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Litige foncier à Elba ranch Esu : Lele Lafrique dans la fourmilière

Northwest Governor Lele Lafrique Adolphe Lele Lafrique

Wed, 6 Jan 2016 Source: carmer.be

Il est un peu plus de 11h, mardi 29 décembre 2015, lorsque le gouverneur de la région du Nord-Ouest, Adolphe Lele Lafrique Deben Tchoffo et son état-major arrivent sur le terrain litigieux d’Elba Ranch, annexe d’Esu. Le cheptel de l’homme présenté par le magazine Forbes comme le plus riche des pays francophones au sud du Sahara est bien visible.

Accompagné pour la circonstance du procureur général près la cour d’Appel du Nord-Ouest et même du commissaire du gouvernement auprès du tribunal militaire de la région, le gouverneur met le cap au camp de détachement de l’armée de terre situé à quelques encablures.

Certainement pour s’assurer que le dispositif sécuritaire est bien en place, non seulement pour assurer la sécurité du triangle national (cet endroit étant aussi non loin du bassin de production de Gayama (à un jet de pierre de la frontière avec le Nigéria) mais aussi et surtout pour intervenir au cas où survient une escarmouche entre les autochtones d’Esu et les allogènes (Fulani-Bororo) employés dans le ranch d’Alhaji Baba Danpoulo.

Pas d’inquiétude, le dispositif est bien en place. Retour à la résidence de fortune du richissime homme d’affaire, en plein cœur d’Elba ranch, annexe d’Esu. Passées les civilités d’usage, le gouverneur, sa suite et les parties en conflit entament une visite de la zone objet du conflit. C’est un vaste domaine à perte de vue. Difficile, voire impossible à parcourir à pied en une journée, prévient le sous-préfet Edward Egbe Forzah de Fungom.

Suffisant, pour le numéro I de la région de demander à Baba Danpoulo quelles sont les parties de son domaine empiétées par les populations d’Esu. Assisté d’un des gérants du Ranch camer.be, Baba Danpoulo à distance, pointe environ trois directions où les autochtones ont engagé la culture des produits vivriers et autres constructions. Interpellé, le Fon Kum-A-Chuo II Kawzu Albert Chi d’Esu acquiesce l’existence des constructions et cultures.

Toutefois, il remarque que depuis son accès au trône des Esu (en 2007 Ndlr), il a convié dans sa chefferie et ce à maintes reprises, Baba Danpoulo, afin qu’ils discutent des dimensions du ranch « il n’est jamais venu et j’ai été surpris qu’il porte plainte contre moi et la Justice m’a condamné par contumace en m’interdisant de mettre les pieds dans le domaine (ranch Ndlr) » a laissé entendre le Fon. Des propos qui ont mis l’homme d’affaire dans tous ses états. « Je suis ici depuis 31 ans, je vais quitter et te laisser ces terres.» réplique Baba Danpoulo.

Et le Fon de rétorquer « non Alhaji, tu es mon fils, je ne chasse personne. Je t’ai invité afin que tu me présentes tes limites ». Percevant l’imminence d’une escalade verbale, le gouverneur va mettre fin à ces éclats de voix en public « en tant qu’auxiliaire de l’administration, Sa Majesté, c’est toi qui devais montrer les limites de ton territoire » précise Adolphe Lele Lafrique Deben Tchoffo.

Festin déjoué

Le numéro I de la région déjoue les parties en conflit qui avaient préparé un festin dans leur fief respectif et met le cap sur Wum (chef-lieu du département) en terrain neutre. Un signal qui montre qu’il n’est pas en villégiature au cours duquel il peut se permettre une partie de plaisir mais en mission commandée. Surtout qu’il a été indexé par le richissime homme d’affaire dans une correspondance au chef de l’Etat avec ampliation au Pm, d’être de mèche avec les populations d’Esu pour lui arracher sa propriété. Il a ainsi convié les parties en conflit de le suivre en terrain neutre à Wum.

Ici, le patron du Nord-Ouest, avec à ses côtés le préfet de la Menchum, Emvoutou Bita Benoît William, le procureur général, le magistrat Taminang et les deux parties en conflit se sont retirés à huis-clos pour plus d’une heure de conciliabules dans les bureaux du préfet. Puis, il a tenu une réunion élargie dans la salle de conférence en présence des proches collaborateurs des deux parties, mais loin des regards des camera et entendement des hommes de médias.

Au terme des échanges, Adolphe Lele Lafrique Deben Tchoffo s’est confié à la presse « nous avons fait le tour, il faudrait rappeler qu’il s’agit d’une dépendance du domaine national qui fait l’objet du conflit qui nous amène ici. Au terme de la visite de terrain, nous avons eu une séance de travail restreinte avec les parties prenantes, à l’issue de laquelle j’ai présidé une séance plus élargie, au cours de laquelle les résolutions et recommandations auxquelles nous sommes parvenus ont été rendues publiques à l’intention non seulement des parties mais également des différentes administrations, élites et forces vives présentes ».

Retrait des plaintes au tribunal

Pour le patron de la région du Nord-Ouest « il faut simplement dire que les cas pendants devant les tribunaux opposant les parties entre-elles, elles ont décidé de les retirer. Qu’il s’agisse de la plainte introduite par Elba Ranch contre le Fon d’Esu et certaines de ses populations, qu’il s’agisse de la plainte introduite par le Fon et certaines de ses population contre Alahji Danpoulo ; ces cas ont été retirées. Le procureur général qui nous accompagnait a été le facilitateur par rapport à cette démarche ; nous nous en réjouissons comme nous la saluons ». A en croire les riverains, il se pose ici un problème environnemental, notamment la pollution de la source d’eau par les bœufs qui s’y abreuvent de temps en temps.

«S’agissant des problèmes environnementaux soulevés par les populations d’Esu à travers le Fon, nous avons décidé de commissionner les responsables de l’environnement et de la faune pour mener une étude d’impact environnemental par rapport à toute cette problématique afin de donner des résolutions et recommandations qui seront implémentées non seulement par les autorités locales mais également par les parties», a affirmé le gouverneur de la région.

Toujours est-il que le nœud du différend porte sur l’espace que couvre le ranch. Les populations d’Esu estime à 10 mille hectares soit environ 75% de leur terre cultivable « occupée » par l’homme le plus riche du Cameroun et de l’Afrique francophone au sud du Sahara.

Elles citent entre autres les terres des zones Iwo, Kedzong, Sangwa, Mbie, Wundele, Malo, Melang et Ebisai. D’autres sources parlent de 5 mille hectares mais au service des domaines, du cadastre et des affaires foncières l’on évoque une superficie de 1800 ha, objet de la concession d’exploitation accordée depuis 1986 par l’Etat à l’homme d’affaire. La lettre du préfet d’alors serait vague sur la dimension, affirme une source proche du dossier.

A en croire certaines indiscrétions, Baba Danpoulo avait offert à l’époque, un véhicule et la rondelette somme de 5 millions au feu Fon (père de l’actuel Fon) d’Esu pour exploiter ce terrain. Pour le Fon actuel, sa majesté Kum-A-Chuo II Kawzu Albert Chi, sa population a augmenté et il se pose un problème d’espace.

D’où l’urgence de réviser l’accord passé entre son feu père et Baba Danpoulo afin de concéder une des parcelles pour accommoder la population sans cesse croissance. « La population implore l’indulgence de Alhaji Baba Danpoulo afin qu’il leur accorde une parcelle pour s’y implanter » renseigne le député Ngong Larry Hills de la Menchum.

Commission consultative

Et le gouverneur Adolphe Lele Lafrique Deben Tchoffo de trancher la poire en deux « s’agissant du problème crucial, le problème foncier qui est l’enjeu majeur de la contradiction, conformément aux lois et règlements de la République, nous avons instruit le préfet sur les hautes instructions du gouvernement de mettre en place les mécanismes administratifs devant statuer sur le problème et rendre publiques dans les meilleurs délais possibles ses conclusions. Il s’agit selon le cas (c’est le préfet qui est maître de cette procédure) de la commission consultative, la commission chargée du domaine national pour obtenir des concessions. Comme je l’ai dit, il s’agit du domaine national, personne n’a un titre foncier là-dessus, bien qu’Elba Ranch ait des investissements que nous avons pu voir sur le terrain.

Il s’agit maintenant que l’administration prenne ses responsabilités pour créer les conditions idoines et élaborer les procédures permettant de régler le conflit qui oppose les parties à cet endroit».

Le patron de la région a mis en garde les deux parties contre toute résurgence d’escarmouche « il est clair qu’en attendant que nous y arrivions, les parties ont résolu de mettre tout en œuvre pour qu’aucun incident n’attire plus négativement l’attention des pouvoirs publics dans cette localité » a-t-il lâché.

Source: carmer.be