Les deux explosions criminelles qui ont frappé dimanche en début de soirée, dans la région de l’Extrême-Nord, la localité de Fotokol située en face de la ville nigériane de Gambaru, rappellent et confirment, s’il en était besoin, la nature originelle de la secte islamiste Boko Haram dès sa création au Nigéria en 2002.
Celle-ci est, par essence, un mouvement terroriste, criminel et barbare. Son mode opératoire de prédilection, comme elle l’a montré depuis longtemps dans son sanctuaire nigérian et depuis peu, au sud du Niger puis à N’Djaména au Tchad, consiste à perpétrer des attentats par des kamikazes porteurs de bombes. Il se caractérise aussi par la prise d’otages.
Les observateurs avertis relèvent qu’il s’agit là du dénominateur commun aux mouvements terroristes partout dans le monde. A travers des raids de bandes de centaines d’adeptes lourdement équipés d’arsenaux de guerre, Boko Haram a pu laisser l’illusion d’une armée classique.
Cependant au Cameroun, ni les autorités civiles, ni les forces de défense ne se sont trompées sur la nature réelle, terroriste, criminelle et barbare, de cette secte islamiste. En 2013, Boko Haram avait déjà opéré des prises d’otages dont les autorités camerounaises, sous l’égide attentionnée du président Paul Biya, ont réussi à obtenir la libération.
Il s’agit des membres de la famille Moulin-Fournier et du père Georges Vandenbeusch. Les tentatives échouées d’envahissement de localités de l’Extrême-Nord couplées d’exactions sur les populations locales, ont elles aussi mis à nu les méthodes de la guerre asymétrique orchestrée par Boko Haram contre ses ennemis. Ce faisant, cette secte islamiste veut s’emparer de territoires, y assujettir les populations et leur imposer sa barbarie.
Systématiquement repoussés par les forces de défense camerounaises à chacune de leur tentative d’agression, les adeptes de Boko Haram n’ont pas pu occuper une parcelle du territoire national à ce jour. Les informations officielles communiquées par les autorités de notre pays laissent d’ailleurs apparaître que la secte islamiste a subi de lourdes pertes en hommes et en matériel.
Le contexte régional et international éclaire sur la stratégie de la secte. La détermination à mettre Boko Haram hors d’état de nuire s’est traduite au plan régional et international par de multiples concertations dont la mise en place annoncée d’une force mixte multinationale est l’une des conclusions, sans oublier le partage des renseignements.
Le nouveau président du Nigéria, Muhammadu Buhari, quant à lui, affiche son engagement à combattre Boko Haram . Il prend dans ce sens des décisions importantes : installation de l’état-major de guerre à Maïduguri, capitale de l’Etat de Borno , sanctuaire de la secte islamiste ; changements à la tête des armées de terre, de l’air et de la marine ; multiplication de contacts avec les chefs d’Etat des pays voisins -d’où sa visite prévue prochainement au Cameroun- et avec des partenaires occidentaux comme l’indique sa rencontre annoncée le 20 juillet 2015 avec le président des Etats-Unis d’Amérique Barack Obama.
Affaibli , acculé dans son sanctuaire nigérian, Boko Haram réagit par des attentats kamikazes. La secte islamiste entend répandre la terreur, la peur et la psychose. Pour la première fois, elle vient de commettre des attentats au Cameroun, à Fotokol. Elle n’épargne donc aucun front.
Sans pessimisme outrancier, l’on peut faire observer que la secte islamiste s’est appliquée au Nigéria, au Tchad et au Niger, à récidiver avec audace des actions spectaculaires, des opérations violentes non seulement pour tuer et détruire aveuglément, mais aussi pour frapper les esprits avec stupeur et faire la « Une » des médias à travers le monde. La période actuelle est d’autant plus délicate que la fin du ramadan approche.
Les rassemblements de fidèles musulmans, ainsi que les fêtes y afférentes se préparent, induisant des déplacements de personnes, des achats, bref des mouvements de personnes et de biens. La vigilance, qui était déjà de mise, doit sans doute redoubler davantage. Le communiqué publié après les attentats kamikazes de Fotokol, signé du ministre, secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, est édifiant à cet égard.
Le texte relève notamment que « le président de la République a donné aux forces de défense et de sécurité des instructions fermes sur les mesures à prendre en vue d’une sécurisation accrue de notre pays. Il exhorte les populations à la plus grande vigilance… ».
L’intensification des contrôles et des fouilles systématiques des personnes et des véhicules, l’interdiction de la circulation nocturne des motos et du port de la « burqa » font d’ores et déjà partie des mesures prises sur le terrain par les autorités administratives locales. La vigilance est de mise pour chaque citoyen.