèmes et les solutions dans tous leurs sens », lâche fermement M. Koumpa dans son discours. Ce séminaire regroupe essentiellement des officiers dont l’âge de la retraite approche. On apprend à propos qu’un colonel par exemple prend sa retraite (en principe) à 58 ans et un général (en principe) à 61 ans. Pour le colonel Abba Tongari, lorsqu’on a 58 ans, on a encore toute la vie devant soi.

En effet, pourquoi cesser toute activité professionnelle lorsqu’on rend l’arme ? Le colonel Abba Tongari imagine avec bonheur un ancien militaire reconverti en artiste-musicien, enseignant, écrivain, médecin ou chef d’entreprise.

« Il peut faire tout ce qu’il veut suivant son potentiel et ses aptitudes physiques et académiques », martèle-t-il devant quelques journalistes un peu sceptiques. Pour que son rêve se réalise en effet, il faudrait au préalable songer à une « aide à la reconversion » encore inexistante. Il faudrait aussi prévoir des écoles de reconversion professionnelle à travers le pays.

Autant dire que l’épanouissement des militaires à la retraite ; bien au-delà de la traditionnelle « pension retraite », nécessite une politique de reconversion professionnelle approuvée et financée par le ministère de la Défense. Le colonel Abba Tongari a bon espoir que les lignes vont bouger. Il s’y attèle lors du séminaire entamée hier et qui prend fin le 30 octobre prochain. Laquelle marque la première étape d’une ambition, qui visiblement, prendra du temps avant de devenir réalisation.

Auteur: Monique Ngo Mayag