Scrutin du 7 octobre: 6 mythes qui entourent Etoudi 2018

Etoudi Coup Detat Constitutionnel Le scrutin présidentiel est prévu pour le 7 octobre 2018

Fri, 3 Aug 2018 Source: lacasedanna.com

Depuis des semaines, j’observe les prises de position des uns et des autres sur cette présidentielle, et j’ai voulu partager mon avis (avant tout personnel) sur plusieurs “vérités” alimentées autour de cette élection.

1. Voter ça ne sert à rien

Ok. Je veux comprendre. Depuis 1982, nous vivons sous le même régime, dirigé par un homme de près de 90 ans, qui nous a de surcroît volé notre liberté en 1992, et voter ne sert à rien? Beaucoup me diront (car c’est ce que je lis): c’est précisément parce qu’il a réussi à voler l’élection de 1992 que ça ne sert à rien. Je voudrais cependant remettre les uns et les autres dans un peu de contexte.

A- En 1992, ça fait à peine que le régime fortement policier et autoritaire s’est vu forcé la main pour s’ouvrir au multipartisme et cela comme plusieurs régimes semblables dans la sous-région. Sur le fond, il n’est donc pas déterminé à perdre et fait tout pour l’éviter. C’est donc la PREMIERE élection à plusieurs partis de l’histoire du pays.

B- Le parti principalement déclaré parti d’opposition a été créé aux forceps à peine 2 ans avant (le jour de sa création officielle, 6 civils sont tués par l’armée lors d’un meeting). Plusieurs partis à sa suite se créent et participent aux élections. Il n’y a donc pas en réalité, une opposition unifiée ni totalement une coalition. Au contraire, il y a des embryons de partis pour la plupart (à l’exception de ce parti), et certains déjà ouvertement acquis à la majorité présidentielle.

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C. Fait majeur: Le fichier électoral utilisé pour cette élection est celui de 1971, non-toiletté, avec notamment des personnes décédées parmi les votants. Le processus électoral est totalement géré par l’administration territoriale, sans aucune centralisation ni recoupement des listes. On s’inscrit à la sous-préfecture et en réalité, on peut s’inscrire autant de fois qu’on le souhaite dans des circonscriptions multiples.

D. Malgré un processus électoral pourri de part en part, les citoyens se mobilisent MASSIVEMENT, malgré les interdictions, les menaces physiques nombreuses, les intimidations permanentes (tout sauf de la rigolade) et votent. Au-delà de voter, les militants de parti s’impliquent pour participer aux décomptages des voix tel que permis par la loi et empêchent dans une certaine mesure, la fraude (malgré le fait qu’elle était déjà intégrée à l’origine). Les tendances publiées par l’opposition annoncent une victoire.

E. C’est un appareil étatique impitoyable, soutenu par la force des armes qui se met en place pour déclarer la victoire (tenue), emprisonner à tour de bras, et réprimer la contestation populaire qui suivra. Cependant, une chose demeure. 1992 a marqué un tournant, un forcing à l’ouverture et une incitation à un poil plus de libertés civiles dont chacun d’entre nous bénéficie aujourd’hui au prix du sang de ceux qui ont fait fi de leur peur.

F. Depuis 1992, on a vu le forcing continuer, la création de l’ONEL remplacée par ELECAM, le démantèlement du fichier de 1971 (utilisé cependant jusqu’au début des années 2000, avec le vote de célébre mémoire d’un Andze Tsoungui pourtant mort, à une élection municipale dans la ville de Yaoundé), et la mise en place tant bien que mal de la biométrie et de l’obligation de mise à jour annuelle du fichier électoral.

G En 2018, le sang de nos frères et soeurs versé en 1992, nous a donc permis d’avoir une carte d’électeur biométrique mais nous nous permettons le luxe de considérer les élections comme inutiles, parce que “perdues d’avance”.

2. Sans coalition, l’opposition ne gagnera jamais

Comme je l’ai énoncé plus haut, la coalition pure et parfaite n’était pas de mise en 1992, mais au-delà de ça, et surtout en dehors de ça, quelque chose me chiffonne dans ce discours repété inlassablement par des intellectuels qui occupent à longueur de journée nos plateaux de télévision et de radio (Elimbi Lobe en tête du massacre). Quelque chose, ou en réalité plusieurs faits, ne font pas de sens et je m’interroge.

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A. Notre pays est au bord du précipice sur tous les plans. Toutefois, des intellectuels “reconnus” nous invitent en somme à ne pas voter pour un projet politique, mais pour l’alternance. Certains mêmes évoquent le fait que le président ainsi élu s’engagerait d’ici trois ans à ouvrir une conférence nationale pour remettre en question la vie de la cité.

Ma question dans ce micmac est: à quel moment le citoyen est-il au centre de la conversation. En tant que citoyen, j’ai le droit d’être convaincu par un programme, par une personne qui s’est débrouillée pour me présenter sa vision détaillée et me rassurer sur le fait qu’il sait de quoi il parle. Mais apparemment Elimbi Lobe me dit que j’en demanderais trop, ou bien?

B. Dans tous les pays du monde, lorsqu’on parle de coalition, on parle d’associations d’idées. On associera les partis progressistes, dits de gauche, avec les partis conservateurs dits de droite. Au Cameroun, en 2018, on me demande à moi citoyen de fermer les yeux sur tout ça. Je dois seulement me contenter d’une candidature unique, voter pour cet opposant er rester calme.

C. Si nous voulons le changement, commençons par être exigeants. Expliquez-moi s’il vous plait comment quelqu’un qui aurait été voté non pour ses compétences mais pour celui d’opposant simplement, se sentirait redevables aux citoyens Camerounais d’une quelconque obligation de réussite.

3. L’opposition ne s’est pas assez battue pour une élection à deux tours

Ca aussi, je l’entends. Sans élection à deux tours, l’opposition ne gagnera jamais. De fait, elle devrait plutôt que d’appeler au vote, exiger pour 2018, l’élection à deux tours. J’ai une petite séries de question à cet effet. Qui détient la majorité parlementaire dans notre pays? Quel organe est en charge de la revue des lois? Comment faire passer une loi qui par essence appelle à la chute du régime, dans un parlement détenu par ce même régime? Peut-être c’est moi qui n’y comprends pas grand chose.

4. Les élections ne seront pas valables à cause de la crise anglophone

Je ne reviendrai pas sur les causes et origines de la crise anglophone. J’ai déjà écrit plus de 1000 mots. Je soulignerai simplement une question: à qui profite le pourrissement de la crise? Partant de la réponse qui semble évidente (mais ne sait-on jamais), pourquoi pensons-nous sincèrement qu’il y a un micron de chances que cette crise et les conflits y afférents, s’arrêtent avant le 07 Octobre 2018?

Et pourquoi tout le monde se focalise sur le NO et le SO? On a l’impression que les uns et les autres pourront aller librement au vote à l’Extrême- Nord avec Boko Haram qui rôde? Grande interrogation. Si ton frère est malade et qu’il ne peut se lever pour acheter ses médicaments, que fais-tu? Tu vas à la pharmacie à sa place et tu lui ramènes ses médicaments. Le vote est le médicament de nos frères blessés du Nord-Ouest, Sud-Ouest et du Septentrion. Nous n’avons aucune excuse.

5. Tous les politiciens sont à la solde du parti au pouvoir

Ai-je vraiment besoin d’expliquer cette affirmation? Petite question: si nous votons tous contre et qu’un candidat arrive à gagner, nous supposons donc que le parti au pouvoir le paiera et plutôt que de se battre pour une victoire bien méritée, il abandonnera tout parce qu’il est à la solde du pouvoir? Je ne nie pas qu’il y ait des partis malhonnêtes existant (des partis de la mouvance présidentielle). Cependant, est-il possible de se désintéresser à ce point de la politique chez nous?

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6. Le Cameroun est un et indivisible

Cette affirmation d’une horrible cruauté semble être le choix de slogan d’un certain Candidat. Je ne vais pas démontrer toutes les raisons pour lesquelles cette affirmation n’est pas vrai. Tribalisme, corruption, népotisme, violences militaires et urbaines (grand banditisme), inégale répartition des ressources, la liste est longue.

En conclusion, en tant que citoyen Etoudi 2018 sera avant tout l’occasion de mesurer notre patriotisme. Nous aurons après cette élection le dirigeant que nous ne méritons. Cependant, ne nous trompons pas. Rien ne sera le résultat de la chance. Si nous voulons réellement l’alternance, nous l’AURONS.

Pour la première fois depuis longtemps des candidats se mobilisent avec de VRAIES Propositions. Par contre, si sept ans sont encore offerts au statu quo, ce sera aussi NOTRE CHOIX. Que chacun prenne ses responsabilités.

Auteur: lacasedanna.com