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La mémoire historique française au Cameroun: éventuels schémas de reconstitution

Falk Petegou, PhD Chargé de Cours en Etudes Internationales UPAC-Yaounde

Wed, 1 Mar 2023 Source: Falk Petegou

Le débat sur la constitution de la mémoire Coloniale française au Cameroun est houleux. Il oppose trois tendandances . La première, est celle des classiques neofrancise's qui portent l'idéologie continuelle de l'UNC. La seconde , est celle des indépendantistes francophiles.La troisième, est celle des résistants anglophiles. Par ordre, le point névralgique concerne: la continuité de la mémoire, dans l'esprit de l'adulation de l'apport de la France au Cameroun; la critique ou déconstruction du moment français au Cameroun et la rupture de la colonisation interne des francisés camerounais. Ces éléments de controverses n'exclus pas la tentative d'accaparement du projet de construction memoriel par les 2 premières catégories , aussi vrai est-il leur supposé rapprochement à la France à travers le facteur linguistique. C'est ce qui justifie les diatribes observées ces derniers jours entre des historiens camerounais vivant au Cameroun, sur un projet initié par la France.

Fallait-il que la France initie une telle démarche pour que l'idée d'écrire notre vraie histoire jaillisse? Et si beaucoup étaient associés à la commission Macron, ecriront t'ils fidèlement cette histoire quand on connaît leur rôle dans l'embrigardement de cette même histoire sous fonds d'ornieres idéologiques ? Je ne le crois pas. Est-ce à la France de nous rappeler désormais des axes de recherche qui auraient dû constituer l'aussature des recherches universitaires depuis au moins 60 ans ? Est-ce à la France de nous demander de dénoncer l'esthétique du mal essence de notre histoire coloniale et du temps présent ? Que non.

Nous devons faire un "deuil memoriel ". Mais , ceci passe par l'élaboration d'une tectonique savante de la démarche heuristique en la matière, que je fixe en fonction du non-trouve' dans les travaux des classiques historiens camerounais et camerounistes.

La première des choses consiste à faire la critique de la mémoire des conflits d'abord identitaires puis sociopolitiques qui ont traversé le Cameroun ante-colonial, colonial et postcolonial. Il s'agit ici, d'établir des connexions criminelles entre Portugal, Allemagne, France, grande Bretagne, SDN, ONU et leaders locaux, pour en ressortir les logiques d'actions, les motivations ( intrinsèques, extrinseques, amotivation), les jeux d'acteurs, les éléments mobilisés qui expliqueraient le moment colonial français.

La seconde consiste à évaluer la dimension politico-anthropologique de l'oubli de la memoire, des perceptions horribles ,et surtout de leur poids dans la desarticulation des structures comportementales, sociales et mentales des populations qui ont subi des traumatismes. Ceci pourrait se cerner en effectuant des biographies provoquées de personnes ayant vécues ces moments ainsi que celles de leurs progénitures. L'analyse pourrait deboucher sur l'appréciation des gènes modifiés à la suite de cette croisière historique.

La troisième chose à faire c'est de déterminer les trajectoires migratoires des "ancêtres " , fuyant les violences directes pour se réfugier dans d'autres régions du Cameroun ou simplement dans d'autres pays africains . Ceci doit être appuyé par l'appréciation de certaines crises/ guerres actuelles comme déterminants de ce moment colonial( e.g: crise anglophone, héritage successoral etc).

Quatro, il faut interroger le poids de l'horreur subit dans toutes ses dimensions et ses formes. Ceci déboucherait sur la construction d'un idéal de l'en-commun terme cher à Achille Mbembe.

Mais quelles sources consulter? Il faut aller au-delà de l'historiographie Coloniale écrite par les colons, pour dialoguer avec les vrais detenteurs d'enjeux cosmogoniques et spirituels traditionnels , porteurs d'histoires chacun de sa contrée afin de saisir le récit des drames, des pertes, des éléments culrurels matériels emportés et des mémoires tronquées.

A ce moment, le deuil pourra se faire, des rites de retour et de paix des ancêtres se feront et le pardon sera de mise.

Il n'est pas question d'avoir une quelconque indemnisation financière de la France, car l'argent n'achètera pas ce que nous avons perdu .

Enfin, ce travail ne relève pas que de l'histoire historique, mais de l'ensemble des sciences sociales entre autre: les Peace Studies, l'économie, la Science Politique, la Sociologie, l'Anthropologie etc et également des Sciences "dures" telles que l'Astrophysique et la Géométrie. La tâche s'avère plutôt complexe!

Par ailleurs, il n'est pas question d'attendre ni un mot d'ordre de la France , ni une ouverture éventuelle des archives nationales pour le faire. Les vestales de cette histoire trepitent devant nos yeux au quotidien et se retrouvent dans la cinématographie, l'art, dans les musées de chefferies traditionnelles, dans la symbolique des noms d'êtres et de lieux et dans l'ensemble des éléments immatériels de notre culture.

Les perspectives proposées sont génériques et intègrent dans leur finalité toutes les couches sociales au bénéfice de la rente mémorielle

Pour le moment ,l'idée est de partir de l'endogene pour exercer ce travail de fond. Le rapport à la France, question de géopolitique, en découlera.il s'agit donc , de dessiner des scénarios de reconstitution de la mémoire qui débouchent sur la redéfinition des rapports avec la France; et, la politique du pardon, inspirée de nos usages paxologiques, permet d'en établir une porte d'entrée, avenant de l'adoption de la théorie de l'humain.

Falk Petegou, PhD

Chargé de Cours en Etudes Internationales

UPAC-Yaounde

Auteur: Falk Petegou