La raison est simple:
1. Le 1er janvier 1960, le Cameroun oriental francophone accéde à l'indépendance et devient La République du Cameroun (LRC).
2. Pendant ce temps, le Cameroun occidental anglophone est encore sous colonisation britannique. L'ONU ne lui donne pas le choix de devenir indépendant, c'est-à-dire ne lui accorde pas ce droit à l'autodétermination qu'avaient obtenu les autres colonies, mais lui impose plutôt de se rattacher soit au Nigéria, soit au Cameroun, en 1961.
3. Un tel rattachement avait pour conséquence directe de faire disparaitre la structure de l'Etat de La République du Cameroun (LRC) francophone et de favoriser la naissance de la structure fédérale dans le but de conserver tout l'héritage anglo-saxon d'un côté et francophone de l'autre, à savoir conserver les deux gouvernements fédérés anglophones et francophones avec leurs polices, leurs systèmes scolaires, juridiques et sanitaires distincts.
4. Mais voilà que le président francophone, Ahmadou Ahidjo, sous la pression de la France qui vient de renifler l'odeur du pétrole à Limbe,, organise un référendum anticonstitutionnel (parce que la constitution prévoyait le caractere inviolable de la fédération) et truqué (puisqu'il fait aussi voter les Francophones du nord au sud et de l'est à l'ouest sur une question ne concernant que les Anglophones) pour supprimer la forme fédérale de l'Etat. Ce référendum, les Anglophones le considèrent déjà ce moment-là comme un coup d'Etat civil.
5. En supprimant l'Etat fédéral, Ahidjo créé la République Unie du Cameroun (RUC), laissant ainsi, avec l'adjectif "unie", une petite porte ouverte à la compréhension qu'il y avait deux Camerouns.
6. Paul Biya, l'autre Francophone, monte au pouvoir et, en 1984, ferme définitivement cette porte. Il modifie la constitution et supprime unilatéralement, sans consultation référendaire, l'adjectif "unie" pour re-créer La République du Cameroun (LRC), c'est-à-dire pour re-créer la LRC qui avait existé entre 1960 et 1961, autrement dit pour restaurer cette LRC francophone qui avait existé quand les Anglophones étaient encore sous colonisation britannique.
7. La République du Cameroun (LRC) est donc un projet de francophonisation des Anglophones. En marchant en 2016, les avocats et les enseignants révélaient au grand jour cette grosse duperie qui s'est matérialisée sous le régime Biya, de Bamenda à Buea, par la lecture du droit français dans les tribunaux anglophones et la nomination des francophones dans les écoles anglophones, entre autres. Ils ont compris, les avocats et les enseignants, tout comme tout le peuple anglophone, qu'en optant pour le rattachement à La République du Cameroun, à la LRC, en 1961, ils entraient dans un marché de dupes. Nous, Francophones, les avons pendant tout ce temps totalement égarés. Oui, ils étaient tous perdus, nos Anglophones ! Mais ils se sont réveillés à jamais, et ils regardent désormais La Republique du Cameroun de loin.
8. Il faut les inviter à la table du dialogue et renégocier une fédération plus propre, plus sincère et plus juste. À deux Etats le risque de récidive d'une duperie future sera toujours grand. À dix Etats, ce risque s'estompera et les convaincra de la sincérité francophone retrouvée.