Une semaine après le drame qui s’est noué à l’hôpital Laquintinie de Douala autour de la grossesse gémellaire de Dame Monique, on constate que tous les ingrédients camerounais du parfait scandale sont réunis: une négligence familiale prénatale de sept mois.
Un décès, un mauvais accueil au service des urgences de l’hôpital, un flagrant délit de pratique médicale non autorisée, beaucoup de sang, des arrestations plus ou moins justifiées, une presse au vitriol, la mise en scène de tous les politicards en mal de popularité, une communication insipide de l’ordre des médecins, une prise de parole insuffisante du ministre de la santé publique, une communication civile trop passionnée et pour tout couronner, la traditionnelle interview de la tête d’affiche des bruiteurs sur la radio mondiale.
Une occasion qu’a saisie l’avocate attitrée des homosexuels pour dire toute sa détestation du Président Biya et «des siens». Même M. John Fru Ndi a cédé à la pression sociale entretenue autour de cette affaire. Au-delà de la charge émotive et passionnée, peut-on oser poser les vraies questions qui préoccupent le peuple?
D’abord sur la communication, officielle, pour déplorer le silence assourdissant de l’ordre des médecins qui se musèle volontairement, à travers un communiqué, pour ne pas se regarder dans la glace de cet hôpital où rien n’a été fait pour que ce cas, même désespéré, soit géré avec dignité dans ses locaux techniques.
Faut-il rappeler qu’au plan médical, il aurait fallu faire une césarienne post mortem, l’une des opérations de chirurgie parmi les plus complexes. Dame Monique étant déjà décédée, l’ordre aurait dû expliquer que, s’agissant d’une mort cardiorespiratoire, les fœtus n’avaient aucune chance d’être sauvés. Au demeurant, la césarienne à ciel ouvert pratiquée par la mise en cause l’a prouvé. Sachant la complexité d’une césarienne normale, comment cette dame a-t-elle réussi une césarienne post mortem, là où il aurait fallu l’intervention d’un anatomo-pathologiste en local technique approprié?
Ne peut-on pas conclure que cette chirurgienne de fortune en sait trop et tombe beaucoup trop à pic? Cette affaire ne cache-t-elle pas d’autres ressorts? Comment expliquer ce déchaînement de haine viscérale du Président Biya que cette affaire suscite, alors que celui-ci n’est nullement en cause dans cette affaire?
En clair, en agissant de cette façon-là, les personnels de l’hôpital ont posé un acte dont la portée dépasse aujourd’hui leurs petites épaules de médico-sanitaires irresponsables. Ensuite sur la communication ministérielle franchement insuffisante.
Le ministre André Mama Fouda, appelé à mettre en évidence les défaillances de la police d’accueil et de sécurité à l’hôpital Laquintinie ce jour-là, a trouvé un peu de place pour évoquer le Président Biya, alors que la mise en œuvre de la politique nationale de santé publique lui incombe. En dotant le sous-secteur santé de la quatrième enveloppe du budget national après la défense, l’éducation et les infrastructures, le Président Biya a plus que montré sa volonté politique: il a largement fait son travail. Depuis plus de dix ans, ce sont plus de 1 500 milliards de francs CFA que le Président Biya a injecté dans le sous-secteur santé: mais, pourquoi l’accueil des malades ne s’améliore- t-il pas? Pourquoi les modalités d’accueil, quel que soit le cas, ne se modernisent- elles pas?
Pourquoi continue-t-on à attendre trop longtemps pour consulter un médecin? Doit-on rappeler que Douala dispose de l’un des hôpitaux gynéco-obstétrique et pédiatrique parmi les plus modernes d’Afrique subsaharienne?
Pourquoi une femme enceinte de Douala, même sans consultations prénatales, doit-elle aller ailleurs que là-bas? Pendant ce temps, les cliniques privées ne désemplissent plus de tous ces usagers que les hôpitaux publics n’ont pas reçus pour diverses raisons aussi alambiquées que celles connues dans le cas qui nous intéresse, à des coûts cent fois plus élevés.
Il y a donc un problème dans les hôpitaux publics en général et principalement dans les trois grands que sont Laquintine à Douala, Central et Jamot à Yaoundé. Ces trois formations sanitaires demeurent des directions centrales du ministère de la Santé publique. Ce qui n’est plus forcément un atout, mais un handicap sur le double plan de la responsabilité politique et sociale.
À titre d’exemple, l’hôpital central de Yaoundé est régi par un décret fédéral de 1968! Une obsolescence règlementaire regrettable, qui trouve son origine dans la guerre des corporations que se livrent les administrateurs civils (costumes-cravates) et les médecins (blouse blanchestéthoscope) sur le privilège de gestion de cet établissement de soins médicaux. Ceci n’est d’ailleurs qu’un aspect parmi tant d’autres du bouillant salmigondis que constituent les hôpitaux publics chez nous. Pauvre Cameroun!