La communauté française du Cameroun vient de marquer l’opinion à travers un geste éloquent de solidarité : six containers de matériel médical pour alléger les souffrances des populations victimes des exactions de la secte terroriste Boko Haram dans le septentrion. Constitué entre autres de lits médicalisés, de brancards, de chaises roulantes, de matériels de radiologie et de laboratoire, ce don est destiné à secourir aussi bien les forces de défense et de sécurité engagées sur le front pour défendre l’intégrité du territoire national que les populations civiles dans les traumatismes à elles imposés par des exaltés assoiffés de sang.
L’élan de cœur des Français résidant au Cameroun est d’autant plus appréciable qu’il s’adosse sur le sentiment de pleine appartenance au triangle national, leur terre d’accueil pour laquelle ils expriment un fort attachement. Leur deuxième patrie, comme l’aura plaidé généreusement leur porte-parole, Pierre Clerfeuille. Au-delà de la valeur du matériel offert au comité interministériel ad hoc de gestion des dons aux populations et aux forces de défense dans le cadre de la lutte contre la nébuleuse Boko Haram, c’est davantage la signification profonde de la démarche qui est frappante.
Car, voilà : depuis le déclenchement de cette drôle de guerre contre les ennemis de la République et des valeurs d’une société fraternelle qui en sont le fondement, notre pays a bénéficié d’un soutien appréciable de l’Etat français. Soit au plan bilatéral par l’échange de renseignements, la formation de soldats ou le soutien aux populations à travers des dons au Programme alimentaire mondial (PAM) et à la Croix rouge ; soit au plan multilatéral par le canal de l’Union européenne. Ça, c’est au niveau de la coopération entre Etats avec ce qu’elle comporte de formalisme et de distante froideur.
Quant à la cérémonie de lundi denier à la base aérienne 101, elle mettait en scène des hommes et des femmes qui partagent le quotidien de nombreux Camerounais dans leur besoin de sécurité, dans leur aspiration à vivre dans un pays stable et pacifique. Des atouts qui ont probablement pesé lourd dans leur choix de s’établir dans cette Afrique en miniature dont l’histoire est tributaire dans une large mesure de l’engagement méritoire de bien de citoyens français mus de manière désintéressée par les idéaux de liberté, d’égalité, de fraternité.
La déclassification des archives françaises par rapport à la guerre d’indépendance de notre pays permettra à coup sûr de dissiper un jour des zones d’ombre sur ce que le président François Hollande a qualifié lui-même lors de son récent séjour à Yaoundé comme ayant été « des épisodes extrêmement tourmentés et tragiques même ». Mais il est d’ores et déjà établi que des âmes de bonne volonté issues de la communauté française d’alors inspirèrent fortement les syndicalistes Camerounais de la première heure. Avant que ceux-ci, édifiés sur les combats à mener, se muent plus tard dans les revendications nationalistes. Avec les résultats qu’on sait…
Autant dire que les peuples du Cameroun et de la France, à travers des décennies de cheminement commun, ont su tisser, entretenir et préserver des liens indissolubles d’amitié, d’estime et de respect mutuels. Indépendamment des contingences politiques. Le « coup de cœur » des Français vivant au Cameroun s’inscrit dans cette dynamique soutendue par l’ouverture à l’autre, et l’attachement opiniâtre à la dignité humaine et la solidarité agissante entre les peuples. Des acquis qui doivent demeurer.