Dans sa biographie qu’on peut lire dans les colonnes du site officiel de son label, Reniss est présentée comme une artiste ayant de très fortes attaches avec le Gospel.
La qualité de sa voix et le rendu de ses cordes vocales corroborent assez ce témoignage à son sujet. Elle aurait même prêtée sa voix angélique à une chorale chrétienne quand elle était à Douala avant sa rencontre avec Le Monstre jovi.
Sa tendance Gospel devait donc se plier dès le départ aux exigences gangsters de son nouveau maitre. Reniss entre en scène avec un album baptisé « immaculate concept », dans lequel on pouvait trouver des titres comme « holy wata » où elle implorait à chaque vers la bénédiction de Dieu, sa protection et sa faveur. Nous sommes en 2012.
La jeune Reniss présente déjà une maturité artistique difficile à trouver chez les jeunes de son âge et même au-delà. Ses premières chansons sont d’une qualité sonore et lyrique indicibles. Mais avec toute sa bonne volonté, sa voix ne pouvait plus suivre deux maitres à la fois.
Entre le Gospel et le Gansta Rap il fallait faire un choix. Comme il semble être difficile aux filles de refuser des choses à Jovi, elle a ainsi dévoyé sa voix une autre voie. C’est ainsi qu’elle va accompagner Jovi dans plusieurs de ses chansons, en leur donnant à chaque coup un peu de finesse et de féminité. Malgré son talent, sa jeunesse, sa rage de réussir, Reniss n’était connu que du public peu ouvert et amateur de ce type de musique.
Nonobstant sa proximité à Jovi qui s’est illustré sur plusieurs tubes, elle n’était pas le phare de la partie féminine de la culture urbaine 237.
Mis à part ses collaborations à n’en point finir avec Le Monstre, ce dernier va la pousser à enchainer titre après titre pour essayer de faire vivre un label qui semblait être jeté derrière les grilles de New Bell, la 11e province.
A peine 24 ans, la jeune Reniss va accumuler une bonne dizaine de titres, qui vont passer les uns après les autres sans très émouvoir le grand public. Dans le moment actuel, son nom est sur toutes les langues prêtes à sucer et à lécher tout ce qu’il y’a de pimenté, et sa musique dans toutes les oreilles, résonnant au rythme des passions libidinales.
Elle vient d’offrir à manger au public, le vidéogramme de son titre « la sauce », qui se pose déjà comme l’une des chansons les plus écoutées de ces deux derniers mois ici et ailleurs.
Pas besoin d’être un devin pour savoir que Reniss n’a que trouvé ce qu’ils ont longtemps cherché. La gloire et la reconnaissance. Pour y arriver, il fallu mettre de côté quelques principes directeurs, et surfer sur la vague de la mode actuelle. Le choix de la thématique, de la musicalité, la rythmique, des mots clés… Tout était réuni pour choquer et plaire.
Connaissant le public camerounais, épris de tout ce qui tourne autour du piment et de ses dérivés, une telle chanson ne pouvait être que la bienvenue. Même si le texte est vide de sens, la sensation que cela apporte à l’auditeur prouve que le public donne plus d’attention à ce qui est dit qu’à la manière de le dire.
Voici le destin d’une jeune fille de 24 ans, qui voulait incarner « l’immaculée conception », qui avait le sacré au cœur de sa musique, dont les parents lui souhaitait une vie de pasteure. Aujourd’hui, bien dans son aise, elle entonne le cantique des cantiques à la sauce.
Son psaume au piment, pour louanger sa saveur, fait d’elle l’envers de Rahab dans l’Ancien Testament. Dans le clip, on a l’impression de voir une croyante révoltée. Elle y invite de l’alcool à souhait, des poitrines généreuses, des langues mielleuses, et surtout un pasteur qui, Bible à la main et soutane sur le corps, entre dans le feu d’une ambiance débauchée. A chacun d’interpréter cette scène comme il le veut, mais elle n’a pas été faite inconsciemment.
A travers cette attitude de Reniss, on comprend comment les jeunes qu’ils soient artistes ou n’importe quoi, transgressent certains principes à la recherche de la gloire.
Pressés de réussir, d’être reconnus, plusieurs sont prêts, par manque de personnalité, de rigueur avec soi, de vision à long terme, de bruler les étapes, saper des principes, souper avec le diable, lui lécher la bottes, jusqu’à finir par le tirer par la queue.
Le jeune rappeur Ocla avait donc raison « le bon message c’est quand tu parles de bières, de fesse, de sexe, de fête…et de tout ce qui rime avec grossesse », le public « veut la musique de retire l’alcool dans le corps », « le sérieux, les conseils, les proverbes » pour Reniss et pour la plupart, « c’était la musique d’avant ».
Jusqu’où et jusques à quand allons nous sacrifier l’art et la technique au profit d’une gloire éphémère?
Qui devons nous blâmer, le public qui demande qu’on libère Barnabas, ou les auteurs qui conduisent Jésus tous les jours à la barre?