Un mandat de dépôt a été émis pour Jean-Pierre Amougou Belinga, suspect dans l'affaire Martinez Zogo. L'homme d'affaires est accusé de « complicité de torture par aide », ce qui laisse supposer que les assassins du journaliste sont différents de ceux qui l'ont torturé. L'avocat Me Christian Bomo Ntimbane explique bien ce côté de la chose qui n'est pas clair pour nombre de Camerounais.
Culture juridique : Précision importante sur l'infraction de torture ayant entraîné la mort dans le cadre de l'affaire Martinez Zogo
Certains commentaires relativement à l'inculpation pour faits de torture des personnes mises sous mandat de détention provisoire, dans le cadre de l'affaire du meurtre du journaliste Martinez Zogo, laissent supposer qu'elles ne seraient donc pas les auteurs de la mort de Martinez Zogo parce qu'elles ne sont pas poursuivies pour assassinat.
Tout en rappelant que les personnes inculpées sont toujours présumées innocentes, Il faut néanmoins faire la précision suivante : lorsqu'une personne cause la mort à autrui à la suite d'actes de torture, c'est l'article 277-3 du Code pénal sur la torture qui s'applique et non pas l'article 276 du Code pénal sur l'assassinat.
C'est le principe de la règle dite Specialia Generalibus Derogeant qui voudrait qu'une qualification spéciale s'applique en priorité à une autre qualification possible mais générale.
En d'autres termes, l'assassinat est considéré comme une qualification générale tandis que la mort survenue à la suite des tortures est spéciale. Car elle exprime exactement et de manière spécifique le genre de mort causé à Martinez Zogo. Son corps présente des signes d'actes de torture et de violence.
Ainsi l'inculpation de torture ayant entraîné la mort retenue par le juge d'instruction dans son ordonnance à fin d'informer, nous paraît conforme au droit. Plus simplement, il est dit que les personnes inculpées seront poursuivies pour avoir supposément donné la mort à Martinez Zogo à la suite d'actes de torture.
Bien évidemment la peine prévue est lourde. Les personnes poursuivies encourent la condamnation à vie. Néanmoins, il faudrait rappeler une fois de plus qu'elles sont toujours présumées innocentes jusqu'à ce qu'elles soient définitivement condamnées.
Voici l'article du code pénal sur l'infraction de torture ayant donné la mort : Article 277-3 du Code pénal camerounais : Torture
« (1) Est puni de l'emprisonnement à vie, celui qui, par la torture, cause involontairement la mort d'autrui...
(5) Pour l'application du présent article : Le terme "torture" désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques, mentales ou morales, sont intentionnellement infligées à une personne, par un fonctionnaire ou toute autre personne, agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite, aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis, ou est soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination, quelle qu'elle soit ;
Le terme "torture" ainsi défini ne s'applique pas à la douleur ou aux souffrances résultant de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles ;
(6) Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, qu'il s'agisse de l'état de guerre ou de menace de guerre, d'instabilité politique intérieure ou de tout autre état d'exception ne peut être invoqué pour justifier la torture ;
(7) L'ordre d'un supérieur ou d'une autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture.
(8) Les conditions prévues à l'alinéa 1 de l'article 10 du présent Code ne sont pas applicables à la torture.