Les jeunes sont aujourd'hui invités à une «révolution des mentalités», pour accéder à l?économie numérique. Au Cameroun, quel est le pourcentage de jeune ayant droit aux réseaux sociaux ? 4% seulement. Si jeunesse pouvait !
I- L'intégration sociale des jeunes pauvres
La solidarité est une réaction spontanée de celui qui reconnait la fonction sociale de la propriété et de la destination universelle des biens, même numérique. La possession des biens se justifie pour les accroitre, de manière à ce qu'ils servent mieux le bien commun. C'est pourquoi la solidarité doit être vécue comme la décision de rendre au pauvre ce qui lui revient. Mal interprété, on peut faire des erreurs de compréhension du chef de l'Etat. Paul BIYA est-il entrain de mettre sur le tableau du développement : d'un côté, les pauvres vers l'agriculture ; et de l'autre côté les riches, héritiers du patrimoine numérique.
Nous devons être conscients de la réalité de la majorité des jeunes africains d'aujourd'hui. Se nourrir, se loger, se soigner, se vêtir et s'instruire ; voilà les défis quotidiens du jeune camerounais. La sphère numérique reste la pure chimère à laquelle à laquelle il faut accéder grâce au vol et à la violence.
Au Cameroun, on agresse encore les citoyens, pour obtenir les téléphones ; on arrache les sacs aux femmes aisées dans l'espoir d'y trouver un téléphone à grande valeur, qu'on pourrait revendre à 5 000frs cfa.
L'ampleur des défis provoque, par le nombre de jeunes pauvres dont la misère explose nous oblige à revenir à la racine des déséquilibres qui perturbent nos structures d'intégration sociale.
Tous les jeunes, riches et pauvres, réclament l'intégration à l?économie numérique. Mais, ce domaine, bien que séduisant, demeure dangereux et exigent une certaine éducation. Quels moyens préconise-t-on ? L'économie numérique est banderole intéressante, mais les jeunes sauront-ils en faire bon usage ? Les jeunes y auront-ils facilement accès ? Si jeunesse savait ! Si jeunesse pouvait !!
L'émergence du paradigme numérique au paradis de la misère est une véritable épée de Damoclès.
Dans le tournant de l'histoire africaine où les visages et les mécanismes de la pauvreté se renouvellent, le lien véritable d'une réflexion sur les conditions d'émergence s'opère et s'évalue à partir des groupes sociaux démunis et précarisés.
II- L'agriculture : passe ou impasse ?
Sans aucune prétention à critiquer « l'impensé des discours » qui structurent la réflexion sur le passage de l'Afrique à la modernité économique, il est important de souligner la peur qui anime les jeunes agriculteurs d'aujourd'hui et de demain.
Il suffit de compter le nombre de grumiers chargés par heure, sur l'axe lourd Yaoundé- Douala, pour comprendre que les forêts denses équatoriales sont entrées définitivement dans une phase de réchauffement qui conduit à la désertification du continent.
En effet, la déforestation, en appauvrissant les sols, aridifie les climats locaux et permet à l'empire des sables de s'étendre. En réduisant ou en supprimant sauvagement les forêts, permet-on aux jeunes de croire à l'agriculture ? « La terre ne trahit jamais », dit-on. Mais l'homme, lui, est traître depuis toujours.
III-Les masques du discours
Devant les exigences du Cameroun émergent, les jeunes sont perdus face à la discontinuité des discours.
Le 11février 2015, le « NGOMNA » promettait des emplois par milliers. A quand le bilan ? Le 11 février 2016, le binôme « économie réelle, économie numérique » est brandi, avec les corollaires d'agriculture et du numérique. Le concept d'émergence semble échapper continuellement à toute mis à l'épreuve et à toute notions de bilan pragmatiques.
Père Antoine ELA,
Chercheur en éthique environnementale
Université de Douala.