À 74 ans, Erik Essousse, directeur général d’Elections Cameroon (Elecam), est l’homme le plus craint et critiqué du processus électoral camerounais. Selon des révélations exclusives de Jeune Afrique, il ne se contente pas d’organiser le scrutin du 12 octobre : il en est le maître d’œuvre absolu, un rôle qui lui vaut d’être accusé de partialité systématique en faveur du RDPC et de Paul Biya.
D’après les informations obtenues par Jeune Afrique, Essousse aurait personnellement supervisé des ajustements controversés sur les listes électorales dans plusieurs régions clés, notamment le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, où l’opposition dénonce des exclusions massives de ses sympathisants. « Les listes ont été nettoyées de manière sélective, affirme une source proche d’Elecam sous couvert d’anonymat. Certains noms disparaissent sans explication, tandis que d’autres, proches du RDPC, réapparaissent comme par magie. »
Jeune Afrique révèle que pendant sa carrière au ministère de l’Administration territoriale, Essousse a directement participé à la censure de la presse, un détail qui prend une résonance particulière à l’approche du scrutin. « Il connaît toutes les ficelles pour contrôler l’information, confirme un ancien collègue. Aujourd’hui, il les applique à l’élection. » Son livre, « Liberté de la presse écrite au Cameroun » (2006), apparaît désormais comme une ironie cruelle pour ses détracteurs.
En 2018, lors de sa première présidentielle en tant que directeur d’Elecam, Essousse avait été accusé par Maurice Kamto de fraudes massives. Jeune Afrique a eu accès à des documents internes montrant que des recours électoraux avaient été systématiquement rejetés, parfois sans même être examinés. « Les preuves étaient là, mais elles ont été ignorées, confie un juriste proche du dossier. Cette fois, l’opposition est déterminée à ne pas se laisser faire. »
La reconduction d’Essousse en 2023, malgré les polémiques, confirme une chose : Paul Biya lui fait une confiance aveugle. « Il est l’homme qui garantit que rien ne dérapera, explique un diplomate occidental. Son rôle n’est pas d’organiser une élection transparente, mais de s’assurer que le RDPC gagne. » Une mission qu’il semble déterminé à accomplir, qu’importe le coût démocratique.