Il y a quelques jours, le Professeur Alain Fogue adressait une note au Président Paul Biya sur le cas des détenus politiques du MRC. Il l'invitait à prendre en compte les décisions rendues publiques par la commission des Droits de l'Homme de l'ONU. Joseph Ateba revient sur cette correspondance dont il fait analyse minutieuse.
Débat sur le caractère contraignant de l’avis du Groupe de travail sur la détention arbitraire de la Commission des droits de l’homme de l’ONU (GTDA).
Je tiens à préciser que je ne suis pas un érudit du droit mais je voudrai simplement m’appuyer sur les dispositions légales pour une analyse logique. Ne dit-on pas que nul n’est censé ignorer la loi?
Mon analyse part du principe que la constitution est la loi des lois et que la loi doit être respectée et appliquée.
-La constitution du Cameroun dispose en son article 45 que les textes internationaux dûment ratifiés sont au-dessus de la constitution ce qui veut dire en d’autres termes que ces textes deviennent les composantes de la loi fondamentale camerounaise et du corpus juridique national. À ce titre, ces textes internationaux doivent être respectés et appliqués. Je tiens à préciser qu’on oblige aucun état à ratifier un texte international et c’est en toute souveraineté que le chef de l’état le fait conformément au pouvoir à lui conféré par la constitution.
-L’article 2 de notre code pénal dispose que tous les textes internationaux dûment ratifiés s’applique à lui.
-Les décisions du GTDA sont consécutives à la comparution des parties en conflit. À savoir d'une part les communiquants partie civile et l'État mis en cause de l'autre.
-Le caractère contraignant ou non des décisions du GTDA dépend du respect que le dirigeant suprême garant de la constitution a pour les institutions de son pays. Ce débat pose la question de savoir si l'État du Cameroun est-il un État de droit ou pas.
C’est sous cet angle qu’il faut comprendre la correspondance du Pr Alain FOGUE au Président Paul BIYA l’invitant au respect de la constitution par l’application de la décision du GTDA sur les prisonniers politiques au Cameroun.
Le hors sujet servi par certains politologues intervenus dans le journal du soir D'ÉQUINOXE TV le mardi 2 mai 2023 à 2023 dénature l'objet et l'objectif de la correspondance du Pr Alain FOGUE adressée au Président de la République.
Ladite correspondance à l'introduction rappelle les circonstances de la victoire de Monsieur Paul BIYA lors scrutin présidentiel du 7 octobre 2018. Souligne que après les arrestations arbitraires, les tortures et les emprisonnements massifs au faciès de 2019, suite à une résolution du Directoire du MRC, dans l'intérêt supérieur du pays le parti avait renoncé à sa victoire volée. Et rappelle que suite à cette évolution de la position du MRC M. Paul BIYA est le Président de la République de fait. Sa correspondance s'adresse donc à Monsieur Paul BIYA, Président de la République du Cameroun.
Cette correspondance n'est donc ni une supplication ni un appel à une quelconque indulgence d'un détenu qui serait éventuellement dans le remord, le regret ou l'imploration du pardon ou de la grâce présidentielle.
Au contraire, elle est un rappel du Président de la République à ses obligations constitutionnelles et à sa propre responsabilité pénale.
C'est vrai que sous le régime Biya-RDPC, personne avant n'a mis le président de la République Paul BIYA de la sorte face à ses obligations constitutionnelles et à sa propre responsabilité pénale. Cette sortie unique dans les annales politiques sous le Renouveau du Pr Alain FOGUE a probablement troublé la grille d'analyse habituelle de certains politologues.
Pour eux en effet, si on est en prison on ne peut mécaniquement écrire au Président de la République que pour implorer sa magnanimité et donc sa grâce. C'est pas ce que demande pr Alain FOGUE. Il demande à Monsieur le Président de la République des respecter ses obligations constitutionnelles, notamment l'article 5(2), et donc de libérer immédiatement les 62 OTAGES POLITIQUES du MRC et d'ordonner leur dédommagement ainsi que celui des centaines de militants du MRC arbitraiment arrêtés illégalement détenus lors des MARCHES PACIFIQUES de 2019 et de 2020, en application de l'Avis du GTDA.
L'application de cette Avis du 4 novembre 2023 qui demande leur libération immédiate ainsi que le dédommagement de tous militants du MRC arbitraiment arrêtés et illégalement détenus en 2019 et 2020, n'est pas, contrairement aux politologues intervenus dans le journal D'ÉQUINOXE TV, une option ou facultatif. C'est une obligation constitutionnelle et juridique, et pas uniquement politique, pour le Cameroun de se plier à cet Avis. S'y plier, c'est pour le Cameroun respecter le Préambule d, les articles 45 et 5 (2) de sa propre constitution. C'est également respecter l'article 2 de son propre Code Pénal.
Les vraies questions qui méritent d’être posées ici sont les suivantes:
Le GTDA est-il habillé à entendre des questions liées aux détentions arbitraires au Cameroun?
La réponse est oui par ce que le Cameroun l’a accepté librement.
Le président de la république du Cameroun doit-il tenir compte de l’avis du GTDA et le mettre en exécution?
La réponse est également oui par ce que c’est le président qui est garant du respect de la constitution.