En plein direct du 20 mai, la CRTV scelle le sort de Maurice Kamto et du MRC, boulevard pour la réélection de Paul Biya

Kamto Et Biya .png Image illustrative

Tue, 20 May 2025 Source: www.camerounweb.com

En marge des célébrations de la fête nationale, le débat sur le "mandat impératif" s'intensifie dans la sphère politique camerounaise, avec des prises de position qui semblent vouloir trancher définitivement la question de l'éligibilité du MRC à la prochaine élection présidentielle.

C'est en direct sur la chaîne nationale, lors de la retransmission du défilé du 20 mai, qu'Aimé Robert Bihina, journaliste présentateur à la CRTV, a abordé frontalement la question qui agite la classe politique depuis des semaines.

"Seuls 19 partis politiques ont des élus au Cameroun sur 369. Alors les regards vont être rivés dans les prochaines semaines sur ces 19 partis politiques, parce que seuls ces 19 partis politiques qui ont des élus pourront investir un candidat à l'élection présidentielle selon l'esprit du code électoral", a-t-il déclaré avec assurance.

Et d'ajouter, dans ce qui semble être une allusion à peine voilée au MRC et à Maurice Kamto : "Cette liste des 19 partis politiques est fermée et ne sera modifiée que lors des prochaines élections locales en 2026. Alors, faire d'autres contorsions juridiques relève de la prestidigitation politique."

Cette déclaration vise clairement la situation du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), qui avait boycotté les élections législatives et municipales de 2020, se privant ainsi de représentation parlementaire et dans les collectivités territoriales décentralisées.

Pour contourner cet obstacle à une candidature de Maurice Kamto à la présidentielle d'octobre 2025, le MRC aurait, selon plusieurs sources, débauché des élus d'autres formations politiques pour les rattacher à son étiquette - une stratégie qui soulève la question épineuse du mandat impératif.

Dans ce contexte tendu, l'intervention du Pr Jean Calvin Abah Oyono, constitutionnaliste respecté, a jeté un pavé dans la mare. Dans une récente publication, il défend une interprétation favorable à la candidature de Maurice Kamto, en s'appuyant sur une lecture stricte de la Constitution.

"La nullité du mandat impératif, prescrite à l'article 15(3) de la Constitution, postule de l'indéboulonnable qualité d'élu qui colle à la peau du bénéficiaire du suffrage national ou local, en dépit de la navette partisane observée", explique-t-il.

Pour le constitutionnaliste, "l'élu est celui de la Nation, conformément à l'article 15(2) de la Constitution, et non celui d'un quelconque parti comme l'opère l'article 121(2) de la loi de 2012 portant code électoral." Il souligne ainsi une contradiction entre le code électoral et la Constitution, rappelant la primauté de cette dernière conformément à l'article 45.

Cette controverse juridique cache mal des enjeux politiques considérables à l'approche de l'élection présidentielle. Pour les partisans du MRC, il s'agit de défendre le droit de leur leader à se présenter. Pour leurs opposants, il s'agit de faire respecter les règles du jeu électoral telles qu'inscrites dans le code électoral.

"Ce débat est fondamentalement politique avant d'être juridique", analyse un observateur de la scène politique camerounaise. "La question est de savoir si on peut utiliser des dispositions du code électoral pour écarter un adversaire politique de la course présidentielle."

Des interprétations constitutionnelles divergentes

Les défenseurs de la candidature de Kamto soulignent qu'aucune disposition de la Constitution ne fixe l'appartenance à un parti politique comme condition d'éligibilité à la présidentielle. Cette exigence découlerait uniquement du code électoral, qui aurait, selon eux, ajouté une condition non prévue par la norme suprême.

À l'inverse, les tenants d'une lecture stricte du code électoral, à l'image d'Aimé Robert Bihina, considèrent que seuls les partis ayant obtenu des élus lors des derniers scrutins peuvent légitimement présenter un candidat à la présidentielle, et que le ralliement ultérieur d'élus ne change pas cette donne.

Vers une décision du Conseil constitutionnel?

À mesure que la date de l'élection présidentielle approche, il semble inévitable que cette question soit tranchée par le Conseil constitutionnel, lors de l'examen des candidatures.

Si la position défendue par le Pr Abah Oyono devait prévaloir, Maurice Kamto pourrait être autorisé à se présenter à l'élection présidentielle en s'appuyant sur les élus ayant rejoint son parti après leur élection sous d'autres étiquettes.

En revanche, si l'interprétation restrictive du code électoral l'emporte, comme le suggère la sortie d'Aimé Robert Bihina, le leader du MRC pourrait se voir écarté de la course à la magistrature suprême, faute d'avoir participé aux dernières élections législatives et municipales.

Dans tous les cas, ce débat juridico-politique promet d'animer intensément les semaines à venir, alors que le Cameroun se prépare à une élection présidentielle dont les enjeux dépassent largement la simple question du "mandat impératif".

Source: www.camerounweb.com