Le réseau des Journalistes sans frontières s'est prononcé sur le cas de l'assassinat de Martinez Zogo ce week-end. Il en a appelé aux autorités camerounaises afin de faire toute la lumière sur l’assassinat de Martinez Zogo et à protéger les journalistes.
C’est un grave coup porté à la démocratie et à la liberté de la presse. Après son enlèvement brutal, son corps a été retrouvé sans vie et portant des traces de sévices. Tout indique qu’il s’agit d’un meurtre. Cette exaction commise contre un journaliste qui n’a fait que son travail ne doit pas rester impunie. Nous appelons les autorités camerounaises à mener jusqu’au bout et de manière indépendante l’enquête ouverte, et à mettre un terme au climat de violence pour les professionnels des médias dans le pays. Les journalistes doivent pouvoir travailler en sécurité et sans risque de représailles et être placés sous protection quand cela s’avère nécessaire.
Le corps du journaliste Martinez Zogo a été retrouvé le 22 janvier 2023 dans le village d’Ebogo, à une vingtaine de kilomètres de Yaoundé, la capitale camerounaise, quelques jours après son enlèvement le 17 janvier 2022. Sa famille et ses collègues ont fait état d’un “corps nu entré en état de décomposition”. Selon les sources de RSF, son corps a été gravement mutilé et a été retrouvé nu, avec ses vêtements éparpillés dans un rayon de cent mètres.
Le corps du journaliste a été transporté et déposé à la morgue de l’hôpital central de Yaoundé. Si les résultats de l’autopsie ne sont pas encore publiés, un communiqué du gouvernement fait état d’un corps qui “a visiblement subi d’importants sévices”. Pour le moment, ni le chef de la police ni le procureur ne se sont exprimés officiellement.
Le Syndicat national des journalistes du Cameroun a dénoncé dans un communiqué “un assassinat odieux aux conséquences qui restreignent encore plus la liberté et la sécurité au Cameroun”.
Directeur de la radio privée Amplitude FM et animateur de l’émission “Embouteillages”, Martinez Zogo traitait régulièrement d’affaires de corruption impliquant des personnalités. Il avait notamment récemment abordé à l’antenne des cas de détournements de fonds supposés mettant en cause Jean-Pierre Amougou Belinga, un riche propriétaire de médias supposé proche du ministre des Finances du Cameroun, Louis-Paul Motaze.
Il s’agit du deuxième décès de journaliste dans des conditions troubles en moins de deux ans au Cameroun. En 2020, Samuel Wazizi est mort en détention après avoir été accusé de “terrorisme” par les autorités.
La nécessité d’une protection policière
La sécurité des journalistes est un réel problème au Cameroun. Le 9 mars 2022, le reporter de CamerounWeb, critique du pouvoir, Paul Chouta avait été enlevé par plusieurs hommes non identifiés dans une voiture puis violemment agressé avant d’être laissé pour mort sur le bord de la route. Deux jours auparavant, le journaliste avait publié une photo sur Facebook représentant l’actuel ministre des Finances et Jean-Pierre Amougou Belinga. Le journaliste, qui depuis ne sort plus seul, avait déposé plainte auprès du tribunal de grande instance de Yaoundé, qui n’a pas encore apporté de résultats.
Alors qu’il se rendait à la morgue pour identifier le corps de son confrère le 22 janvier, il affirme avoir été suivi par un véhicule noir non immatriculé, et a partagé dans un post Facebook sa peur d’être la “prochaine victime”. Le journaliste devrait bénéficier d’une protection policière dans le contexte actuel.