Depuis son approbation en juin 2000 par le chef de l’Etat, et révisé en novembre 2005, le Programme National de Gouvernance tarde à s’adapter aux évolutions de l’environnement national.
Comme nombre de pays africains, le Cameroun a connu au cours des dernières décennies une succession de réformes sur les plans administratif et public. Tour à tour, le pays est passé de la promotion d’un État fort, développementaliste, à celle d’un État limité et discret, pour revenir à un État organisateur. Tout au long de la période ayant suivi l’indépendance survenue en 1960, l’État a été le moteur du développement économique et social du pays, régulant, réglementant et ordonnant tous les domaines des sphères publiques et sociales.
Puis, au milieu des années 1980, sous l’effet de la crise économique, son rôle social et sa mission ont décru sous le coup des programmes d’ajustement structurels (PAS). Ces programmes, initiés par les bailleurs de fonds internationaux, prônaient le désengagement de l’État des secteurs économiques et sociaux, et présentaient le secteur privé comme le moteur de la croissance économique et de la régulation sociale. Cependant, au lieu de susciter la croissance escomptée, et l’amélioration des conditions de vie des masses, les PAS engendrèrent l’effet contraire et contribuèrent plutôt à aggraver l’exclusion sociale et la pauvreté des couches sociales défavorisées.
Le Cameroun a cherché à remédier à cette situation, en mettant en place, avec le concours des partenaires au développement, des « Dimensions Sociales de l’Ajustement » (DAS), qui, elles aussi, montrèrent leurs limites. La création du PNG fut au centre de la réponse à cette question. En 2009, un collectif, notamment, le Collectif de Citoyens Patriotes (CCP) a interpelé le Chef de l’Etat au sujet des retards considérables pris par le Programme National de Gouvernance auquel le gouvernement a souscrit en 2000. Il est donc curieux de constater que depuis plusieurs années que l’actuel patron de l’Immeuble étoile est là, point de réunion dudit comité.
Greffée plutôt que produite, la réforme attendue du programme comporte de nombreuses illusions, notamment par rapport aux attentes de changement. L’absence de concertation et de réflexion préalables, sur le sens de la réforme, sur ses enjeux, sur sa mise en oeuvre, par les acteurs majoritaires de la sphère publique que sont l’État et les différents ministères concernés, les syndicats, les fonctionnaires eux-mêmes, les structures privées qui seraient impliquées et les citoyens, prive la réforme d’un support historique. Du coup, son impact sur les plans politique et administratif s’en trouve réduit à l’ordre du symbolique.
Le coordonnateur du Programme National de Gouvernance, le Pr Dieudonné Oyono nommé recteur de l’université de Douala, a été remplacé par le Dr. Bernard Nomo, mais cette institution, au moment même où le pays est constamment interpelé en matière de gouvernance ne semble pas bouger. La corruption fait la résistance, le climat des affaires est terne et décourage l’investissement privé et étranger, la croissance n’est pas au rendez-vous. Pourtant, si l’on part du constat de la permanence de la faillite du service public au Cameroun, et de celui de la triple crise de légitimité, d’efficacité, de financement de l’administration publique, l’urgence et la nécessité d’une réforme ne laissent point de doute.
Face à cette situation, le Collectif des Citoyens Patriotes est remonté au créneau et rappelle à l’attention de la communauté nationale les objectifs que le gouvernement s’était fixés. Des objectifs qui pour la plupart restent d’une cruelle actualité en ce début d’année 2017, qui doit être celle du sursaut patriotique auquel nous invite le Président Paul Biya. Du côté du PNG, l’on se félicite de certaines avancées, notamment, la rationalisation des structures et procédures administratives.
A en croire certaines sources dignes de foi, « l’administration camerounaise dispose désormais des plans d’organisation des effectifs des ministères plus cohérents, pour une plus grande célérité dans le traitement des dossiers, une traçabilité des procédures, grâce à l’élaboration des Manuels de Procédures Administratives (MPA) dans tous les départements ministériels, des normes de rendement et d’évaluation des agents publics désormais en vigueur, construites suivant le principe d’évaluation au résultat ».
Finalement, l’on peut conclure qu’en plus des défis sociaux, politiques et organisationnels, le Programme national de gouvernance pose un défi historique majeur : celui de la capacité démiurgique du Cameroun de construire un projet de modernité administrative et politique, qui reflètera les compromis et attentes de sa société, et redonnera à l’institution politique son juste rôle dans le processus de développement économique du pays.