La défaite des Lions Indomptables du Cameroun face aux Pharaons d’Egypte hier 03 février 2022 en demi-finale n’étonne par certains analystes du football camerounais. Ils étaient d’ailleurs nombreux à déplorer la petite forme de l’équipe de Vincent Aboubacar. Le journaliste et éditorialiste Célestin Biaké Difana n’est pas du tout surpris par l’élimination de son pays.
SE POSER LES BONNES QUESTIONS
Ne rien devoir à l’histoire et à la mémoire, croire tout possible par le soudain et l’immédiat puis toujours remiser les saletés sous le tapis, finissent bien autour d’une circonstance inattendue par éclater au grand jour pour révéler la simple vérité des choses : ne rien trafiquer, ne rien masquer. Toujours laisser s’imposer les évidences fussent-elles désobligeantes.
Le Cameroun du football vogue depuis 2002 et la fin de ses vraies stars sur le mensonge et l’esbroufe. Si quelques fulgurances en compétition lui ont permis de faire illusion jusque-là, c’est beaucoup plus le fait d’une tradition erratique de niaque que d’une politique pensée de perpétuation et de reproduction des modèles gagnants qui ont construit son histoire, sa légende et ses performances.
A preuve, la médiocrité quarantenaire de son championnat, incapable de tenir aujourd’hui la mesure des compétitions continentales des clubs et fournir par ricochet, un simple embryon ou semblant de noyau de quelques pratiquants sûrs sur lequel on peut espérer bâtir quelque chose de pérenne. Rien, tout dans la captation sans réel tri de quelques noms qui parce que disponibles à souhait, ont plus ou moins fui le terroir pour hasardeusement chercher un peu de lumière. Bien évidemment, par une conjonction heureuse d’événements, il se trouve deux ou trois pépites pour accompagner cela et une espèce d’attelage commode est vite monté pour donner le change.
Beaucoup de fois cela a mordu. Malheureusement pour la grande fête de notre coupe d’Afrique des nations, cela vient de faire pschitt. Si ce n’est pas être un cocardier impénitent, tout camerounais sérieux au fond de lui savait que les lions indomptables de cette cuvée, n’avaient rien d’exceptionnel. Ce n’était à quelques rares exceptions près qu’une bande de plaisantins portés par un vent favorable et une sacrée veine de cocus.
De telle sorte qu’on a cru qu’ils dupliqueraient la surprise de 2017. Tout cela nous a régalé le temps du doute mais n’effaçait pas le fond des problèmes. Et comme problèmes, il y en a des tonnes. En n’envisageant que le football sans rentrer dans la mafia de son organisation et de sa gestion, on peut bien se demander comment rentre-t-on en équipe nationale senior ou toute autre?
Le suivi et le casting des joueurs tiennent de quels critères ? Quel profil type d’entraîneur nous faut-il ? Doit-on se résoudre à les recruter au gré des affinités douteuses? En sacrifiant dans bien des cas la confiance et le temps de la maturation parce que toujours pris par l’impératif des politiques du succès en toutes circonstances comme cache-sexe de la mal gouvernance?
Qu’attendions-nous vraiment de cette coupe d’Afrique des nations ? Qu’elle vienne comme par un coup de baguette magique effacer par son succès, les sourdes colères ruminées par le peuple sur son organisation, les détournements nauséabonds et les dépenses faramineuses? Qu’elle réussisse subtilement à faire taire la grogne sociale ou qu’elle rabiboche tant bien que mal l’unité nationale rageusement mise en péril?
Ce n’était à vrai dire que des perspectives ou mieux, des fuites en avant. Nous voilà rattrapés par l’échec et gros jean comme devant. Le sort des pénalties face à l’Égypte tout douloureux qu’il est, marque aussi un réveil brutal. La distraction a bien une fin. On ne va pas bien sûr ignorer qu’un instant, le temps de trois semaines d’euphorie le football nous a fait oublier nos divisions. C’était somme toute apaisant. Mais maintenant alors, ne doit-on pas enfin oser se poser les bonnes questions sur notre citoyenneté et notre devenir, notre vrai rapport aux politiques publiques menées?