Avec l’explosion de l’affaire de l’assassinat de Martinez Zogo, il était sorti dans la presse que le puissant PDG de Vision 4 détenait une liste de personnes qui seraient "bilingues" comme on les appelle couramment au pays. Calixthe Beyala donne des détails supplémentaires de cette histoire qui laisse tout le monde bée.
« Cameroun, un pays bloqué. Rien n'y fonctionne en dehors des meurtres et des sacrifices humains. L'administration elle-même va à vau-l'eau ; chacun fait ce qu'il veut pour survivre.
La corruption galope et virevolte, assombrit les cieux de ses miasmes ; les pillages systématiques des caisses de l'état se portent magnifiquement bien, on vole, on capte les terres, magistrale.
On a des terres et des maisons à gogo alors même qu'on n'a jamais rien foutu de ses dix (10) doigts ; on n'y est juste bien nés dans la région qu'il faut, la région qui dirige le Cameroun.
Alors, à nous le Cameroun. Les autres trop lâches se taisent et se terrent. Quelques-uns bavassent sur les réseaux sociaux et jamais rien ne bouge ; les Camerounais aiment bavarder telles des pies.
Les compères compèrent mieux que les commères ; les compères inventent des histoires sans tête ni queue pour menacer les gens. Ils se veulent des DGRE bis et s'en vantent dans cette pauvreté qui les assomment, les jambes souvent paralysées par des pratiques sexuelles douteuses.
On s'y essaye au chantage des personnalités qu'on ne connaît pas, comme pour cette fameuse liste de Jean-Pierre Amougou Belinga et ses cinquante homose*xuels. Il n'en était rien sorti, rien d'autre que du chantage et de la salissure.
Pendant ce temps les hommes d'affaires n'ont plus rien à faire sauf à faire des queues devant l'administration en attendant un improbable paiement de leurs dus par l'État.
Les autres continuent de puiser allégrement dans les lignes 94 et 65, d'ailleurs les plus grands hommes d'affaires sont tous devenus des sénateurs du parti-État pour s'assurer une immunité, on ne sait jamais.
Chacun prend ses précautions dans ce pays aujourd'hui exsangue et dont l'avenir est aussi visible qu'un trou noir. Pendant ce temps, le fils de l'Homme se prépare à la présidence ; il ne sait rien faire, ce n'est pas grave. Certains nous apprendront à nous shooter pour oublier cette misère, c'est déjà ça.
De là-haut, du haut de son immeuble, Martinez Zogo nous observe, rieur au-delà de ses moult souffrances. Le 20 mai est passé, on a fait semblant d'être heureux dans une unité de façade qui vole en éclat à Sangmélima quelques jours plus tard. Sangmélima, la ville de toutes les xénophobies. Puis, c'est passé. Le Cameroun continue sa lente descente aux enfers ».