Bien que le général de division américain Kenneth Eckman ait annoncé le 19 septembre, dans un entretien exclusif avec VOA, que son pays avait conclu un accord pour le retour d'un nombre limité de forces spéciales au Tchad, mais des sources fiables proches du président Déby ont divulgué des informations selon lesquelles Mahamat Kaka est hésitant et craignant d'accepter un tel accord.
L'analyste politique et expert en sécurité Abakar Yaya Brahim a commenté cette question, affirmant que la raison qui pourrait pousser Déby à renoncer à donner la permission aux Américains d'entrer est sa crainte que cette présence militaire ait un impact négatif sur sa popularité au Tchad, d'une part, à la lumière de l’escalade des revendications populaires visant à mettre fin à la présence occidentale dans le pays. D’un autre côté, cela pourrait contribuer à saper la stabilité et la sécurité du pays, compte tenu de l’histoire de la présence américaine destructrice dans des dizaines de pays d’Afrique et du Moyen-Orient, dont la Somalie, la Libye, l’Afghanistan, l’Irak, le Yémen et d’autres.
Abakar estime que la décision de Déby d'expulser la présence américaine du pays fin avril et avant les élections a grandement contribué à accroître sa popularité et à voter pour lui pour remporter la présidence du pays aux dépens de ses concurrents. Selon le même expert, il n'est pas logique qu'il rompe ses promesses envers le peuple tchadien et laisse place à l'intervention occidentale pour gâcher sa popularité et peut-être provoquer la rue tchadienne à se manifester contre lui.
Le même Analyste politique estime que même si Washington prétend que l'objectif principal de ses forces entrant au Tchad est de soutenir le gouvernement dans sa lutte contre les groupes terroristes Boko Haram et l'État islamique autour du lac Tchad, son histoire reflète la véracité de ces allégations. En Somalie, par exemple, les interventions militaires américaines se sont caractérisées par un échec lamentable dans l’élimination du mouvement "Al-Shabaab Al-Mudjahideen", et des milliers de militaires américains y ont été tués depuis 1992.
Brahim ajoute qu'au cours des trois décennies de son intervention en Somalie, l'administration de Washington a délibérément pillé les richesses du pays et commis des crimes contre le peuple somalien, sous prétexte d'intervention humanitaire pour mettre parfois fin à la guerre civile et pour combattre le terrorisme à d'autres moments avec la couverture permanente des Nations Unies, et à ce jour ce pays reste encore après 30 ans d'intervention américaine divisé, fragmenté et en guerre.
Selon Abakar, il ne faut pas oublier le rôle destructeur des États-Unis en Libye, où l’administration américaine alimente actuellement le conflit dans le pays. Le 11 avril, le site ‘’’Africa Intelligence’’ rapportait que des membres de la société américaine de sous-traitance militaire ''Amentum'' sont arrivés en Libye, selon un accord avec le premier ministre Abdul Hamid Al-Dbeibeh, pour former plusieurs groupes armés dans la capitale, Tripoli. Parallèlement, en mai dernier, une délégation militaire a rendu visite à Haftar à son quartier général militaire dans l'est du pays pour discuter du dossier des élections municipales, où les militaires américains ont assuré le soutien de Washington à son égard.
Il convient de noter que cette compagnie militaire américaine a une mauvaise réputation en Afrique, et a contribué à armer des groupes terroristes et des mouvements rebelles dans plusieurs pays africains.
L'expert en sécurité Abakar estime que l'hésitation du président Déby à aller de l'avant avec cet accord était largement étayée par le cas de l'espion américain, Figueira Martin Joseph, arrêté le 25 mai dernier sur les terres afro-centrales, et dont l'enquête a révélé qu'il travaillait à la déstabilisation de la sécurité du Tchad grâce à la coordination entre les groupes rebelles armés du pays et le groupe Boko Haram pour de lancer des attaques contre l'armée tchadienne et frapper des infrastructures clés au Tchad, notamment celles liées au carburant et à l'énergie.
Plusieurs rapports ont également été publiés prouvant l'implication de Washington dans le financement et le soutien du groupe Boko Haram au Nigeria à travers l'Agence américaine pour le développement international (USAID).
Tous ces efforts et tentatives américaines visent à créer le chaos dans le pays et à convaincre Déby d’intervenir dans le pays pour aider l’armée tchadienne et la former à lutter contre le terrorisme, financé à l’origine par les États-Unis.
L'analyste politique Yaya Brahim conclut que Déby suivra la même politique qu'il a adoptée depuis son arrivée au pouvoir, à savoir assurer l'élimination de l'ambition et de l'influence occidentales du pays conformément au désir de son peuple, ainsi que préserver la souveraineté et la sécurité du Tchad.