Dans une tribune publiée il y a quelques heures, l'analyste politique Wilfried Ekanga qui a interpelé récemment Emmanuel Macron, explique comment la visite de ce dernier au Cameroun se place dans le cadre de la succession de Biya par son fils. Un peu comme au Gabon, au Tchad ou au Togo, au nez et à la barbe des opposants de ces pays.
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"On a secoué le cocotier, et les noix sont tombées! Emmanuel Macron arrive au Cameroun pour rassurer Paul Biya que les échanges qu'il a eus récemment avec des opposants de la diaspora ne signifient pas que la France va abandonner son « meilleur élève.»
Macron vient promettre de ne pas entraver Biya dans son processus de fabrication de son successeur (Franck Emmanuel) et donc de laisser couler le gré à gré, tant que Biya s'engage de son côté à garantir à la France sa première place sur l'échiquier économique (Orange, Bolloré, Carrefour, Razel, Air France, etc...) et militaire (dans le sillage du renouvellement des conventions militaires qui a eu lieu le 20 septembre 2021 entre Beti Assomo et Christophe Gilhou, ambassadeur de France).
Comme par hasard, la visite du président français à Yaoundé intervient à peine un mois après notre « petite entrevue » du 8 juin dernier. C'est une coïncidence extraordinaire ! Ça fait pourtant 5 ans qu'il est à la tête de son pays, or tout au long de son premier mandat, et malgré de nombreuses visites chez ses ex-colonies (Mali, Burkina etc...), il n'avait jamais mis les pieds dans la Rivière des Crevettes. Mais cette fois-ci la patate a brûlé, et il faut la retirer du feu.
Quand j'ai dit que le but de mon échange avec Emmanuel Macron était de provoquer la France et de la mettre face à ses propres contradictions, les biyayistes - dont la mauvaise foi est plus sale que le slip du Diable - se sont agités à se convaincre de leurs propres mensonges du type : « Il demande à Macron de sauver le Cameroun », alors que j'exigeais précisément le contraire. Voici donc que la venue subite de Macron confirme fort bien ce que je disais : La France continue d'exercer sa suprématie totale sur le Cameroun au gré de ses intérêts, dans une logique de maître et de vassal.
Quant à ceux qui pensent que la Russie est désormais le nouveau parapluie du Cameroun, je préfère vous décevoir en vous disant que même vos cartes d'identité sont fabriquées par la France, (notamment via les services biométriques du groupe Thalès). Quelle « indépendance » espérez vous quand c'est la métropole qui détient votre fichier national et vos données numériques ?
(C'est ce qui arrive quand on vit dans un pays qui consomme 6 à 700 millions de litres de bière par an. Même la pensée devient ivre.)
Maintenant, observez: à présent que la France se pointe à Yaoundé, les biyayistes néo-panafricains vont l'accueillir avec des rameaux et avec leurs enfants jonchés le long des rues pour applaudir. Je leur ai pourtant demandé d'organiser une marche contre le franc CFA pour prouver que eux, veulent l'indépendance (contrairement au «vendeur» que je suis), mais cela fait un mois que j'attends. Est-ce qu'ils sauront profiter du fait que le Maître est là pour le faire ? Ou est-ce qu'ils auront au moins un semblant de soupçon de courage pour poser à leur tour à Macron des questions qui dérangent ?
On sait déjà qu'ils vont plutôt lui lécher les bottes (à l'instar de Charles Ndongo à François Hollande en juillet 2015), comme de petits chiots souriants. Car les esclaves mentaux, les vrais, les seuls, ce sont eux.
EN BREF...
La France a installé le fils d'Idris Déby sous nos yeux en 2021. Cela signifie que les colonies d'hier restent les colonies d'aujourd'hui ; seuls les naïfs - et les sorciers - s'inventent une indépendance dans leur tête. De même, Paris va soutenir tout leader dont il sait qu'il assurera la continuité des intérêts français au Cameroun. Et comme Obiang en Guinée, comme Bongo au Gabon, Déby au Tchad, comme Gnassingbé au Togo, le fils Biya se prépare à monter sur le trône. Il est d'ailleurs de plus en plus visible ces dernières semaines, lui que nul ne connaissait et dont nul ne parlait jusqu'à il y a peu.
Car en dynastie, le peuple découvre même parfois son nouveau prince après la mort du roi.
Alors vive le gré à gré ; vive l'indépendance soumise ; vive la mauvaise foi médiocre des « souverains » qui rendent compte du GDN ; vive la Rivière des Crevettes".