L’Afrique n’a pas de leçon à recevoir

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Fri, 3 Jul 2015 Source: Philippe Duval

Les objectifs économiques de la tournée éclair de François Hollande en Afrique montrent que la realpolitik l'a emporté sur les principes. En la matière, Paris peut de toutes façons difficilement faire la morale.

Hier, il jouait le rôle de facilitateur dans la crise grecque, avec le succès que l'on sait. Le voilà aujourd'hui en Afrique. Cette fois, il a revêtu son costume de représentant de commerce. Ainsi va la "présidence normale" de François Hollande. Dans deux des pays visités (Cameroun, Angola), il va fricoter avec des présidents (Biya et Dos Santos) qui sont au pouvoir depuis plus d'un quart de siècle.

La bible des droits de l'homme

On pourrait effectivement attendre qu'il fasse entendre la belle et forte voix de la France éternelle, celle de la défense des Droits de l'Homme. Le genre de prédication dont les Africains sont saoulés en permanence par les occidentaux, le type de prêche qui sert souvent d'alibi à des interventions militaires néo-colonialistes comme on l'a vu ces dernières années en Libye ou en Côte d'Ivoire. Avec le résultat que l'on connaît, un Etat Islamique en train de s'installer à quelques centaines de kilomètres des côtes françaises.

Et puis, qui peut accorder un quelconque crédit droitdel'hommiste à un président qui s'aplatit devant les rois fainéants des monarchies du Golfe. Des dictatures bien plus rétrogrades que celles de Biya ou Dos Santos, car eux au moins, respectent les droits des Femmes. Il serait donc temps de cesser de penser que la France est le phare de l'humanité et que les pays occidentaux doivent éclairer et guider le monde.

Le reste de la planète étant sommé de marcher au pas cadencé, de respecter les dix commandements de la bible des Droits de l'Homme. Personne ne va réprimander les Américains parce qu'ils continuent à appliquer la peine de mort. Selon que vous soyez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir...

La mondialisation, c'est l'abolition des frontières, surtout pour les capitaux, mais c'est aussi la disparition de l'histoire des pays et des civilisations. Celle des Africains a été massacrée par la colonisation, mais la mémoire de tous ces peuples n'a pas été complètement effacée. Ils possèdent encore des croyances et des traditions qui les empêchent, par exemple, de reconnaître dans certains pays les droits des homosexuels.

Il ne faut pas oublier, non plus, que la plupart de ces nations, dont les frontières ont été découpées à la serpe par les colonisateurs, possèdent à peine un siècle d'histoire. La France de Clovis ou de Charlemagne en a une quinzaine.

Ce que les Africains réclament, ce ne sont pas des sermons, mais le respect et des relations équitables. Celles d'un partenariat gagnant-gagnant et non gagnant-perdant comme c'est encore très souvent le cas actuellement. Après, si les Camerounais ou les Angolais en ont marre de voir la tête de Biya ou de Dos Santos, c'est d'abord leur affaire. Quand les Français n'ont plus supporté la bobine de Louis XVI, ils ont fait leur révolution.

Auteur: Philippe Duval