L’arrêté du Premier ministre du 8 juillet abroge le décret présidentiel du 9 décembre 2011 portant organisation du gouvernement. Il transfère ainsi les pouvoirs dévolus au ministère des Arts et de la Culture (Minac) à la Primature.
Selon l’arrêté n°058/Cab/Pm/ du 8 juillet 2015 portant création, organisation et fonctionnement du Comité de suivi de la gestion des droits d’auteur de l’art musical, le nouvel organe est placé auprès du Premier ministre. Il sera supervisé par le secrétariat général de ses services. Dans les couloirs du palais de l’Unité, il se murmure qu’en prenant cette décision, soit le Premier ministre interprète mal les instructions du chef de l’Etat, soit il veut carrément montrer qu’il est au-dessus du président Biya.
En effet, au départ, le chef de l’Etat avait simplement instruit le chef du gouvernement d’examiner tous les problèmes qui perturbent la gestion collective du droit d’auteur et des droits voisins du droit d’auteur du domaine musical, de consulter toutes les parties prenantes en vue d’une meilleure appropriation des problématiques liées au bon fonctionnement de l’organisme devant gérer l’art musical et de lui faire des propositions concrètes en vue de l’assainissement de la gestion du secteur, de suggérer des solutions susceptibles de contribuer à la normalisation de la gestion du droit d’auteur de l’art musical en particulier, et du droit d’auteur en général.
Il n’était nullement question, dans les instructions du chef de l’Etat, pour Philemon Yang, de se poser en régent des droits d’auteur de l’art musical. Par contre, explique-t-on en haut lieu, ce rôle revient, ainsi que l’indiquent ses missions et prérogatives, au ministère des Arts et de la Culture conformément à la Constitution et au décret présidentiel n°2011/408 du 9 décembre organisant le gouvernement. Il est ainsi indiqué, à l’article 8 (8) dudit texte : «Le ministère des Arts et de la Culture est responsable de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique du Gouvernement en matière de promotion et de développement artistique et culturel. A ce titre il est chargé (…) du suivi des activités des structures nationales de gestion collective du droit d’auteur et des droits voisins du droit d’auteur.» Bien plus, le Minac assure en outre la liaison entre les pouvoirs publics et les organismes de gestion collective du droit d’auteur et des droits voisins du droit d’auteur.
Selon des indiscrétions, dans son désir inassouvi d'humilier la ministre de tutelle, Ama Tutu Muna en lui ôtant certaines de ses prérogatives, Philemon Yang vient, une fois de plus, de défier le chef de l’Etat. Pour une opinion avertie, cela s’apparente ni plus ni moins à coup d’Etat. En abrogeant un acte du président de la République, l’actuel locataire de l’immeuble Etoile tient à montrer à tous que le Cameroun n'est plus gouverné. Et un juriste, consulté par La Météo, de s’interrogé à son tour : «Peut-on, dans un Etat de droit et sous le prétexte du règlement d'un conflit entre des tiers dont les droits sont reconnus et organisés par une loi, poser des actes qui poussent à s'interroger sur les pouvoirs du président de la République ?» Et de poursuivre : «Monsieur Yang et son groupe manifestent une volonté claire de mettre entre parenthèses, et de façon astucieuse, le président de la République. Violer la loi sur le droit d'auteur pourrait être négligé, mais s'attaquer de manière aussi frontale à la volonté du chef de l’Etat appelle à un examen de conscience des services compétents. Vivement que la Cour constitutionnelle voie le jour pour mettre fin aux multiples dérives de la primature dans la gestion du droit d’auteur !»
Mensonge d’Etat
Une autre opinion ne manque pas de s’inquiéter sur l’état de lucidité des concepteurs de l’arrêté n°058/Cab/Pm/ du 8 juillet 2015, qu’elle qualifie d’escroquerie politico-juridique, cet acte indiquant que la composition du comité de suivi de la gestion des droits d’auteur de l’art musical aura dans sa configuration deux représentants de la Cameroon Music Corporation (Cmc) et autant de la Société camerounaise de l’art musical (Socam). Une grosse entourloupe, lorsqu’on sait que cette décision de Philemon Yang est fondée sur un document signé de personnes n'ayant aucune qualité, portant fusion des ex-Cmc et Socam.
Faut-il le rappeler, ces deux sociétés civiles n’ont plus d’existence légale au Cameroun. Par décision de la Cour suprême se prononçant au fond, l’ex-Cmc n'a plus d'agrément et ses propriétaires l'ont dissoute. Quant à la Socam, son président du conseil d’administration est réputé déchu de sa nationalité camerounaise par la plus haute juridiction du Cameroun. Et, même, sans délibérations des assemblées générales des deux organismes autorisant la fusion, rien de légal ne peut se faire, car les textes des deux organismes précisent clairement qu'aucune décision ne peut être prise en dehors de leurs sessions régulières. Que cherche-t-on réellement à la primature dans les affaires de gestion du droit d’auteur dans l’art musical ? L’argent qui y coule à flots ?
Poursuivant sa stratégie de la terre brulée, Philemon a, hier mercredi, nommé Michel Mahouvé, magistrat de 4ème grade, comme président de son comité fantoche. On notera, pour s’en étonner, que le chef du gouvernement s’est bien gardé de pourvoir tous les autres postes de membres de ce clan entièrement dévoué à sa fumeuse stratégie dit d’«assainissement de la gestion des droits d’auteur de l’art musical».