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De Zongo à Zogo…les chevaliers de la plume dans l’œil du cyclone

Hommage à Martinez Zogo

Fri, 27 Jan 2023 Source: Le Messager

Lâchement assassiné en 1998 dans l’exercice de sa profession et son combat pour le triomphe de la vérité, pour la défense de la liberté de la presse et pour l’émergence d’un journalisme indépendant et crédible, particulièrement en Afrique, l’histoire du journaliste burkinabè, 25 ans plus tard, fait école.

Né à Koudougou, Norbert Zongo avait entamé une carrière d’enseignant dans les années 1970 avant de bifurquer durant la période sankariste vers le journalisme. Moins d’une décennie plus tard, en 1993, il fondait à Ouagadougou son propre journal, dénonçant les régimes africains autoritaires et corrompus, révélant de sombres affaires impliquant des proches de Blaise Compaoré. Il condamne aussi la politique de « rectification » appliquée après la Révolution burkinabè et l’assassinat de Thomas Sankara, en 1987. Critique, intègre et indépendant, l’hebdomadaire acquiert rapidement une grande renommée au Faso. Tirant chaque semaine à plus de 15 000 exemplaires, c’est alors le journal le plus lu du pays. Mais de plus en plus connu et apprécié pour ses enquêtes, l’hebdo devient aussi une source de gêne pour l’entourage de Compaoré. De fait, l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons semble lié à une enquête, entamée depuis presque un an. En 1998 le journaliste – qui écrivait sous le pseudonyme de « Henri Segbo » – travaille sur l’incarcération arbitraire de David Ouedraogo au Conseil de l’Entente, une caserne militaire. Le jeune homme, exchauffeur personnel de François Compaoré (le frère cadet du président Ndlr), avait été accusé de vol à l’encontre de Salah Compaoré, la femme de ce dernier. Le 13 janvier 1998, Norbert Zongo publie dans L’Indépendant : « Nous ne cherchons pas à savoir s’il y a eu un vol. (…) Ce qui nous préoccupe, c’est l’incarcération des suspects au Conseil. (…) Nous sommes dans un État de droit paraît-t-il. (…) Où a-t-on gardé les présumés coupables ? ». Cinq jours plus tard, le 18 janvier, David Ouedraogo décède dans les locaux de l’infirmerie de la présidence burkinabè, officiellement « de sa maladie », selon le médecin-chef présent.

Tortures

Pour le journaliste, l’affaire est trop trouble pour qu’il s’agisse d’une mort naturelle. Le chauffeur du frère du chef de l’État ne serait pas décédé des suites d’une maladie, mais à cause de tortures infligées par des hommes du Régiment de la Sécurité présidentielle (Rsp). Quoi qu’il en soit, la mort de Zongo déclenche aussitôt une mobilisation sans précédent au Faso. Les membres de la société civile – des étudiants notamment – organisent manifestations et grèves dans les jours qui suivent. C’est la première fois que le régime de Blaise vacille : sous la pression populaire, le gouvernement crée une Commission d’enquête indépendante (Cei) censée faire la lumière sur le quadruple assassinat. Elle désignera plusieurs « suspects sérieux », membres du Rsp, dont notamment le chef de ce dernier, Gilbert Diendéré. Un seul militaire sera inculpé en 2001, pour assassinat et incendie volontaire : l’adjudant Marcel Kafando. Mais en 2006, le militaire bénéficiera d’un non-lieu après la rétractation de l’un des témoins. Après enquête, Reporters Sans Frontières affirme en 2006 que le rapport de la CEI fut purgé d’éléments accusant François Compaoré. La Commission désignait aussi six « suspects sérieux» : l’adjudant Marcel Kafando (décédé), Edmond Koama, Ousseni Yaro (décédé), Wempasba Nacoulma, Christophe Kombassere et Banagoulo Yaro. Puis en 2014, c’est au tour de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples de mettre en évidence les zones d’ombres de l’instruction.

Source: Le Messager
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