Paul Biya envoyé à la retraire par un cadre du RDPC, c'est du sérieux

Dans une lettre ouverte au ton direct mais respectueux, Léon Theiler, conseiller municipal du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), interpelle le président Paul Biya sur la nécessité de passer le flambeau à une nouvelle génération. Cette correspondance, qui fait suite à une première missive, appelle le fondateur du parti présidentiel à prendre une retraite "bien méritée" et à permettre un rajeunissement du directoire politique. L'élu dénonce au passage le "clanisme" et les manœuvres d'une "élite vieillissante" qui, selon lui, sabote l'héritage politique du chef de l'État camerounais tout en exploitant sa position pour des intérêts personnels. Une voix dissonante au sein même du parti au pouvoir qui pourrait en annoncer d'autres.

Opinion… UN CONSEILLER MUNICIPAL DU RDPC, LÉON THEILER DEMANDE À PAUL BIYA DE PRENDRE SA RETRAITE

« Monsieur le Président National,

Je me permets, par la présente, de vous adresser une seconde correspondance. J'ignore si elle vous parviendra, mais j'ai veillé à suivre les voies traditionnelles afin qu'elle vous soit remise en main propre.

Certains de mes camarades, qui nourrissent en silence l'espoir d'un changement imminent, s'interrogent sur la nécessité de cette nouvelle lettre ouverte. Ils hésitent à exprimer ouvertement leurs aspirations, contrairement à ceux qui vous portent, ainsi qu'au Cameroun et au parti que vous avez fondé, une affection sincère.

Si j'ai choisi de m'exprimer publiquement, c'est parce que notre parti se veut celui du peuple, uni autour des idéaux démocratiques. C'est d'ailleurs sous votre impulsion que ce retour à la normale a été rendu possible, après la période du parti unique.

Force est de constater que des imperfections persistent, entretenues par certains de vos pairs qui vous accompagnent depuis de nombreuses années. Ces derniers risquent, dans un futur proche, de compromettre les fondements de votre succès politique : du moins, ce que vous pourriez laisser de positif à ma génération comme héritage palpable, à savoir : la paix et un commencement de démocratie.

Il serait superflu de rappeler ici les nombreux accomplissements qui vous sont attribués, fruits d'une longue carrière au service de l'administration. Vous êtes une source de savoir inestimable, non seulement pour le Cameroun, mais pour l'Afrique entière.

Monsieur le Président,

Le temps est venu de passer le flambeau et de prendre une retraite bien méritée. Ceux qui vous incitent à poursuivre et organisent des manœuvres politiques ne vous aiment pas. Vous n'êtes pour eux qu'une source de profit à exploiter jusqu'à la dernière goutte, vous méritez les hommages et les honneurs de la nation toute entière.

La jeunesse vous admire et c’est pourquoi elle refuse de cautionner toute forme de maltraitance envers les aînés. Votre sagesse est précieuse pour nous guider dans la poursuite de l’œuvre que vous avez entreprise. Cependant, certains, tapis dans l’ombre et même sous votre nez, tentent de saboter cette œuvre en vous poussant à conserver la tête du RDPC au lieu de passer la main à une nouvelle génération pour purifier le parti des éléments nuisibles, conséquences de vos faveurs imméritées envers certains.

Il est impératif d'organiser un congrès ordinaire, de rajeunir le directoire du RDPC afin de redéfinir les règles d’une nouvelle majorité et de redonner un nouveau visage à notre parti en mettant un terme au clanisme qui risque de créer, à terme, d’énormes difficultés, même pour notre pays.

Le RDPC est à l’image de notre pays, le Cameroun : fort face aux menaces extérieures, mais fragilisé de l’intérieur par les divisions et le parrainage clanique.

Le clanisme ambiant est l’œuvre d’une élite vieillissante qui a traversé le temps à vos côtés et a engendré des obstacles qui maintiennent notre pays dans le statu quo.

Monsieur le Président, malgré votre bonne volonté, vous n’avez plus l’énergie d’il y a vingt ans pour contrôler vos créatures, qu’il s’agisse de l’opposition ou de certains membres de notre parti. Ils sont les vrais oppresseurs de cette jeunesse que vous avez autrefois qualifiée de fer de lance de la nation. Laissez-nous purger démocratiquement l’arène politique nationale en ouvrant la voie au rajeunissement du directoire de notre propre parti. Je suis certain que même les partis alliés et les autres fondateurs de partis politiques suivront ce bel exemple.

En vous demandant de prendre votre retraite, je souhaite permettre à ma génération de relever ses propres défis. La tâche ne sera pas facile, compte tenu des obstacles auxquels nous sommes confrontés.»

Ainsi va la République