L'ancien ministre Alain Mebe Ngo'o et sa femme bientôt libérés ? Enorme rebondissement au TCS

« Des faits infondés inventés par des personnes tapies dans l'ombre »

Thu, 26 Jan 2023 Source: Le Messager

« Me condamner à tout prix et à tous les prix », c'est l'essentiel à retenir du discours de plaidoyer prononcé par l'accusé, l'ancien ministre Edgar Alain Mebe Ngo'o. Au cours de l'audience du 16 janvier dernier consacrée aux déclarations finales des accusés, l’ancien ministre délégué à la présidence de la République chargé de la Défense, au même titre que tous ses autres camarades d’infortune, ont dans leurs prises de parole, relevé le manque de preuves apportées par le ministère public dans cette procédure qui s ’apparente à un véritable cul-de-sac. Engagée dans des tentatives désespérées de manipulation de la presse et de l'opinion publique, certaines personnes tapies dans l’ombre active- raient des réseaux mafieux pour torpiller la procédure inscrite au Tribunal criminel spécial (Tcs).

C’est en tout cas ce que pense Mebe Ngo’o qui s'est appesanti dans un premier temps sur l'acharne- ment contre lui, à travers la promesse faite par un haut responsable de la République de le mettre en prison lui et sa femme un an auparavant. Et un an après, ladite promesse a été tenue. De procès en procès, l’on continue de s’engouffrer dans un impressionnant feuilleton qui n’est pas prêt de livrer son dernier épisode. L’affaire Mebe Ngo’o, telle une pieuvre qui étend ses tentacules, continue de dévoiler au fil des mois, de nouveaux rebondissements les uns plus retentissants que les autres. Dans son long et émouvant laïus, l’homme est également revenu sur le projet Polytechnologies dont les matériels ont été tous livrés. L’intégralité de sa déclaration finale.

« Madame la Présidente, Honorables membres de la Collégialité, Je vous remercie infiniment de me permettre de m'exprimer au terme de cette séance de plaidoiries. Avec votre permission, je ferai un bref exposé, suivi de quelques précisions et observations. Je me félicite au plus haut point de ce que notre Conseil, Maître Koe Amougou Pauline Noël, avec compétence et méthode, ait pu si brillamment démontrer l'inanité de nos accusations.

Dans cet exercice dialectique, elle ne s'en est tenue qu'à la véracité des faits et à la lettre de la loi. Sa brillante plaidoirie s'inscrit du reste en droite ligne des débats que vous avez conduits, Madame la Présidente dans cette même salle assistée de votre Collégialité pendant plus de deux ans (Examination-In-Chief, CrossExamination et Re-Examination). Débats au cours desquels en aucun moment, le ministère public et la partie civile n'ont pu rapporter la moindre preuve aux graves accusations qui m'avaient été imputées. Situation paradoxale lorsqu'on se rappelle que, comme jamais auparavant, mon épouse et moi-même avions été mis en détention de manière expéditive, au terme de plus d'un mois d'assignation illégale en résidence surveillée et d'une enquête préliminaire bâclée et entachée de vice de procédure, le tout sur fond d'une médiatisation outrancière qui laissait croire que nous étions coupables et que les preuves de notre culpabilité étaient réunies et disponibles.

Faisant le déni absolu des explications et arguments que j'avais fait valoir lors des débats, le Ministère public a pris le parti de reconduire ses réquisitions intermédiaires en tous points de vue conformes à l'Ordonnance de renvoi, en tentant cependant un rattrapage plutôt boiteux concernant les incongruités arithmétiques qui avaient consisté à m'imputer des détournements toutes taxes comprises, et des montants supérieurs à ceux effectivement sortis des caisses du Trésor public. Lui emboîtant le pas, la prétendue partie civile, plongée dans le même désarroi argumentaire, est allée plus loin en requalifiant de manière improbable les faits en procès des « biens mal acquis ».

Par la voix du Chef de file des avocats du ministère des Finances, la partie civile à corsé l'addition en nous abreuvant d'invectives pour le moins indécentes, me qualifiant par exemple de Chef de gang dont j'aurais choisi les experts et en soutenant mordicus que le pactole de 196.800.000.000 Fcfa, montant total de la convention de Prêt signée avec la Chine, avait été mis à ma disposition et purement et simplement détournée par mes soins. Je préfère laisser à cet éminent Avocat le soin d'assumer la responsabilité de tels écarts de langage qui, au-delà de ma modeste personne, mettent implicitement en cause le partenaire chinois, sont susceptibles de mettre en péril, les relations d'amitié et de fructueuse coopération qu'entretiennent depuis plus de 50 ans le Cameroun et la Chine, lesquelles sont diplomatiquement qualifiées d'exemplaires. Il est ressorti de la remarquable plaidoirie de Me Koe que les faits pour lesquels j'avais été renvoyé devant votre tribunal ne sont pas seulement juridiquement et factuellement infondés.

De par leur caractère insolite, invraisemblable, inimaginable voire ubuesque, ces accusations ne peuvent procéder que d'une construction malsaine, maladroitement planifiée dans la précipitation par des personnes tapies dans l'ombre, sur la foi de grossières contre-vérités et d'incongruités juridiques généralement glanées sur la base de ragots et auprès d'individus douteux et interlopes. Manifestement, il ne peut s'agir ni plus ni moins que d'une conspiration dont l'objectif inavoué est de me faire condamner à tout prix et par tous les prix, y compris par l'absurde, et de me livrer avec ma famille à la vindicte populaire, dans un contexte où préalablement désinformés et manipulés par l'ampleur des chiffres des détournements allégués, et à la faveur de la précarité socio-économique ambiante, certains de nos concitoyens peuvent se déterminer à en découdre physiquement avec ceux qui, même injustement, sont accusés d'atteinte à la fortune publique.

C'est cette ambiance de vendetta, propice aux agressions physiques, verbales et aux humiliations de toutes sortes que ma famille et moi-même vivons depuis le déclenchement de cette procédure judiciaire. Mon épouse, mes enfants et moi-même en avons fait les frais. Cette conspiration aux manifestations multiformes explique les absurdités qui entachent la présente procédure, et qui hypothèquent l'administration des preuves par l'Accusation. J'en cite quelques-unes :

- un an avant notre interpellation, une haute autorité de la République m'a menacé de me mettre en prison avec mon épouse. La menace a finalement été mise en exécution ;

- La véritable forfaiture que constitue la correspondance tronquée de l'Anif ;

- La grossière manipulation de l'un de nos co-accusés et sa tentative désespérée de sauvetage téléphonique ;

- La prise en compte des témoignages mensongers d'une personne révoquée des Forces de défense pour faute majeure ;

- La remise en cause, par un individu mentalement déséquilibré, dépourvu de toute qualité et d'expertise, des comptes de gestions instruits puis jugés par la Chambre des Comptes de la Cour suprême et de ce fait revêtus de l'autorité de la chose jugée.

Madame la présidente Honorables membres de la Collégialité ; Comme cela est échu à d'autres fonctionnaires, dont vous-mêmes, le Président de la République, Son Excellence Paul Biya, m'a confié pendant plus de 30 ans d'importantes responsabilités, dont certaines sensibles, dans sa proximité immédiate. Sans nul doute, c'est un grand honneur, c'est une importante manifestation de confiance, c'est surtout une lourde responsabilité. En plus de lui en être infiniment reconnaissant, je saisis cette occasion pour lui réaffirmer ma fidélité, ma loyauté et mon attachement indéfectible et déférent. Dans les limites inhérentes à la nature humaine, je me suis efforcé de me hisser à la hauteur de cette confiance en essayant d'assumer mes responsabilités avec probité, engagement, et quête permanente de l'efficacité. Hélas, tout en vous distinguant, ces fonctions ont aussi ceci de particulier qu'elles exposent aux humeurs et états d'âme pernicieux propres au genre humain et auxquels on peut être impuissant.

Comme je l'avais indiqué à l'entame de ce procès, respectueux des Institutions de la République, dont la Justice, et profondément convaincus que nul n'est au-dessus de la loi, mon épouse et moi-même avons pris l'option de nous soumettre et de déférer à toutes les injonctions et réquisitions de cette noble Institution, notamment à l'aune de la sérénité qui a caractérisé le déroulement de ce procès sous votre présidence. En dépit d'une certaine perplexité, nous demeurons confiants en la justice de notre pays. Sur la foi de la loi et des faits, et au regard de l'incapacité manifeste du Ministère Public à prouver ses accusations, je clame mon innocence par rapport aux cinq chefs d'accusation qui ont été mis à mon passif. Je clame aussi l'innocence des complices imaginaires qui m'ont été attribués et dont je porte les sorts sur ma conscience et qui sont en réalité les victimes collatérales de la cabale dont je suis victime. Dois-je avoir l'outrecuidance de le rappeler, si l'innocence se présume, la culpabilité quant à elle doit s'établir par des preuves tangibles et irréfutables.

Enfin, puisse sa modestie légendaire en souffrir, je m'en voudrais, au nom de mon épouse, de nos enfants et au mien propre, de ne pas rendre un vibrant et combien mérité hommage à notre Conseil Me Koe Amougou Pauline Noël et à sa Consœur Maître Ntamag Sylvie Constance, pour la plaidoirie historique et exceptionnelle de pertinence qu'elle a prononcée pour défendre notre cause dans le cadre du présent procès. Nous lui sommes infiniment reconnaissants pour son aversion obsessionnelle à toute forme d'injustice, pour sa capacité d'écoute et sa perspicacité à rechercher la vérité. D'une disponibilité de tous les instants, ses fréquentes venues à la prison en ont pratiquement fait une détenue au même titre que nous. Je salue en elle l'éminente femme de droit et de conviction qui, avec pugnacité, détermination et témérité, n'a reculé devant aucune difficulté pour déconstruire et démêler ce qui s'est avéré comme l'écheveau inextricable de notre cauchemar judiciaire.

Au titre des précisions, concernant la convention de prêt entre la Chine et le Cameroun :

- La liste officielle des matériels militaires retenue dans la Convention de Prêt signée entre le Cameroun et la Chine figure, non pas dans le MOU mais dans l'Avenant n°1 au Contrat Commercial. Avenant signé le 18 Mai 2011. Elle renseigne sur la nature, les spécifications techniques, les programmes de formation, service après-Vente et les coûts.

- Cette liste a été arrêtée au terme de discussions entre Experts militaires camerounais et chinois, paraphée par le Chef d'Etat-Major des Armées, les Chefs d'Etats-Majors Centraux, le Commandant du Corps national des Sapeurs-pompiers, le Directeur central de la coordination de la Gendarmerie nationale, le Directeur Central du Suivi, de la Maintenance des Matériels Majeurs des Forces de défense, et finalement validée par le président de la République, Chef des Armées.

- Lesdits matériels majeurs concernent l'Armée de Terre, l'Armée de l'Air, la Marine Nationale, la Gendarmerie nationale, le Corps national des Sapeurs-pompiers et les matériels communs. Le total de leurs coûts respectifs s'élève à 272.799.829 €, auxquels il faut ajouter le coût du Fret Maritime et les Assurances jusqu'au Port de Douala, évalué à 27.200 €, d'où un total général de 300.000.00 €.

- Il s'agit d'une pièce figurant dans le dossier de procédure admise comme pièce à conviction, dont lecture ne peut être donnée pour des raisons évidentes liées au Secret Défense.

- Ces matériels majeurs constituent le cœur névralgique de notre appareil de défense.

- Ils ont été livrés et réceptionnés en Chine et au Cameroun, après séances de tirs et essais dynamiques par le Sous-Comité technique y dédié présidé par le Contre-Amiral Njine Djomkam Pierre, toujours en service au Mindef comme Directeur central du suivi de la maintenance des matériels Majeurs des Forces de défense.

Au titre des observations, j'ai du mal à comprendre la raison d'être de la Partie Civile constituée dans le cadre de ce procès.

- Les matériels majeurs militaires évoqués tantôt ont été livrés à crédit à l'Armée Camerounaise par la société d'Etat chinoise Polytechnologies, conformément aux dispositions du Décret présidentiel habilitant le Minepat, et de celles de la Convention elle-même.

- En contrepartie des coûts desdits matériels, la Caisse autonome d'amortissement a achevé de rembourser le prêt correspondant à l'échéance de Mai 2022.

- La Caisse Autonome d'Amortissement est placée sous la tutelle technique et financière du Ministre des Finances par ailleurs Président de son Conseil d'Administration et signataire de la Lettre de Garantie Souveraine de l'Etat dans le cadre de cette Convention.

S'agissant des marchés spéciaux querellés, tous ont été payés à leurs légitimes fournisseurs par les comptables publics après vérifications et contrôles de conformité par le Contrôleur financier et la régularité de la dépense par le Comptable Public. L'un et l'autre fonctionnaire relevant de l'autorité exclusive du ministre des Finances et exerçant leurs fonctions en toute indépendance. En conclusion, dans l'un et l'autre cas, c'est le ministère des Finances qui a payé. Quel préjudice subi par la partie civile. Que réclame-t-elle ? Je vous remercie de votre bien aimable attention »

Source: Le Messager
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