Jean Pierre Békolo
Dans une tribune publiée sur sa page Facebook, le cinéaste camerounais Jean Pierre Békolo a publié ce mardi 3 mai une tribune dans laquelle il parle du phénomène de "manque de respect" devenu carrément un phénomène grave au Cameroun. "Le manque de respect est ressenti par les Camerounais comme une faute grave", écrit Békolo dans la tribune ci-dessous que la rédaction de CamerounWeb vous propose.
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"Une dispute entre ce qui semble être un oncle et son jeune neveu, comme d'habitude, les passants interviennent, un tribunal d'inconnus se met en place, on écoute la version de chacun et le verdict ne tarde pas à tomber, le jeune a tort, il a manqué de respect à son aîné. Chacun repart convaincu que le respect est une valeur en déclin parmi nous.
Combien de fois aujourd'hui êtes-vous accusé d'avoir manqué de respect à quelqu'un ? En fait, avant de vous manquer de respect, on vous prévient, on vous dit " je ne veux pas vous manquer de respect… ", c'est ceux qui abordent le respect par la défensive, on prend des précautions. Alors pourquoi la peur de manquer de respect à quelqu'un est-elle si importante ? D'où vient cette histoire de respect ? De nos vieilles traditions africaines de respect des aînés ? De l'administration post-coloniale du respect des autorités ?
De la religion avec le respect de Dieu ? De la culture du mariage avec le respect de son mari dans le couple ? Du lieu de service avec le respect de la hiérarchie et du patron ? Le respect est partout dans notre société, on vous le demande ici, on vous le donne là. Ailleurs, on se plaint qu'il n'y a pas assez de respect. Pourquoi les Camerounais ont-ils besoin de respect ? Est-ce une façon de rétablir l'ordre face au désordre de cette société camerounaise où tout le monde est devenu tout et où personne n'est plus rien aux yeux des autres ? Dans ce code pénal écrit nulle part, tous les Camerounais de toutes les couches sociales s'accordent à dire que le manque de respect est presque un crime qui mérite d'être puni.
"Il lui a manqué de respect !" C'est ce que les gens lancent comme raison pour ne pas intervenir lorsqu'ils voient une victime être punie pour avoir manqué de respect à quelqu'un.
Si le manque de respect est ressenti par les Camerounais comme une faute grave, n'est-ce pas parce que la vie elle-même leur manque déjà de respect ? Lorsque le crédit téléphonique se termine au milieu d'une conversation, le Camerounais dit que "mon crédit vient de me manquer de respect…
"En effet, il est difficile de nos jours de se faire respecter quand on a les poches vides. En d'autres termes, les Camerounais veulent être respectés parce qu'ils n'ont pas ces choses qui vous font respecter. Si vous demandez le respect, c'est parce que vous n'avez rien qui fait que les gens vous respectent. Le respect ne se demande pas, il s'impose. Et ces gens qui sont prêts à manquer de respect aux autres en commençant leurs phrases par "...sans vous manquer de respect", ce sont des gens grossiers qui n'ont aucun respect pour quoi que ce soit".
