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Les morts de Ndogbat

Mar., 21 Juin 2016 Source: camer.be

Portraits des disparus de l’effondrement d’immeuble de dimanche dernier à Douala. Raïs, Beauté… Ceux qui ont été tirés des décombres de l’immeuble effondré aux premières heures de ce dimanche 19 juin 2016 à Ndogbat avaient des familles, une vie de gens ordinaires, un espoir de rebondir, des amours et des surnoms avec lesquels on pleure les disparus, à la manière des Bantou.

Le sobriquet de la première victime tirée du fatras de béton et de l’armature de fer de cet immeuble de la mort était Beauté. Qui renvoyait à ses traits physiques, comme ceux du métis qu’était Alain Bassong Tchekam, né de parents bamiléké et basa’a. Technicien de surface dans une compagnie pétrolière, il avait perdu son emploi deux mois plus tôt, du fait des difficultés du secteur, dit-on.

A 41 ans, cet enfant de Douala menait une vie tranquille à Ndogbat. Non loin de la maison familiale située à quelques encablures du théâtre du drame, dans le quartier dit Mobil Guinness. On le pleure ici doucement. Comme chez celle qui semblait être sa compagne de tous les jours et préfère demeurer discrète, entourée du voisinage compatissant, à deux pas de « là où ça s’est passé ».

Autre « type tranquille », Chancelin Edoung Tanka, alias Raïs, vendeur et dépanneur d’appareils électroniques, né autour de 1980 à Mbanga. Il a laissé une progéniture comme Alain. Pour lui, c’était vraiment « un jour de malchance », commente Yondo Dalle, sa voisine. « C’était un locataire chez nous, un homme sans histoire que l’on chahutait parce qu’il était sans sa compagne, la mère de son deuxième enfant », témoigne la jeune femme en classant les affaires du défunt, comme l’a demandé sa famille.

Le terrible soir, après avoir regardé un match de foot (il en raffolait, comme des émissions de la télévision Afrique Média), il est allé acheter à manger non loin de la chambre qu’il occupait, laissant « téléviseur et lampe allumés ». En revenant, il s’est arrêté, pour un moment de causerie, chez son ami Guy-Merlin le coiffeur devenu gardien d’immeuble en chantier. Et patatras ! En fait de coiffure, Guy-Merlin Nkuinou n’en faisait plus depuis trois mois.

Une seconde destruction de son kiosque de travail, par la police municipale, l’avait laissé sans moyen, en dehors de son envie de recommencer. Lui, le coiffeur expérimenté de 39 ans, qui venait de s’établir à son compte avait accepté de veiller sur l’immeuble pour gagner au moins ce qu’il faut pour payer le loyer de sa modeste demeure où femme et enfant ne l’attendent plus.

« La famille de son amie est venue la chercher pour lui éviter d’autres chocs après celui-là », explique Geneviève Yanga, une parente. « Je ne voulais pas qu’il dorme là-bas. Il m’a dit : ma sœur, c’est temporaire, il faut bien que je survive en attendant de recommencer mon travail… » Comme partout où l’on parle des cinq de Ndogbat. Dont un malade mental, Nkapnang, né en 1953 à Batoufam. Ou Séraphin Brice, 43 ans, venu de son Tokombéré natal.

Auteur: camer.be