Les organes de presse basés dans la région de l’Ouest se mobilisent depuis lundi pour rencontrer le préfet du département du Noun, afin qu’il demande au sous-préfet de Koutaba d’abandonner la plainte pour diffamation qu’il veut déposer contre un citoyen qui l’a sévèrement critiqué dans le journal télévisé de DBS. Une grave violation de la liberté d’expression et de la démocratie.
Mama Nsounfon, communément appelé «Mao», journaliste correspondant de la télévision Equinoxe basé à Koutaba dans le département du Noun, région de l’Ouest, et Alexis Yamgoua journaliste à la télévision DBS, basé à Bafoussam et auteur du reportage à problème, rassemblent depuis le vendredi 30 Octobre les journalistes des autres organes de presse pour aller plaider la cause de Ousmanou Moundi, un habitant que le sous-préfet de Koutaba Ta Bertrand, menace de jeter en prison pour ses propos tenus contre lui dans un reportage diffusé au journal parlé de la télévision DBS du 19 Octobre.
‘«Nous avons rencontré le sous-préfet et le préfet. Un deuxième rendez-vous est prévu le jeudi 4 Novembre pour rencontrer à nouveau le préfet du département du Noun, Um Donatien, à Foumban. Déjà lors de nos précédents échanges, il nous avait annoncé qu’il fera tout pour apaiser les différentes parties, et empêcher les poursuites pénales annoncées», ont affirmé les journalistes.
Bataille par communiqués interposés
Le 25 Octobre, dans une sommation aux allures de demande d’explication, le sous-préfet de Koutaba indique que dans son édition du journal télévisé de 20h du 19 Octobre, la chaîne de télévision DBS a diffusé un reportage au cours duquel l’interviewé, Ousmanou Moundi a tenu des propos ci-après. «Je demande au gouvernement si le sous-préfet n’a pas de salaire, s’il travaille pour des miettes de riz ou bien s’il travaille le vrai travail qu’on lui a enseigné à l’école d’administration et de magistrature (Enam) ?». Des propos qualifiés «d’outrageux et diffamatoires» pour une personne qui occupe les fonctions administratives, par le sous-préfet de Koutaba.
Dans là même correspondance, il a donné 48h au concerné pour présenter les preuves de ses allégations dans ledit reportage télévisé relayé dans les réseaux sociaux. Pour lui, Ousmanou a voulu écorner son image auprès de sa hiérarchie, de l’opinion et des populations de Koutaba qu’il sert depuis deux ans Passé ce délai, il promettait d’engager contre l’intéressé des poursuites pénales conformément aux lois de la République.
Le 26 Octobre, dans sa lettre de réponse adressée au sous-préfet, Ousmane Moundi indique qu’il s’agit d’un problème de dispute autour d’une parcelle de terre qui oppose sa famille à celle du nommé Mbouombouo Yacouba. Le 2O Juillet 2021 le sous-préfet lui-même avait fait une descente sur les lieux et avait rassemblé les deux parties. Il avait demandé que lui soit présenté le titre foncier et le jugement d’hérédité du terrain, ce qui a été fait. Le sous-préfet avait alors demandé à la famille Mbouombouo de ne plus mettre les pieds dans la parcelle.
mais à sa grande surprise, la famille Yacouba a lynché ses cousins puis agressé ses propres enfants sans aucune réaction des autorités. «Le Jeudi 14 Octobre, Ismaël et Ibrahim, deux neveux revenant de la cueillette sur le terrain ont été blessés à coup de machette par la famille Mbouombouo Yacouba. Mais lors de sa descente sur les lieux, le vendredi 15 Octobre, le sous-préfet a traité notre famille de rebelle, ce qui a expliqué ma grande colère» a écrit Ousmanou.
Devant les caméras de nombreuses chaînes de télévision qui étaient descendues sur les lieux pour faire le reportage, Ousmanou s’était lâché en se demandant si «le sous-préfet fait vraiment le travail qu’il a appris à l’Enam parce que selon lui, «il agissait comme s’il était soudoyé par l’autre famille».
Soutien des journalistes
Une colère compréhensible et justifiée, selon les nombreux confrères journalistes. Dans le reportage diffusé à la télévision Equinoxe, plusieurs intervenants se posaient des questions sur la volte-face du sous-préfet. Surtout qu’Ousmanou avait. fourni tous les documents justificatifs réclamés par l’administration. Denis Kwebo le président du syndicat national des journalistes du Cameroun a un avis un peu plus ferme.
Pour lui, le sous-préfet n’est pas un tribunal ou une cour de justice. «Il n’a pas à sommer quelqu’un pour qu’il s’explique devant lui. D’ailleurs, c’est aux huissiers de faire des sommations. S’il veut porter plainte, qu’il le fasse, et Ousmanou devant le juge présentera les éléments de sa défense, pas devant lui», a conclu Denis Kwebo par ailleurs membre de la commission nationale des droits de l’homme et liberté.
Violation de la liberté d’expression
Dans toute société démocratique, tout détenteur du pouvoir doit accepter la critique. Menacer de poursuites judiciaires ceux qui critiquent les autorités publiques est une grave menace contre la liberté d’expression et contre la démocratie en général.
L’article 19 du pacte international relatif aux droits civils et politiques indique que «Nul ne peut être inquiété pour ses opinions. Toute personne a droit à la liberté d’expression».