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Voici pourquoi le plan humanitaire de Paul Biya va échouer

Paul Biyaa2017 08 30t190314z 495710184 Rc1d07221cb0 Rtrmadp 3 Cameroon Politics 0 La crise anglophone dure et continue de faire des victimes.

Thu, 21 Jun 2018 Source: Ludovic Lado

Quand on est éthiquement limité, les bonnes intentions ne suffisent pas, et on construit sur du sable. Le problème fondamental du gouvernement camerounais, ce sont ses limites éthiques. Tout est calcul politique même l'humanitaire. La bêtise coûte cher, qu’elle soit individuelle ou collective. La facture est bien salée et ce n'est que le début. Au Cameroun, nous allons de bêtise en bêtise dans la crise anglophone. Si le gouvernement avait opté pour le dialogue dès le départ, on n’aurait pas besoin aujourd’hui de dépenser 13 milliards pour l’humanitaire. Un dialogue national bien organisé nous aurait couté au maximum un milliard. Mais le régime en place a opté pour la répression et nous voici dans un bourbier où nous font patauger les extrémistes des deux bords. On n’en est même pas encore sorti qu’on nous parle déjà du plan de reconstruction. Pourquoi est-ce une autre poudre jetée aux yeux des Camerounais comme, hier, la fameuse commission du bilinguisme ?

L’humanitaire, me disait encore récemment un interlocuteur avisé, se nourrit de la guerre et de la pauvreté. Le plan humanitaire gouvernemental du Cameroun chiffré à près de 13 milliards à la faiblesse d’ignorer la cause du mal pour se focaliser sur les effets. C’est comme un médecin qui préfère soigner le symptôme au lieu de s’attaquer à la racine du mal. 13 milliards pour panser les plaies d’une guerre sale et inutile qui est loin d’être finie. Comme aime à le répéter le sage philosophe camerounais Eboussi Boulaga, une société qui se ment à elle-même a choisi les ténèbres et ne peut pas évoluer. Nous sommes en plein dans une autre opération plus politique qu’humanitaire qui vise principalement à couper l’herbe au pied de l’humanitaire international. Le régime Biya, nous l’avons plusieurs fois dit, n’a pas les moyens de résoudre cette crise toute seule, à cause de ses limites éthiques. Il faut donc craindre que ce fameux plan humanitaire comme beaucoup d’autres tournants dans cette la gestion gouvernementale de cette crise ne soit qu’un autre coup d’épée dans l’eau.

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Comment parler déjà de reconstruction quand la guerre n’est pas finie, et surtout dans un contexte où les cibles ne sont pas seulement victimes des « terroristes », comme le document gouvernemental les appelle, mais aussi des méthodes surannées de guerre des forces gouvernementales. Le fameux plan omet justement de mentionner que l’une des causes principales de la crise humanitaire, des déplacements massifs des populations, c’est la répression gouvernementale qui a incendié plus d’une cinquantaine de village, selon les estimations de certaines organisations locales de droits de l’homme. Le pyromane peut-il se déguiser en sapeur-pompier ? Le plan prévoit une enveloppe de 500 000 FCFA pour l’aide à la reconstruction des habitations. On construit quel type de maison à 500 000 FCFA ?

Sans le dialogue national inclusif qui permettra d’aborder la cause de la crise qui est à l’origine de la crise humanitaire, le plan gouvernemental est une fuite en avant. Et même après le dialogue, il faut penser à la réconciliation. Une dimension négligée par ce plan est celui de la reconstruction des cœurs et de la relation sociale car les besoins dans un tel contexte ne sont pas uniquement matériels. Nos compatriotes victimes des extrémistes des deux bords sont atteints son seulement dans leur chair mais aussi dans leur esprit et le processus de la guérison prendra du temps.

Enfin, il faut craindre que les fameux treize milliards, une fois levés, ne soit détournés, car le fameux plan ne dit rien du dispositif de gestion de cet argent. Dans ce pays, on a vu détourner l’argent destiné à la lutte contre le SIDA, l’argent du coup de cœur pour les Lions Indomptables, l’argent de la visite du Pape…c’est une manne pour les vautours ! Bon appétit ! Encore une fois, le problème fondamental de ce régime, ce n’est pas la disponibilité de l'argent, mais ses limites éthiques.Et quand on est éthiquement limité, on construit sur du sable. Je refuse

Auteur: Ludovic Lado