Le 30 juin dernier, à quelques jours de l’arrivée du président français au Cameroun, nous avons mis sur le marché le journal ci-contre. Si dans l’ensemble, l’accueil a été positif, une minorité s’est attaquée vertement à la véracité de nos informations. Mais lorsque François Hollande nous donne raison dans la déclaration qui va suivre, cette minorité est aux abonnés absents.
« Il y a eu une répression dans la Sanaga-Maritime en pays Bamiléké » (Dixit François Hollande)
Texte : Quand pourra-t-on parler sereinement de tribus dans ce pays sans entraîner des réactions hystériques ? Le titre de notre édition n° 363 du mardi 30 juin 2015, n’était dirigé contre aucune ethnie qui compose la population camerounaise. Il s’agissait, par un titre volontairement agressif, d’amener la France, à l’occasion de la visite de son président de la République, à prendre la mesure du ressentiment de la population camerounaise par rapport aux dégâts causés pendant les années 50 et 60 au Cameroun, par la France.
Une opération réussie
Parmi toutes les réactions hostiles, certes très minoritaires, c’est celle de notre ami Camille Nellè, chroniqueur sur la chaîne de télévision Equinoxe, qui nous a le plus fait de la peine. Le visage fermé, ayant du mal à maîtriser sa colère contre cette édition dont il n’a visiblement pas lu l’article de base, il s’est attaqué avec une violence inouïe contre ce qu’il a appelé ces « clichés » qui veulent faire croire que les bamilékés ont été les victimes de la France pendant cette période douloureuse. Selon lui, les Sawa ont souffert dans le Moungo des exactions des bamilékés qui se « tuaient » entre eux. On a eu le sentiment qu’il dédouanait l’ancien colonisateur.
Que pense-t-il aujourd‘hui de la déclaration, sans équivoque, du président français confirmant les massacres en Sanaga maritime et en pays bamilékés que nous avions rappelés dans cette édition ? On peut ne pas aimer le peuple bamiléké ; ce n’est pas grave. On peut ne pas aimer ce que la génération 40 et 50 a pu réaliser à coups de roublardise, certains auprès d’Amadou Ahidjo et surtout Paul Biya, étant capables de vendre père, mère et fils, pourvu qu’on y mette le prix.
Mais on n’a pas le droit de contester une réalité historique. Le colonel Lamberton (ancien d’Indochine, théoricien de la guerre coloniale, patron de la zone de pacification en Sanaga maritime en 1957, ensuite responsable de la répression en région bamiléké), Maurice Delauney (Ambassadeur au Cameroun, représentant de la France en pays bamiléké…) hier, François Hollande aujourd’hui, reconnaissent tous, les événements sanglants d’avant et d’après indépendance ; pendant ce temps, au nom de petites jalousies, certains veulent nier l’évidence.
Une chose est claire : la répression de la France au Cameroun n’a rien à voir avec la politique du quota tribal qui domine notre vie sociale. Il n’est pas question ici d’impliquer toutes les ethnies afin de « maintenir la paix sociale ». Qu’y a-t-il en fait de glorieux pour les Bassa et le Bamiléké d’avoir été massacré par la France, sans être suffisamment protégés par les leurs ? Indépendamment de la douleur qu’un tel souvenir peut générer,
il ya presqu’un sentiment d’humiliation avec par exemple les images d’un intellectuel de la trempe d’Ernest Ouandié (Qui parlait jusqu’à 5 langues dont le russe), enchaîné comme un voleur de poules, ou encore de Ruben Um Nyobé arrêté comme un vulgaire fugitif dans des conditions extrêmement précaires aux environs de Boumnyebel ? Comme pour les concours administratifs et la répartition des postes dans notre administration, faut-il appliquer le « quota tribal » dans le « partage » de la douleur et de la mémoire ?
Ouest Littoral n’est pas un journal des Bamiléké
C’est vrai qu’un journal au nom d’Ouest Littoral peut a priori être soupçonné d’être pro bamiléké. En réalité, il s’agit d’un journal qui revendique sans complexe son ancrage régional. Il espère, à terme, couvrir toutes les régions de l’Ouest et du Littoral de telle sorte que tout ce qui s’y passe, n’échappe à ses lecteurs.
Se faisant, il essaye de suivre ce qui se passe partout dans le monde avec des journaux comme le Washington post, le Boston globe aux Usa, Ouest-France, la République de Pyrénées, le Courrier cauchois en France… Un tel journal défend, en général, l’identité et ce qui fait la spécificité de la zone sur laquelle il s’appuie.
Mais nous ne sommes pas un journal bamiléké. Nous ne sommes pas et ne serons jamais d’accord avec les Sohaing André, Sylvestre Ngouchinghe, Madeleine Tchuinté…qui trustent les postes politiques pour leurs intérêts personnels, sans jamais penser aux populations locales, victimes de nombreuses injustices. Nous avons du mal à défendre un Yves Michel Fotso qui semble bien là où il est, tout comme le professeur Maurice Kamto dont nous n’avons toujours pas compris comment d’opposant politique dans les années 1990, on peut passer à « créature » de Paul Biya, pour redevenir opposant farouche. Cette roublardise est justement le trait de caractère de nous voulons combattre avec force dans ce que le président Hollande a appelé le « pays Bamiléké ».
En revanche, nous avons une espèce de respect pour les politiques et hommes d’affaires de ce qu’on appelle le « grand nord ». Voilà des gens qui, pour la plupart, soutiennent le régime despotique de Paul Biya ; mais lorsque les intérêts des populations de leur région est en jeu, ils se lèvent comme un seul homme pour les défendre.
Au moment de revendiquer la création promise d’une faculté de médecine à Dschang, tous les politiques et hommes d’affaires de l’Ouest se sont débinés, la peur au ventre ; alors que pour le concours d’entrée à l’école normale de Maroua, une réaction énergique des politiques et hommes d’affaires originaires du « grand nord », quelle que soit l’appartenance politique, a poussé Paul Biya à prendre une décision favorable à la région (100% des candidats admis), même si la stupidité de cette dernière restera dans les annales.
Un journal qui n’est pas soutenu par les Bamiléké
Ouest Littoral, comme tous les journaux du monde, à l’exception notable du « Canard enchaîné » en France, a besoin de publicités et des ventes au numéro pour vivre. Malgré notre notoriété, aucune publicité dans nos colonnes. Si on peut comprendre que les sociétés d’Etat et l’administration refusent de travailler avec nous, qu’en est-il de toutes ses sociétés dont les bamiléké sont propriétaires ? Certains refusent même d’accepter des abonnements gratuits, de peur que cela ne se sache en haut lieu, confirmant le caractère couard qui semble inscrit dans leur Adn.
Si chaque bamiléké achetait une seule édition de notre journal par an, il serait le plus solide financièrement du pays. Malgré le fait que nous sommes le seul journal privé au Cameroun possédant une véritable machine à imprimer les journaux, nos principaux clients sont pour l’essentiel originaires des autres Régions (Beti, Sawa, Nordiste, Anglophone…), les patrons de presse Bamiléké préférant imprimer ailleurs, malgré des tarifs favorables
A la faveur de cette polémique due à notre édition sur les massacres pendant la colonisation, il nous semblait nécessaire de faire cette mise au point. Si nous étions prétentieux, nous demanderions à notre ami Camille Nelle et tous ceux qui pensent comme lui, de nous présenter leurs excuses, après l’aveu, certes tardif, du président de la République française sur les massacres en « Sanaga maritime et en pays Bamiléké