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Manuel scolaire: pourquoi le circuit est grippé

Fri, 11 Sep 2015 Source: Josiane Tchakounte

Le circuit de production et de distribution du manuel scolaire démarre par la sélection des titres qui seront inscrits au programme. Une commission siège pour examiner les différents ouvrages proposés par différents éditeurs au terme d’un appel d’offres.

Après examen, la liste officielle des manuels scolaires est publiée. « Si le livre obtient 70% des notes, il sera retenu au programme officiel », confie un intervenant de la chaîne.

Techniquement, ce n’est qu’après la sortie de cette liste officielle que les éditeurs dont les titres ont été retenus lancent le processus de production de leurs manuels, notamment avec le concours des imprimeries. Les livres sont, par la suite, distribués dans les différentes librairies où les parents peuvent se les procurer.

Pour assurer la disponibilité du manuel scolaire dans les librairies à temps, c’est-à-dire avant et pendant la rentrée scolaire, le respect des délais est une donnée cruciale.

« La liste officielle des manuels inscrits au programme doit normalement sortir en février pour laisser le temps aux éditeurs de négocier avec les banques et les imprimeurs. Or, cette année, elle est sortie en mai, ce qui est déjà mieux que les années antérieures où elle arrivait carrément au mois de juin », explique Daniel Nadjiber, secrétaire général du Collectif national des libraires et papetiers du Cameroun (CNLPC).

C’est, en effet, le 6 mai 2015 que la liste officielle des manuels scolaires inscrits au programme de l’enseignement maternel et primaire pour le compte de l’année scolaire 2015-2016 a été publiée par le ministre de l’Education de base (Minedub). « Quand la liste est sortie, si l’éditeur est prêt financièrement et techniquement, à ce moment il passe la commande et d’une manière générale, 60 jours suffisent pour que le livre arrive au port de Douala », complète notre source.

Le port. Cette autre contrainte qu’il faut gérer. Parce que la majorité des manuels scolaires est imprimée à l’étranger. Une étape qui, si elle était supprimée, permettrait de gagner du temps. Ne plus parler du port suppose que les éditeurs impriment les manuels scolaires sur place, auprès des différentes imprimeries locales dont les plateaux techniques n’ont désormais plus grand-chose à envier aux imprimeurs étrangers.

Une option à étudier sérieusement puisqu’elle offre la possibilité aux éditeurs et autres importateurs de réduire les coûts de production et, par effet, le prix de revient du livre (fixé en fonction des charges de production) toujours inaccessible pour les parents d’élèves. Jusqu’à ce jour, le prix du livre scolaire considéré comme bien social est homologué par le ministère du Commerce, de concert avec les différents acteurs de la chaîne.

La cherté du manuel scolaire par les parents d’élèves reste décriée, bien qu’elle trouve son fondement selon certains analystes du secteur dans l’instabilité des livres qu’on retrouve au programme et la multitude des titres. Pour cette rentrée scolaire, le Minedub a retenu pour la classe de la SIL dans la discipline « Français : Lecture Méthode Syllabique », sept titres correspondant chacun à un éditeur différent.

Au total, ce sont 60 titres retenus toutes matières confondues dans le primaire pour la seule classe de SIL. Le problème ? L’éditeur doit produire en fonction de la demande, pour être sûr de vendre. Le choix des titres à utiliser dans tel ou tel autre établissement scolaire parmi les livres au programme ayant été laissé à la discrétion (compétence) du Conseil des maîtres, il faut attendre d’avoir la « liste définitive » de chaque école.

Car conformément aux textes, cette liste « dûment signée et cachetée par le chef d’établissement sera constituée d’un seul titre par matière parmi les cinq préalablement agréés par le Minedub (Cf. liste officielle des manuels scolaires: CT du 06 mai 2015) ». Pas de doute pour les spécialistes, il faut réduire le nombre de livres au programme ainsi que le nombre d’éditeurs. « Si on réduit à deux le nombre d’éditeurs, on réduirait de 50% le prix du livre scolaire », confiait un éditeur il y a quelques jours sur une chaîne de télévision.

D’après les textes, un titre inscrit au programme ne doit être remplacé qu’après trois ans. Dans ces conditions, les éditeurs ne peuvent pas passer de grandes commandes à l’impression qui garantiraient des coûts moins élevés et donc, des prix de revient plus souples.

Un problème se pose également au niveau de la distribution du manuel scolaire, une fois imprimé et livré à l’éditeur. « Le problème de pénurie du livre scolaire est dû au simple fait que certains éditeurs locaux (dont les ouvrages sont au programme), veulent le distribuer eux-mêmes. Or, ces derniers ne disposent même pas de ressources financières suffisantes pour imprimer leurs ouvrages en temps réel (seulement deux éditeurs sur six peuvent avoir cette capacité) », explique Dominique Le Boulc’h, Dg de Messapresse.

Autre donnée à intégrer désormais pour les parents : la politique commerciale des libraires. Ceux-ci passent leurs commandes en fonction de la liste des manuels scolaires arrêtées par les chefs des établissements basés à proximité.

« Le problème de multiplicité des titres rend difficile la gestion des stocks. Vous ne pouvez pas planifier car en achetant, vous n’êtes pas sûrs de vendre. C’est pourquoi on achète les livres inscrits dans les établissements de proximité. Maintenant, en fonction de la demande qu’on reçoit, on peut se faire approvisionner. C’est pourquoi lorsque le parent dépose sa liste, il doit revenir après 24 heures », explique Daniel Nadjiber.

Cela veut tout simplement dire que le parent basé à Santa Barbara et dont l’enfant fréquente au Collège de la Retraite, ne doit pas chercher le livre dans la librairie la plus proche de la maison. Sinon, patience…

Auteur: Josiane Tchakounte