Le président Paul Biya, 85 ans, est candidat à un 7e mandat à la tête du Cameroun qu'il contrôle presque seul, pays dont l'écrasante majorité de la population a moins de 25 ans et où les régions anglophones sont en proie à un conflit armé.
Les dernières statistiques disponibles de 2014, montrent que 75% de la population camerounaise a moins de 25 ans et n'a donc connu que Paul Biya comme président, fonction qu'il occupe depuis 1982.
Ses opposants, dont Joshua Osih, candidat déjà déclaré du Social Democratic Front (SDF, anglophone, principal parti d'opposition) l'accusent d'être responsable du "chaos" dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Les combats sont devenus presque quotidiens entre l'armée et les séparatistes armés de ces régions où les exactions commises de part et d'autre ont entraîné le déplacement de près de 200.000 personnes fuyant les violences.
Pourtant, en dépit de ce contexte délicat, qui aurait pu être fatal à d'autres, Paul Biya réussit à se maintenir au pouvoir sans être véritablement inquiété.
Il a verrouillé l'accès aux postes et institutions clés, jusqu'à la récente création du Conseil constitutionnel composé de onze membres, en large majorité issus du parti présidentiel, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).
C'est ce Conseil qui validera les résultats de la présidentielle du 7 octobre.
"M. Biya a mis en pratique l'adage +diviser pour mieux régner+ et rester ainsi au sommet d'un système sans que puissent s'organiser - et encore moins se coaliser - les forces qui auraient pu lui disputer son pouvoir", estime le chercheur camerounais Stéphane Akoa.
Une fois encore, lors du prochain scrutin présidentiel, il aura face à lui plusieurs candidats d'opposition qui ne sont pas parvenus à s'entendre une candidature unique, plus susceptible d'ébranler le vieux président, dont les proches sont également très 'gés.
Vieux caciques
Parmi eux, les présidents de l'Assemblée nationale, Djibril Cavaye Yeguié, 74 ans dont 26 à ce poste, du Sénat, Marcel Niat Njifendi, 84 ans et premier président de l'institution créée en 2013, le chef d'état-major des armées, René Claude Meka, 79 ans dont 17 à ce poste et le directeur de la société nationale d'hydrocarbures, Adolphe Moudiki, 79 ans dont 25 à ce poste.
Ancien séminariste catholique et étudiant à Sciences Po à Paris, Biya a "mis en place un dispositif autour de lui, qui fait que le système, c'est lui", note un observateur.
Il garde de fait un large contrôle sur son pays en dépit des critiques sur ses absences répétées de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, passés principalement en Suisse.
Des absences qui ont laissé planer au fil des ans des questions sur son état de santé. Fin janvier encore, des rumeurs ont couru, vite démontées par une apparition à la télévision d'Etat.
Paul Biya aime garder le secret autour de lui et de son agenda politique, laissant à ses ministres le soin de communiquer. Si de l'avis de tous, il a le sens de la formule, ses apparitions sont aussi rares que scrutées.
Lors de la dernière en février, le "Sphinx", amateur de costumes en alpaga et cravates en soie, dressait en février un bilan flatteur de sa gouvernance: le groupe jihadiste Boko Haram a une capacité de nuisance "considérablement réduite" dans le nord, et la situation de crise en régions anglophones "s'est apaisée".
Il estimait aussi que l'économie s'était "embellie" dans un Cameroun où seuls 10% de la population active a un emploi formel et où un tiers des habitants vit avec moins de 2 euros par jour.
Paul Biya a épousé en 1994 Chantal, de près de 40 ans plus jeune que lui, rendue célèbre pas ses coiffures extravagantes et ses très hauts talons.
Avec cette ancienne serveuse de restaurant et mannequin qui s'occupe aujourd'hui d'oeuvres humanitaires, le président a eu deux enfants, Junior et Brenda Biya, admis à l'Ecole nationale de la magistrature (Enam) de Yaoundé.
Paul Biya avait déjà un autre fils, Franck, un homme d'affaires discret qui a notamment des intérêts dans le secteur du bois.