Entre la vie et la mort : Djeukam Tchameni, le destin tragique d'un opposant historique camerounais

Djeukam Tchameni STV Djeukam Tchameni

Wed, 24 Dec 2025 Source: www.camerounweb.com

De la prison de 1988 aux geôles du SED en 2025 : Jeune Afrique retrace le parcours d'un activiste qui a consacré sa vie à la démocratie

Par votre rédaction - 24 décembre 2025

Derrière le nom de Djeukam Tchameni, détenu depuis le 24 octobre dernier au secrétariat d'État à la Défense de Yaoundé, se cache le parcours exceptionnel d'un homme qui aura consacré près de quatre décennies de sa vie à la lutte pour la démocratie au Cameroun. Dans une enquête poignante publiée ce mardi, Jeune Afrique retrace l'itinéraire politique de cet opposant historique, figure méconnue du grand public mais acteur majeur des combats démocratiques camerounais depuis la fin des années 1980.

Jeune Afrique révèle que le premier séjour de Djeukam Tchameni en prison remonte à 1988, une époque où le Cameroun vivait sous un régime de parti unique et où militer pour le multipartisme était considéré comme un acte de haute trahison. "Mon époux avait déjà été embastillé en 1988 parce qu'il luttait pour l'avènement de la démocratie", confie son épouse dans les colonnes du magazine panafricain.

Le magazine dévoile qu'après dix-sept mois de détention extrajudiciaire – une pratique courante à l'époque – Djeukam Tchameni a été traduit devant un tribunal militaire en mars 1990. Il n'était pas seul sur le banc des accusés : à ses côtés figuraient deux autres géants de l'opposition camerounaise, Me Yondo Mandengue Black et Anicet Ekane. Jeune Afrique rappelle que tous trois ont été condamnés à trois ans de prison ferme pour "subversion", avant d'être libérés six mois plus tard sous la pression conjuguée de la société civile camerounaise et de la communauté internationale.

Dans son enquête exclusive, Jeune Afrique révèle un détail particulièrement symbolique du parcours de Djeukam Tchameni : sa rencontre avec Anicet Ekane, figure tutélaire de l'opposition camerounaise décédée récemment en détention. "Ils se sont connus en février 1990 en prison avant d'être libérés", raconte son épouse au magazine panafricain.

Cette rencontre dans l'adversité allait sceller un compagnonnage politique de trente-cinq ans. Jeune Afrique rapporte que dès leur libération, les deux hommes se sont immédiatement remis au travail pour construire une coordination des partis et associations en vue de réclamer une Conférence nationale souveraine. Le magazine révèle que "Anicet Ekane et mon époux ont été deux acteurs principaux des années 1990-1992, avant de contribuer à la victoire volée de John Fru Ndi", en référence à l'élection présidentielle controversée de 1992.

L'enquête de Jeune Afrique met en lumière la constance exceptionnelle de l'engagement politique de Djeukam Tchameni. Pendant plus de trois décennies, l'homme n'a jamais renoncé à ses convictions démocratiques, traversant les différentes phases de l'histoire politique camerounaise : l'ouverture démocratique timide du début des années 1990, les années de plomb du milieu des années 1990, la longévité du régime Biya et, enfin, les nouvelles dynamiques d'opposition des années 2020.

Le magazine révèle qu'en 2025, Djeukam Tchameni et Anicet Ekane étaient encore engagés ensemble, cette fois au sein de l'Union pour le changement (UPC), aux côtés d'Issa Tchiroma Bakary. "Ce sera leur dernière action commune", confie l'épouse de l'opposant à Jeune Afrique, avec une émotion palpable. "Ils se sont connus en prison et se sont séparés, trente-cinq ans plus tard, en prison. Vous pouvez imaginer dans quel état psychologique se trouve mon époux."

Le poids du traumatisme : de la mort d'Ekane à la détention de Tchameni

Jeune Afrique révèle l'impact psychologique dévastateur qu'a eu sur Djeukam Tchameni le décès de son compagnon de lutte, Anicet Ekane, survenu en détention dans des circonstances controversées. "Nous sommes en état d'alerte maximale. Dans ces geôles, un détenu est en danger permanent. Anicet Ekane en est mort", déclare l'épouse de l'opposant dans les colonnes du magazine.

Cette crainte n'est pas infondée. Le magazine rappelle que les conditions de détention au secrétariat d'État à la Défense de Yaoundé sont notoirement difficiles, et que plusieurs opposants y ont connu des sorts tragiques au fil des décennies. "Mon mari est un prisonnier politique, un prisonnier d'opinion, il est en danger de mort", résume l'épouse de Djeukam Tchameni dans l'enquête de Jeune Afrique.

L'enquête de Jeune Afrique éclaire également le rôle central qu'a joué Djeukam Tchameni dans la campagne présidentielle de 2025. Loin d'être un simple militant de base, l'opposant aurait été, selon son épouse, "l'architecte de la victoire écrasante d'Issa Tchiroma Bakary", ce candidat qui a osé se proclamer vainqueur face à Paul Biya après le scrutin du 12 octobre.

Le magazine révèle que c'est précisément ce rôle de stratège et d'organisateur de la campagne de Tchiroma Bakary qui aurait motivé son arrestation spectaculaire le 24 octobre. "Le seul crime de mon mari est d'avoir été l'architecte de la victoire écrasante d'Issa Tchiroma Bakary et de la défaite cuisante de Paul Biya", affirme son épouse dans les colonnes de Jeune Afrique. Une accusation qui en dit long sur la nature politique de cette détention.

Un symbole de la répression de l'opposition camerounaise

À travers le parcours de Djeukam Tchameni, Jeune Afrique dresse en filigrane le portrait d'une opposition camerounaise qui, malgré près de quarante ans de combats, continue de se heurter aux mêmes méthodes de répression. Les méthodes ont peu évolué : arrestations sans mandat, détentions arbitraires prolongées, accusations fluctuantes, conditions carcérales éprouvantes.

Le magazine souligne la dimension symbolique et tragique de ce destin : un homme qui a commencé sa lutte en prison en 1988 et qui, trente-sept ans plus tard, se retrouve à nouveau derrière les barreaux pour les mêmes idéaux démocratiques. "Je suis extrêmement choquée par la détention arbitraire de mon époux. Je croyais révolue l'ère du terrorisme d'État. Mais Paul Biya semble incapable de se défaire de ses réflexes autoritaires", dénonce son épouse dans l'enquête de Jeune Afrique.

Dans les dernières lignes de son enquête, Jeune Afrique rapporte l'appel poignant lancé par l'épouse de Djeukam Tchameni. Au-delà de la libération de son mari, c'est une vision politique alternative qu'elle propose. "Paul Biya devrait libérer immédiatement les prisonniers politiques et entrer en dialogue avec Issa Tchiroma Bakary. Le programme de transition et de refondation de l'UPC peut constituer une base de négociation pour l'avenir du Cameroun", plaide-t-elle dans les colonnes du magazine.

Un appel au dialogue qui résonne comme un écho lointain des revendications des années 1990, lorsque Djeukam Tchameni et ses camarades réclamaient une Conférence nationale souveraine. Trente-cinq ans plus tard, révèle Jeune Afrique, les mêmes causes produisent les mêmes effets, et les mêmes hommes paient le même prix pour leurs convictions. L'histoire, décidément, semble bégayer au Cameroun.

Le destin de Djeukam Tchameni, tel que le retrace Jeune Afrique, interroge finalement sur la capacité du Cameroun à sortir d'un cycle de répression politique qui perdure depuis des décennies. Alors que l'opposant entame son troisième mois de détention, sa famille et ses soutiens attendent toujours un signe d'apaisement d'un pouvoir qui, pour l'heure, semble déterminé à ne rien céder.

Source: www.camerounweb.com