Adolphe Moudiki, né le 10 décembre 1938, est un grand patron camerounais et directeur de la SNH (Société nationale des hydrocarbures). Magistrat de formation, Adolphe Moudiki intègre le ministère de la Justice en 1972 avant d’être nommé en 1975 conseiller technique puis secrétaire général du cabinet du Premier ministre Paul Biya, qu’il ne quittera quasiment plus. En 1982, il le suit à la présidence, où il occupe brièvement un poste de conseiller technique puis la direction du cabinet civil en 1988. Dans l’intervalle, il devient directeur général de la Régie des chemins de fer du Cameroun (Régifercam). Il est ensuite nommé ministre de la Justice et le restera jusqu’en 1991. Mais c’est en 1993 que vient la véritable promotion?: il prend les rênes de la SNH, en tant qu’administrateur directeur général, pour ne plus les lâcher.
Bon vivant, ce Douala issu de la petite bourgeoisie de Yaoundé est devenu l’un des plus puissants personnages de l’État. Jouant de sa proximité avec le président, avec qui il a passé nombre de ses vacances, il demeure son plus fidèle ami. Et sa femme, Nathalie Engamba Ada, est une intime de la première dame, Chantal Biya, qu’elle conseille au sein de sa fondation. Les anciens partenaires de golf se téléphonent encore très régulièrement, même s’ils ne se voient plus que très peu.
Entre Adolphe Moudiki et le chef de l’État, la complicité n’est pas feinte. Les deux hommes, qui se sont connus sur les bancs du lycée Leclerc de Yaoundé et ont longtemps joué au tennis ensemble ainsi qu’au golf, accompagnés de Jean-Gaston Noah, ont grimpé de concert les échelons du pouvoir.
Plus affaibli par l’âge que Paul Biya, Adolphe Moudiki a certes demandé à plusieurs reprises à prendre sa retraite, mais le chef de l’État a catégoriquement refusé, estimant qu’il ne pouvait faire confiance à aucune autre personne dans la gestion de la SNH. Et pour cause, c’est notamment Moudiki qui a accordé en 2001 au Trésor public l’avance de 31 millions de dollars – dont 27 millions auraient été détournés – nécessaire à l’achat de l’avion présidentiel Albatros.
Depuis, l’affaire a fait son lot de victimes (Marafa Hamidou Yaya, Jean-Marie Atangana Mebara, Jérôme Mendouga, décédé en détention, et Yves Michel Fotso), mais le patron de la SNH n’a rien perdu de son influence. S’il déserte la plupart du temps son bureau et délègue beaucoup de dossiers à ses deux directeurs financiers et commerciaux, il conserve les clés de la « tirelire » de l’État, faisant et défaisant les carrières dans le domaine des hydrocarbures, où aucun directeur ou ministre ne saurait s’opposer à lui.