Au Cameroun, le budget actuel de la santé est de 174 milliards Fcfa. Mais la conséquence directe de ce fait est que des ménages paient la note salée des soins de santé et croulent sous le poids des factures.
Suffisant donc pour certains candidats de penser à la mise sur pied des mécanismes pour alléger les ménages. Cabral Libii, candidat investi par le parti Univers, et Akere Muna candidat du Front populaire pour le développement (FPD), ont pour cela, pensé entre autres, à un système d’assurance maladie financée à hauteur de 400 milliards Fcfa pour le premier et à une assurance maladie universelle pour le dernier.
Sauf qu’«Au stade où le Cameroun se situe actuellement, aller vers l’assurance maladie universelle (ou la couverture santé universelle) est inéluctable, car les partenaires nationaux et internationaux encouragent l’État dans ce sens. Seulement, la réelle difficulté est le coût. Qui va financer ?», analyse un spécialiste de santé publique sous anonymat. S’agissant de la proposition de Cabral Libii, «En réalité, les 400 milliards indiqués représentent ce que les ménages dépensent en santé de leur poche (paiements directs des soins de santé). Soit 70 % des dépenses de santé nationales (selon les résultats de l’enquête sur les comptes nationaux de santé en 2012).
Ce que les ménages dépensent ne signifie pas que cela suffit pour leur prise en charge optimale. Une étude récente du Gouvernement indique qu’il ne faut pas moins de 1300 milliards (environ 1/4 du budget de l’État) pour une prise en charge complète des populations. Sauf à penser que dans le programme de ce candidat, l’Etat va combler le gap ou alors le système de santé sera restructuré, pour assurer une équité dans l’accès aux soins peu importe là, où on se trouve au Cameroun». Pour notre spécialiste de santé publique, «la réalité est tout autre.
Il faut pour y arriver, une conjonction d’action sur l’ensemble des piliers du système de santé (Prestation de services, Personnel de santé, système d’information, produits médicaux — vaccins — technologies, Financement, Leadership-gouvernance). Sur le Personnel de santé par exemple, le gap est immense et ce candidat a annoncé des actions dans ce sens notamment des recrutements prévus dans la fonction publique de plusieurs milliers de personnels de santé par an».
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«Tendance lourde»
Le concept d’assurance maladie universelle défendu par le candidat Akéré «ou de mécanismes de partage du risque maladie au sein de l’ensemble de la population» est jugé comme étant «est une tendance lourde pour l’ensemble des pays qui souhaite se développer», soutient notre spécialiste. Et celui-ci de poursuivre : «C’est dire que comme le précédent candidat, ce dernier surfe sur cette vague. La difficulté ici étant sa mise et surtout la capacité à collecter les contributions des populations de divers milieux professionnels (salariés (État et privé), Informel, Indigents) avec l’Informel qui représentent la portion la plus importante. Ici, nous n’avons pas de chiffres donc difficile de se prononcer sur la faisabilité.
Mais une chose est sûre, la santé à un coût très important et même dans les pays dits développés, c’est une couverture qui reste déficitaire et pour laquelle l’État supporte une bonne partie des coûts».
L’expert reconnait néanmoins que la structuration des soins de santé primaire avec la mise en place d’un système de référencement/contre référencement efficace entre les différents niveaux de la pyramide sanitaire proposée par le candidat Akere est «un problème réel. En effet, l’inégale répartition de la carte sanitaire ne permet pas aux populations de toujours bénéficier des soins de qualité partout ioù elles se trouvent, même si par ailleurs l’État a fait d’énormes efforts ces dernières années pour la construction de plusieurs hôpitaux, l’absence de spécialisation crée des zones où il y “a beaucoup d’hôpitaux et des zones où il y “en a très peu voire pas du tout».
Ce dernier soutient que «Le renforcement du système de santé est très important, mais ne faudrait-il pas dans un premier temps résoudre les problèmes de désert médical et de mise à niveau des structures existantes (personnels, équipements, etc.), de spécialiser certains hôpitaux et d’établir des partenariats sérieux entre l’État et les opérateurs privés de santé ?».
Quoi qu’il en soit, «Dans un cas comme dans l’autre, les populations attendent un hôpital humanisé qui les comprend, qui les accompagne sans les accabler, la santé a un coût indéniable et il faut le dire et trouver comment la financer sans entamer les revenus des populations, cela passe par un mécanisme équitable où tout le monde contribue», conclu le spécialiste de santé publique.