Dans son édito publié le 06 juin 2022 dans le journal Mutations, Georges Alain Boyomo fait sa lecture de la fin du régime Biya.
Au sein de notre bureaucratie politico-gouvernante, il y’a ces derniers temps entre les clans rivaux en présence comme une ferme et inébranlable volonté d’en découdre. De manière décomplexée, les affrontements pour la captation ou la préservation du trésor de guerre et des positions d’influence qui avaient jadis cours à fleurets mouchetés se font désormais à fleurets demouchetés.
Les épées sont littéralement tirées des fourreaux. C’est à qui terrassera son adversaire, mieux son ennemi en premier. Avec panache et de manière irréversible. Le K.O, comme dans un combat de boxe, est frénétiquement recherché. Les nouveaux King Kong font impunément la loi.
Les réseaux sociaux sont les réceptacles par excellence du chassé- croisé ubuesque entre les gladiateurs qui ont littéralement vampirisé l’action de l’État, au point où les réalisations d’intérêt général, bien que chiches, sont quasiment éclipsées sous les projecteurs de l’actualité.
Avide de sang et de changement, le petit peuple s’en régale et en redemande, espérant que le pays renaîtra de ce bal de chiffonniers qui emprunte à un champ de ruines.
Faut-il encore avoir le nez particulièrement creux pour deviner qui se cache derrière qui, qui agit au nom de qui, à qui échoit la procuration de qui dans cette arène tauromachique? La réponse est non. À la réalité, même l’analyste moyen, sans débauche d’énergie extraordinaire, sans se triturer spécialement les méninges parvient à reconstituer le puzzle de la lutte à mort ambiante, à trouver le commanditaire derrière l’exécutant, à désigner le marionnettiste derrière la marionnette, à tracer la main qui arme en filigrane de celle qui tue.
Le Cameroun semble vivre son Grand soir ou tout au moins son aube. Nul ne sait quand ce spectacle de mauvais goût va s’achever.
Les regards sont de toute évidence braqués vers le centre de décision de la République duquel rien ou presque d’amplitude déterminante n’est sorti depuis au moins six mois. Vendredi dernier, des décrets nommant les présidents de conseils d’administration et les recteurs des universités d’État de Garoua, Bertoua et Ebolowa sont apparues comme une pluie fine en plein désert.
Le temps de la reprise en main a-t-il sonné? L’action publique va-t-elle enfin cessée d’être prise en otage par ces groupes d’intérêts puissants et tentaculaires lancés à corps perdus dans le sprint de la succession ? L’horizon de ce pays gâté par la nature, mais tétanisé par l’immobilisme, va-t-il enfin s’éclaircir ? Les prochains jours nous en diront plus.