Emergence sans redéfinition de notre organisation sociétale

Tue, 10 May 2016 Source: Yves Ayong

Il y a un temps pour tout. Celui de l’émotion n’est pas encore passé, tant il est difficile à la communauté camerounaise, nationale et diasporique, de faire le deuil de Monique Koumatékél, morte dans un hôpital de Douala en essayant de donner la vie.

Cette femme est finalement une partie de nous-mêmes, une réplique de nos tourments et turpitudes, le miroir de l’état actuel de notre société.

Son martyre a fait remonter de nos mémoires enfouies le souvenir de ces morts tragiques de notre enfance, aux aurores de l’indépendance.

Ou ces malades que l’on portait à dos d’homme pour une hypothétique destination, impuissants, résignés: qui ne se souvient d’une tante, d’un voisin, victimes des balbutiements de notre système de santé?

Il y a donc une grande part de nous-même sous ce linceul. Avec lui, la peur d’une régression, d’un retour vers le passé. Néanmoins, le temps du ressaisissement est venu.

La terreur suscitée en nous par ce fait divers épouvantable nous enjoint de penser et d’agir sans attendre.

Nous devons trouver la force de proposer quelques considérations réflexives sur la société camerounaise tenaillée par l’urgence de retrouver des repères.

Nous devons également esquisser des perspectives pour notre jeunesse, donner un sens aux politiques publiques pour qu’elles prennent mieux en compte l’humain.

Aider à recentrer le service public pour que chaque Camerounais soit l’objet de sa bienveillante attention.

En effet, il est grand temps que nous discutions de ces réformes nombreuses et indispensables susceptibles de changer la vie de nos concitoyens.

Nous devons imaginer une société en cohérence avec nos ambitions et éviter de voir nos politiques, notre développement, se heurter sans cesse aux murs de nos impréparations et aux nombreuses faiblesses structurelles et autres résistances culturelles.

Avant d’envisager l’émergence, l’emploi, le pouvoir d’achat, la santé, l’éducation et, donc le progrès, notre nation doit disposer d’un Etat réformiste et se doter d’institutions pour une démocratie participative en adéquation avec les attentes de notre Jeunesse en quête d’espérance.

Il n’y aura point d’émergence sans cette redéfinition de notre identité et de notre organisation sociétale.

Chacun devra se redéfinir pour sortir du jeu carriériste et des postures qui constituent trop souvent l’essentiel du socle de nos ambitions.

L’opportunisme ne peut devenir une culture en soi et le principal moteur d’un pays.

Le Cameroun doit continuer à se forger avec encore plus d’exigence, avec tous ses enfants, de l’intérieur comme de l’extérieur, pour notre destin commun.

Cette refondation citoyenne sera notre réussite. Une exigence pour laquelle il faudra désormais travailler, s’organiser, construire.

Auteur: Yves Ayong