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Affaire Mebe Ngo’o : situation compliquée pour la partie civile

L'audience se poursuit ce 31-8-2022

Mer., 31 Août 2022 Source: Franck ESSOMBA

Les protagonistes du procès contre l’ancien Ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense se sont retrouvés ce jour pour la suite de la cross-examination de l'accusé MBOUTOU ELLE Ghislain par les avocats de la partie civile. Ci-dessous l'échange in extenso entre les suscités et le Colonel MBOUTOU :

_La parole a été prise par Me ATANGANA AYISSI_

QUESTION : Il ressort de votre première audition devant ce tribunal qu’au moment des faits objet de cette procédure vous étiez Chef Secrétariat Militaire Adjoint au MINDEF. Pouvez-vous dire au tribunal quelle est la place du Secrétariat Militaire dans l’organigramme de ce Ministère ?

Réponse : Pour répondre à cette question je vais devoir me répéter et relire ce que j’avais déjà dit : _« le Secrétariat Militaire est en fait le Cabinet du Ministre, porte d’entrée et de sortie du Ministre et lien avec l’extérieur »_

Q : au cours de votre audition en date du 13 février 2019 à l’enquête, vous avez déclaré ce qui suit : « Le Ministre m’avait présenté à son bureau Mr FRANCHITTI qui travaillait déjà avec le Ministre avant mon arrivée et même quand il était DGSN ». Y avait-il avant vous quelqu’un qui s’occupait du suivi des marchés de FRANCHITTI qui comme vous le dites travaillait déjà avec le Ministre ?

R : je pense bien qu’il y’a un coaccusé qui est poursuivi ici avec moi pour le suivi des marchés entre 2010 et 2012 date à laquelle j’ai commencé le suivi de ces procédures

Q : Lors de votre interpellation en France, à la question de savoir si vous connaissez Mr MBANGUE vous avez répondu en ces termes : "Oui ! Je le connais, il est de la même région que moi, c’est lui qui s’occupait des marchés de MAGFORCE avant mon arrivé" S’agit-il de ce co-accusé dont vous parlez à cet instant ?

R : Mme la Présidente, je voulais faire une précision, en France j’ai été entendu seulement par les policiers, je n’ai vu le juge que pour notification de la mise en examen. Maintenant pour répondre, oui il s'agit de ce coaccusé !

Q : lors de son audition du 19 février 2019, Mr MBANGUE déclare qu’au moment d’être éloigné par le Ministre MEBE, vous avez dit que : « les affaires des Militaires ne s’encombrent pas des Civils »

A quels civils faisiez-vous allusion?

R : lors de la Cross-Examination de Mr MBANGUE devant ce Tribunal, j’avais sollicité de luu qu’il revienne sur ses déclarations me concernant. Il avait refusé d’y répondre, je ne peux donc pas répondre à des choses qui me sont attribuées et dans lesquelles je ne me reconnais pas.

Q : au cours de cette même audition, vous avez déclaré ce qui suit : « quand le besoin était exprimé par les Etats-majors, le Ministre me les cotait, je les centralisais et les envoyais aux fournisseurs, qui les traduisait en devis chiffré, je les présentais au Ministre qui mettait Accord ». L’accord du Ministre étant déjà acquis au fournisseur du fait de l’entregent de ce dernier, la mention accord sur les devis chiffrés pouvait encore porter sur quoi d’autre si ce n’est cette fois sur le prix y fixé par ce prestataire ?

R : je voudrais une précision car vous avez précédemment parlé de l’audition de Mr MBANGUE je ne me retrouve pas car j'ai été auditionné le 13 Février 2019 et non le 19 février.

Mme la Présidente, je ne saurais expliquer les instructions d’un MINDEF. Le document était marqué "DBE Accord" mon rôle était de le transmettre simplement.

Q : Interrogé sur la surfacturation des prix, Mr MEBE NGO’O, a reposé la responsabilité sur le Contrôleur Financier, pour avoir été dans la chaine de la commande publique au MINDEF, pouvez-vous dire au tribunal qui du Contrôleur Financier ou du Ministre était dans les marchés publiques l’autorité contractante et dont, en cette qualité, la signature engageait la dépense publique au profit du prestataire ?*

R : permettez-moi de le redire pour une énième fois, je ne suis pas un acteur de la commande publique et je ne l’ai jamais été.

Q : il ressort de la demande d’entraide judiciaire produite au dossier par votre diligence ce qui suit : « les auditions de FRANCHITTI Président de MAGFORCE, Elisabeth Charlon en charge de la facturation, Roger Levy chargé de la comptabilité et Catherine Meuer Président du directoire responsable Magforce, confirmaient des remises d’espèces aux responsables publics Africains ainsi que la rémunération systématique d’intermédiaires, coûts inclus dans la surfacturation des produits ». Pour avoir été inculpé dans cette procédure française, pouvez-vous dire au tribunal si ces pratiques et des remises d’espèces ainsi faites sur le plan Africain concernaient aussi les marchés de Magforce au Cameroun ?

R : 1- je ne vois pas en quoi je suis concerné dans cette question.

2- s’agissant de l’entraide judiciaire j’aurais voulu avoir les pages dont allusion est faite mais qu’à cela ne tienne, j’ai été interrogé par le Juge d’Instruction sur la base de l’entraide lors de mon audition du 16 avril 2020.

Q : par cette même demande d’entraide, les juges français ont commis Jean BETEA, juge d’instruction au tribunal de céans aux fins de : « procéder à l’audition en qualité de suspect, d'Edgard MEBE NGO’O et Maxime MBANGUE sur les faits objets de la présente information ». Pouvez-vous dire si les marges de 38% que Mr FRANCHITTI a déclaré avoir ajouté à toutes les factures, rentraient aussi dans le cadre de cette information ?

R : on parle de MEBE NGO’O et MBANGUE je ne sais pas où est le lien avec mou.

Q : le Ministre MEBE NGO’O vous ayant déjà placé même de fait dans la chaine des marchés au MINDEF, aviez-vous une raison légitime pour être passif à cette marge de 38% ?

R : Devant ce Tribunal j’ai dit ce que je faisais, en lien avec mes attributions, j’ai fourni des documents, les manuels de procédure. Il serait peut-être souhaitable qu’on me montre l’acte que j’ai posé en dehors de mes attributions.

Q : étant donné que le Ministre cotait les marchés à l’intention de FRANCHITTI, pouvez-vous dire au tribunal si ce dernier représentait aussi auprès du MINDEF outre MAGFORCE International, les Sociétés MAGFORCE Belgique, JOIN CHINA, T2M, et VANCO dont les marchés ont aussi été admis comme pièces à conviction ?

R : le Ministre me cotait les besoins des Etats-majors et non les devis de Magforce.

Permettez-moi de lire ce que j'ai dit lors de mon audition du 16 Octobre 2019 pour répondre à cette question, _"une fois qu'on envoyait les besoins, Magforce International nous renvoyait des devis chiffrés, ces devis étaient présentés soit au nom de Magforce International, soit au nom de Magforce Belgique, soit au nom de T2M, soit la société Vanko China. Il est arrivé quelques fois que les sociétés Marck et CXXS, Cogitel soient attributaires des marchés"_

Q : Interrogé en date du 13 février 2019 sur le marché Polytechnologies, vous avez dit : "le Ministre m’a fait appeler pour dire que j’appelle les Chefs d’états-majors centraux pour assister à l’audience qu’il allait accorder au Vice-président de Polytechnologies". Avez-vous pris part à cette audience ?

R : oui j’y ai pris part.

Q : en dehors du Vice-président de Polytechnologies que le Ministre vous avait dit recevoir en audience, y avait-il à cette réunion un autre responsable de la partie chinoise, si oui lequel ?

R : Il y avait une Dame qui était haut responsable d'Eximbank China.

Q : lors de son audition en date du 16/02/2019, le Ministre a déclaré : "le Chef de l’Etat l’avait instruit de recevoir en audience, l’officier général chinois et signer avec lui un Mémorandum d’entente ». Face aux déclarations divergentes tantôt le Vice-Président de Polytechnologies ou l’officier général chinois, qui a été reçu en audience ?*

R : l’audience en question concernait le Vice-Président de Polytechnologies, mais il me souvient que lors de cette audience, le Vice-Président s’était présenté comme étant un Officier Général retraité.

Q : le Vice-Président de Polytechnologies agissait-il en qualité d’officier représentant la République de Chine ou alors agissait-il comme simple représentant de la société Polytechnologies ?

R : comme je l’ai dit, l’audience concernait le Vice-Président de Polytechnologies et tous les documents qui ont suivi concernaient Polytechnologies

Q : le Ministre a déclaré avoir été instruit à la signature d’un MOU, en votre qualité de Secrétariat Militaire Adjoint, pouvez-vous dire si le Secrétariat Militaire a été associé à ce projet ?

R : le rôle du Secrétariat Militaire n’est pas d’élaborer les M.O.U

Q : en votre qualité d’officier de haut rang avez-vous eu une réaction particulière en constatant qu’au lieu de se référer, les instructions sensées constitués son support le MOU se soit plutôt référé à de précédents échanges ?

R : non

Q : au cours de l’audition de Mr le Ministre le 25/05/2021, il a dit : "le document a été préparé en quelques minutes, il a été signé et j’ai levé la séance". Pouvez-vous dire au tribunal, si c’est en ces quelques minutes de réunion que le montant de 296 milliards FCFA a été convenu par les parties signataires ou alors ce montant avait été calé bien avant la réunion par les signataires au cours des précédent entretiens et échanges techniques que ceux-ci rappellent en préambule à leur MOU ?

R : d’abord je pense que 300 millions d'euros font moins de 200 milliards de FCFA. Sinon je n'ai pas d’avis à donner sur ce projet qui je pense a fait l'objet de grands débats et de grande démonstration devant votre tribunal et dont les matériels, pour le militaire que je suis, ont fait la fierté et continuent de faire la fierté sur les différents théâtres d’opérations

Q : il a été dit devant ce tribunal que le MOU n’avait aucune valeur juridique et ne contraignait personne en rien. En l’absence de cette contrainte, ce MOU n’avait-il pas au moins sur vous de l’armée quelque chose du fait du visa règlementaire y apposé par le commandement militaire prescrivant de façon exacte les quantités d’hélico (06), et de patrouilleurs (04) à convenir avec la société Polytechnologies ?*

R : le sentiment du militaire que je suis, est celui de savoir que ce projet nous a apporté des engins blindés de protection au moment où nos éléments blindés allaient dans les V150 qui faisait la risée de notre armée.

Q : pourquoi avoir réduit les équipements majeurs ?

R : c'est quoi les équipements majeurs ? Puisque les blindés sont des équipements majeurs

Q : ne trouvez-vous pas paradoxale d’avoir requis l’apposition du visa règlementaire du Président de la République sur un MOU sans valeur juridique et non contraignant mais de vous abstenir par contre d’en retenir un pour le contrat commercial signé plus tard par Polytechnologies,

R : ce VOUS est mis pour qui ? Moi et qui ?

Q : avez-vous fait partie du voyage à PEKIN

R : oui. Je tiens à préciser que le Secrétariat Militaire assiste aux audiences et prend part aux missions du Ministre dans le cadre de ses missions statutaires de protocole

Q : pouvez-vous dire au tribunal si les officiels de la République de Chine agissaient es qualité et ont été cosignataires à ce contrat commercial ?

R : je peux juste dire que la délégation a été reçu au plus haut niveau avec des honneurs rendus au palais du peuple

Q : répondant au juge d’instruction de Paris à savoir quels étaient les raisons de sa présence en Chine, aux côtés de Mr MEBE, FRANCHITTI a fait une déclaration d'avoir été en Chine au même moment. Pour avoir fait partie de ce voyage avez-vous aussi été au courant de cette rencontre ?

R : Mme la Présidente, Honorables membres de la collégialité, pour répondre à cette question, Je tiens d’abord à marquer ma surprise quant à l’acharnement de la Partie Civile à ramener la procédure française ici. Par la suite, j’aimerais revenir sur cette déclaration de Me ATANGANA AYISSI à l’audience du 22 juillet 2022, faisant allusion à un article du « très sérieux journal d’Investigation français, Le Point » dans sa parution du 20 juillet 2017 en ces termes : _« le Colonel MBOUTOU flânait dans les rues de Montaigne lorsqu’il a été arrêté par la Police planquée non loin de l’hôtel la Tremoille »_ . Je tiens à préciser qu’il s’agissait d’un article en ligne du blog Le Point.Fr et dont aucune trace n’avait été retrouvée dans le journal français Le Point, à moins que Me ATANGANA AYISSI ne produise au tribunal la version complète éditée dudit journal avec l’article en question, ce qui me permettra d’ailleurs d’ester ce journal en justice. S’agissant des circonstances de mon interpellation, elle avait eu lieu au Majestic hôtel, sis au 30 rue la Pérouse dans le 16ème arrondissement de Paris et non pas loin de l'hôtel la Tremoille situé au 14 rue de la Tremoille dans le 8ème arrondissement de Paris non loin de l'avenue Montaigne. Près de 6 ans après avoir été rappelé de mon poste d’Attaché de Défense sur la base de rumeurs et 3 ans et demi après avoir été inculpé et placé en détention sur la base de rumeurs, je suis une fois de plus face aux rumeurs pour apporter la contradiction à mon examination-in-chief, en plus j’ai été baladé dans le projet POLYTECHNOLOGIES pour lequel l'ordonnance de renvoi ne m'a pas renvoyé devant vous.

_La parole a été passée à Me ABESSOLO, pour la suite de la cross-examination de la partie civile_

Q : Dans le cadre du traitement des marchés HCCA, les factures proforma font elles parties des pièces de la chaîne de la dépense publique ?

R : Je ne peux pas savoir car je ne suis pas dans la chaine de la dépense publique

Q : quel est le point de départ la chaine de dépense publics ?

R : Je vous ai donné le rôle de l’agent de liaison que j’étais dans le processus de passation des marchés

Q : lors de votre interrogatoire du 16 octobre 2019 ainsi que celle du 27 janvier 2020, vous affirmez pour ce qui est des prix "je m’assurais que les prix étaient conformes à la mercuriale pour les articles majeurs". est ce que l’agent de liaison avait pour attribution de s’imiscer dans l’offre du prestataire matérialisé par la facture proforma par une opération de vérification des prix

R : voici ce que j'ai dit _"pour ce qui est, je m’assurais que les prix étaient conformes à la mercuriale pour les articles majeurs, tenues et rangers. Je pense que l'établissement des marchés relevait de la DBE, qui se devait de vérifier la structure des prix et émettre tous les avis y afférents au Ministre"_

_Parole a été passée à Me Xaverie KANGUE, qui a sollicité un renvoi à demain pour interroger l'accusé sur les faits d'accusation contre lui devant la justice française._

La séance a été suspendue et renvoyée à demain 31 août 2022 pour la suite des débats

P.S : Après 2 ans de débats devant le Tribunal on pourrait se demander une fois de plus si ce procès au ministère de la défense valait la peine.

Auteur: Franck ESSOMBA