Il ne faut pas se tromper d’analyse et de cible. En toile de fond des joutes ethniques et des labellisations en cours à cette veille de l’élection présidentielle se joue en réalité la succession de Paul Biya.
Les camerounais ne sont pas prédisposés à se haïr. En réalité les migrations, les mariages et les processus de socialisation qui ont contribué à renforcer les mélanges ethniques témoignent à suffisance qu’il n’existe pas fondamentalement au niveau du bas peuple une haine entre groupe ethnique. Mais le problème du Cameroun repose sur l’instrumentalisation de la tribu ou de l’ethnie à des fins de conquête du pouvoir ou de conservation.
On ne saurait analyser le Cameroun sous Ahidjo et Paul Biya sans prendre en compte la gestion des quotas ethniques dans l’appareil de l’Etat qui a la fois été un marqueur de l’hegemonie de certains groupes au détriment de l’exclusion d’autres groupes. Les pouvoirs successifs au Cameroun ont joué en réalité sur l’ethnie pour se maintenir. Le coup d’Etat manque de 1984 largement mené par les originaires du grand - Nord ( une construction politique) l’atteste. Avec Biya, cette situation s’est accentuée.
Le départ éventuel de Biya, comme avec Ahidjo, est perçu par certains camerounais comme la perte d’un pouvoir, de privilèges qui étaient considérés comme naturels du fait de l’appartenance ethnique. L’élite au pouvoir ne manquera pas d’instrumentaliser les rapports de force ethniques pour consolider le plus longtemps possible ses positions hégémoniques.
Dès lors, la promotion du tribalisme au Cameroun relève d’une dynamique d’en haut et non d’en bas. Car autant plusieurs régions du grand Nord étaient marginalisées sous Ahidjo, autant dans le Centre et le Sud il n’y a pas de routes. À Sangmelima on peut couper l’électricité pendant quatre jours. Dès lors, les principaux bénéficiaires du tribalisme sont d’abord les élites qui construisent des discours d’inimitié.
Car l’enjeu en réalité c’est de diviser le peuple pour mieux régner. Détruire toute démarche qui se situe au niveau des préoccupations du bas peuple pour consolider leurs positions hégémoniques. Le tribalisme n’est donc autre chose qu’une savante construction politique. Cependant le peuple d’en bas qui croit défendre des privilèges qu’il n’a pas n’est autre qu’un instrument. On ne naît pas Ewondo, Bamoun , Bulu ou Kirdi. On le devient à travers un processus de socialisation. Ceux qui se battent pour défendre une ethnie sous le prétexte de conserver un pouvoir ou de le conquérir ne sont en réalité que des objets utilisés pour la circonstance.
Voilà pourquoi quand vous finissez de vous détester, le soir quand la réalité vous rattrape, vous remarquez que Eneo a coupé l’électricité, il n’y a pas d’eau, le repas est petit, vous comprenez que le problème ce n’est pas mon frère Bulu , Éton ou SAWA. Mais ceux qui ont le pouvoir à Yaoundé. NE VOUS TROMPEZ PAS DE CIBLE. VOUS POUVEZ LE PAYER TRÈS CHER.