Sébastien Eloundou donne un puissant coup de pied dans la fourmilière du tribalisme anti-Bamiléké, notamment dans l'ethnie Beti dont lui-même est issu. Dans la tribue ci-dessous, il dénonce ce qu'il appelle "l'apologie tribale", égirée en "modèle éducationnel" chez les Béti.
---
"Dans la vie, il faut avoir des principes d'honnêteté et d'impartialité. Il ne faut pas juger une chose comme bonne ou mauvaise selon que cela vienne de ta tribu ou non.
Moi dans ma famille on me connaît. Je n'aime pas le tribalisme et s'il faille même parler de tribalisme, je dois sans aucune hésitation dire que c'est chez nous les Beti que nous faisons de l'apologie tribale, un modèle éducationnel.
J'avais à peine 4 ans que déjà j'entendais dans les bouches des aînés de ma famille, le discours tribal anti Nguelefis. Ke ooo ils sont hypocrites, ke ooo ils sont envahissant etc. Je ne connaissais même aucun Nguelefis, mais déjà j'avais de mauvais préjugés les concernant. Lorsque mon grand frère fût affecté au lycée classique de Bafoussam où il me prit avec lui, de la 2nd en terminale, j'ai eu l'occasion de découvrir une réalité autre que ce qui m'avait été raconté sur les Bamiléké.
Pendant les 3 ans que j'ai fait à Bafoussam, je n'ai jamais été victime de rejet. Jamais je n'ai entendu le fameux RENTRE CHEZ VOUS. Et lorsque j'allais à des festivités, j'avais remarqué que on jouait tout type de musique. Sawa, Peulh, Beti, etc.
Mais lorsque je regarde chez moi jusqu'à nos jours, quand nous organisons nos événements ce ne sont que des artistes Beti qui sont invités. Ce qui n'est pas le cas à l'ouest car que ce soit Ktino, Lady Ponce, Ntsimi Torro, Coco Argentée etc., tous font régulièrement des tournées à l'ouest. Pouvez-vous me citer des cas pareils d'artistes Nguelefis qui font des tournées chez nous ?
Et quand on parle de rejet, combien de Beti ont-ils déjà été attaqués à l'ouest ? Ma tante y a servi aux impôts Pendant 27 ans, et elle y vit même toujours. Jamais son voisin, ou des habitants du quartier ne l'ont agressé. Elle a même été intégrée dans les tontines avec ses collègues.
C'est pour dire que les réactions comme celles de Ottou Sydney ci en images ne sont que le résultat d'une éducation tribaliste, que nous recevons depuis l'enfance.
Pendant que chez les Nguelefis on leur apprend à se développer économiquement et à ne rien attendre de personne, chez nous on nous élève dans l'exclusion de l'autre à l'exception de notre frère du village. C'est pourquoi chez nous même quand on attrape un voleur, on est plus enclin à être Clément quand il s'agit de notre frère plutôt que lorsqu'il s'agit des autres.
Et c'est cet état de chose qui explique notre médiocrité et la misère de mon peuple. Car on préfère que notre frère meurt au pouvoir même si nous n'y gagnons absolument rien, plutôt que faire confiance à un étranger qui nous promet d'améliorer nos conditions de vie.
C'est donc la raison pour laquelle j'exhorte mes frères quand j'en ai l'occasion, de sortir de leur forêt et surtout de faire sortir la forêt de leurs esprits, pour réaliser que le monde évolue, nous ne sommes plus en 1960. Il y a des millions de filles Beti qui sont des femmes Bamiléké et y a des millions de Bamiléké qui sont maris de filles Beti et ils ont ensemble des milliers d'enfants.
Le discours tribal n'a donc plus de sens que pour celui qui vit encore la tête dans la forêt, car ceux qui en sont sortis, savent que dans les grandes métropoles aujourd'hui, 60% de vos dépenses journalières vont dans les caisses des Bamiléké. Et 80% de nos frères qui travaillent dans le privé, le font dans des entreprises Bamiléké. On prend le taxi de Kamga, on entre acheter du riz dans le Supermarché de Djientcheu, on boit une bière au snack de Godem, on amène la petite au glacier de Kuemo, on va danser dans la boîte de nuit de Wafo et on va dormir à l'hôtel de Fotso. Et c'est grâce à cela que notre économie évolue malgré les pillages et les détournements massifs.
Un tribaliste n'est donc de nos jours qu'un animal préhistorique. Certains viendront me dire qu'il y a aussi des Bamiléké tribalistes, et je leur répondrais en leur demandant de me montrer, la boutique du Beti qui a été cassé par un Bamileke. Je leur demanderais le nombre de fois où des Bamiléké se sont attaqués à des Beti à leur demandant de rentrer chez eux ? Et je finirai en leur demandant comment Biya fait-il pour avoir 100% aux élections dans certains départements à l'ouest alors que les natifs du coin n'ont pas ces résultats ? Mais quel Bamiléké a-t-il déjà fait 100% dans un village du Centre Sud Est ?"