« Moi Foly Dirane malade ? Mais de quoi donc ? »…C’est ainsi que l’un des animateurs les plus célèbres et anciens du Cameroun commence de manière non pas gauchère son droit de réponse.
Plongé depuis quelques semaines dans le silence de son amertume, on pensait que Dirane avait tout perdu même l’usage de la parole.
Ce qu’il qualifie de « rumeur persistante » au sujet de son éviction, a alimenté pendant plusieurs jours l’actualité au Cameroun.
Sauf qu’il affirme lui-même par le même canal avoir appris avec « stupéfaction » dans les colonnes de « CameroonTribune » du 17 juin, l’étonnante raison donnée pour justifier son absence sur les antennes de la CRTV : la maladie.
Sauf qu’officieusement, les raisons dites officielles vont lui être soufflées des oreilles murales des couloirs de la « Tour de Mballa II ».
Dirane serait séparé de « son » émission pour sa « vieillesse ». On dira sénescence non pas de l’émission mais de son animateur, son créateur, celui avec qui elle est née, celui qui lui a donné la vie.
Le nouveau sponsor venu serait prêt à payer le prix pour séparer la créature de son créateur.
Il serait aussi prêt à donner un coup de neuf à l’émission mais pas à son présentateur.
Selon ces différentes sources polluées de nombreuses langues ordurières, ce serait la seule conditionnalité préalable du sponsor pour accompagner ladite émission.
Cette raison principalement a donné les cheveux blancs à Dirane, le « père yor » qui n’a jamais voulu vieillir. Il ne veut pas prendre le large, et de l’âge non plus.
Lui qui s’est toujours considéré comme un « gars de l’heure », « un père androïd », se sent blessé dans son être propre. Prenant ses téléspectateurs à témoin, il se demande bien s’il « présente des signes de fatigue ? ».
Il se voit toujours en pleine forme, au milieu de sa tribune, entouré des jeunes en furie devant la caméra, avec sa coiffure qu’il pense indémodable, après « 26 ans sans relâche », « sans tâche » au service d’une antenne qui ne va pas manquer l’occasion pour le relâcher.
Il regarde impuissamment comme le personnage du Cid, « une œuvre de tant de jours en un jour effacée ».
Taxé aussi d’être malade, Dirane va presser ses pas pour s’offrir un bilan de santé. Il dit avoir été « soumis à tous les tests médicaux », peut-être même pour des maladies qui ne se sont pas encore exportées chez nous.
Il s’est même rendu dans de spéciaux cabinets pour des diagnostics de « schizophrénie », de « folie » et évidemment de « sida ». Les résultats « négatifs » dans leur ensemble ont été déposés par « le malade imaginaire » dans son lieu de service.
Cette présomption d’innocence jugée suspecte selon la formule béate du « qui s’excuse s’accuse », n’a malheureusement pas touché la cible.
La conclusion de Dirane se veut claire et nette : « je ne suis pas vieux », « je ne suis pas fou malade ». De manière inattendue, le « père fondateur » de Délire a reçu un soutien infaillible de la part de ses fans.
Un public qui a longtemps critiqué l’obsolescence de cette émission, et même parfois la senescence de son présentateur.
Après 26 ans de règne sans partage, le « poisson du Botswanga » ne réalise pas toujours ce qui est en train de se passer.
Arraché du sein de son émission comme un enfant de celui de sa mère, ce sevrage a sonné comme une rupture insupportable.
Dirane aurait pleuré à chaudes larmes à la lecture de cette annonce comme « Le Vieux » Houphouët après avoir appris que Dominique allait épouser Ouattara.
A regarder de près, la sortie de Dirane aurait pour ambition non seulement de rompre le cou aux multiples accusations, mais aussi de crier à l’injustice.
A l’entendre parler et agir, il veut continuer à tenir les rênes de son émission. C’est peut-être elle le secret de sa jeunesse apparente, c’est surement elle qui l’aide encore à tenir debout.
Lui enlever ce dernier rempart serait tout lui prendre. Non, Dirane ne veut pas tout perdre en perdant son bébé qui a refusé de grandir après 26 bonnes années de vie.
Il a passé presque la moitié de sa vie à ne faire que ça. Il ne s’imagine pas sans elle, il ne voit pas de futur sans ce qui a longtemps été son passé et qui présentement veut le quitter.
Son inquiétude est pareille à celle de nombreux fonctionnaires qui au lendemain de leur retraite sombrent au milieu des crises obscures, constituant pour la majeur partie des cas une porte d’entrée pour le cimetière.
Pourquoi les camerounais veulent la conservation de Dirane sur son siège, mais voient d’un mauvais œil que le père de Brenda, son proche entourage, et les chefs des partis l’opposition, soient installés à leur poste depuis des décennies sans intention de départ ?
On peut être d’accord qu’il a crée cette émission de toute pièce, qu’elle a été le phare de la CRTV pendant moult occasions, qu’elle a été le vivier de plusieurs générations d’artistes et d’animateurs…Mais rien de tout cela ne donne ne peut rien justifier.
Le créateur ne doit pas mourir avec sa créature, mais doit avoir le courage de mourir en lui même pour produire des nouveaux soi. De ce geste sacrificiel naitra quelque chose de nouveau qui de manière indubitable l’inscrira dans l’histoire.
Pour justement éviter de plonger dans la schizophrénie ou une délirante folie dont’il s’en défend, Dirane doit prendre la chose de la manière la plus zen et sportive.
Il doit centrer son attention sur les belles victoires passées, et non sur ce qu’il considère comme une défaite future.
Seul le reflet de ses années de gloire, de ses nombreux coups de réussites, pourra lui donner la force de résister.
Sinon après avoir été mis à la porte de « Délire » il serait très vite au seuil du délire.