Une semaine seulement après son lancement, la campagne de lutte contre le transport clandestin lancée par Robert Nkili, le ministre camerounais des Transports, est frappée par un essoufflement.
Cette campagne étant pourtant annoncée à coup de tapage médiatique comme devant être la plus grande traque jamais organisée au Cameroun contre les transports clandestins.
A Yaoundé, des transporteurs têtus ont repris la place, là où, quelques jours avant, s'étaient installées les équipes de contrôle mixte police-gendarmerie et des représentants de syndicats, au grand plaisir de certains usagers affectés par la mesure sans alternative.
Un combat perdu d'avance
Une opération coup de poing pour rien ! A Yaoundé, la situation est quasiment revenue à la normale, on ne dénombre plus que quelques policiers revenus effectuer des contrôles de routine. Pour le ministre, ces « clandos (pour dire clandestins), sont des gens qui refusent de rentrer dans le transport de façon officielle avec une licence de transport, un agrément et qui paient des taxes communales et décident d'aller dans le maquis. C'est souvent des voitures sans plaque d'immatriculation faisant ce qu'ils veulent ». En effet, il était exigé pour chaque voiture, les documents suivants : un permis de conduire et une carte d'identité nationale (pour le chauffeur); une carte grise, une assurance, une vignette, un impôt libératoire, un stationnement, une carte bleue ainsi qu'une visite technique (pour le véhicule).
Le ministre s'est étonné de constater des complicités au sein même de son département ministériel, et au sein de l'administration policière.
« Il faut que nos collaborateurs, les forces de l'ordre fassent leur travail sans état d'âme. Comment comprendre qu'un véhicule de 3 à 4 places passe devant un contrôle de police avec dix passagers, sans être inquiété. C'est impensable », s'indigne t-il.
Les habitudes ont la peau dure. Rencontré au lieu d'embarquement dit : "Poste centrale" à Yaoundé, Charles conducteur de « clandos » est amusé par la mesure et n'hésite pas à dire ce qu'il en pense. « Pour contourner la traque, nous travaillons tôt le matin quand les policiers ne sont pas encore en route et dans l'après-midi quand les contrôles seront terminés ».
Jean Pierre lui se moque carrément de la présence des gendarmes et policiers : « d'ici quelques jours et quand le soleil aura chauffé, les policiers, on va leur glisser quelque chose et ils vont nous laisser. Nous ne sommes pas inquiets pour la suite », ironise-t-il.
Mesure sans lendemain
"40 à 60 % de voitures qui circulent sur nos routes sont des clandos", reconnait le ministre des Transports. Un parc automobile dont l'apport dans le transport public est non négligeable. Selon les autorités, l'objectif est de faire respecter la loi en matière fiscale, pour refaire les routes notamment.
Mais la grande interrogation réside dans l'après « éradication des clandestins ». Comme alternative, Robert Nkili a fait une annonce forte : « Après l'éradication des clandestins, nous allons faire venir des mini-bus de 15-18 places pour le transport urbain. Nous voulons que même s'il existe des cargos, qu'ils observent les lois et règlements de la République ».
Les usagers de la route sont désormais soulagés par le retour au désordre auquel ils ont été habitués. Prochaine plaisanterie, le pied de nez des auto-écoles, qui sabotent le concours du permis de conduire alors que le ministre reste rassurant...