Voici la légende de celui qu’on surnomme le lion noir Banen. Son jour de naissance n’est véritablement pas défini, mais tout porte à croire qu’il serait né vers 1840 à Ndikiminiki.
A la mort de son père, le dénommé Tombi, il prend les rênes de la chefferie. Puis il se lance dans des campagnes guerrières, village après village. Lesquelles dit-on seraient les dernières volontés de son géniteur, qui n’a pas pu les achever de son vivant.
Pendant que le jeune chef est plongé dans ses campagnes, au même moment l’administration allemande est en train d’étendre son hégémonie en soumettant les populations de l’intérieur du pays.
Ne voulant pas se soumettre, il va aller en guerre contre les troupes de l’administration coloniales allemandes. Une guerre qui va durer trois ans, au cours de laquelle les troupes conduites par Hans Dominik vont se voir malmener à chaque fois par celle du chef guerrier.
Selon les historiens, Manimben aurait reçu à la mort de son père des gris-gris. Avec ce talisman, il avait la possibilité de se transformer et d’avoir la force d’un lion. Un bonus qu’il va utiliser pour freiner la progression coloniale dans son village.
Dès cet instant il devient un homme à abattre et l’administration allemande fait de son arrestation une priorité. Le mieux c’est qu’il soit vivant, et c’est ce qui va se passer. Mais autour de cette arrestation, plusieurs versions sont soulevées.
Dans la première version sa femme serait à l’origine de son arrestation. Quand il est arrêté, il dit à sa femme en langue maternelle(Tunen) : “Comme je vais là, ne ferme pas la porte, je reviens”. Transféré au commissariat central de Bonanjo, il va subir des tortures inhumaines dans le but de percer le mystère de ses pouvoirs, en attendant le bateau qui va le déporter pour l’Allemagne.
Après plusieurs jours de tortures et de famine, il demande une tête humaine en guise de repas. Ce qui est fait. Alors le jour où arrive le bateau qui doit l’emmener, pendant qu’il est escorté sur le pont, à la vue de la mer et profitant du manque d’inattention des gardes, il entame son processus de transformation : celui d’un énorme lion.
Après plusieurs bonds, il se dirige en direction d’une cabane qui se trouve sur le Wouri, lequel va devoir le servir de passage, pour arriver de manière mystique dans son village. Mais lorsqu’il arrive à la cabane tout ne se passe pas comme prévu.
Il se pourrait que sa femme qui connaissait son secret n’aurait pas respectée la consigne ; celle de laisser la porte ouverte. Voulant essayer une ultime tentative pour s’échapper, il va s’écrouler sous la fureur des balles.
Une autre version qui est avancée et que certains observateurs semblent soutenir puisqu’elle viendrait de la dernière fille du grand frère de Manimben, la nommée Madeleine Anakanouwe.
Lors de son arrestation, Manimben est transféré à Douala en passant par Yabassi. Mais ce voyage n’est pas de tout repos pour ses bourreaux. Il se raconte que les soldats allemands ont essayé plusieurs fois de mettre un terme à sa vie en vain, mais à chaque fois qu’ils tiraient sur lui, les balles n’avaient aucun effet sur lui, il disparaissait et c’est le lion qui à sa place rugissait.
Pendant le voyage, il entreprit une grève de la faim jusqu’à son arrivée à Douala. Fatigué des tortures et des privations qu’il subissait, il décida de livrer son secret .Il s’agissait d’une ficelle-fétiche qui était attachée à son gros orteil du pied droit qui, une fois coupée le rendait vulnérable. C’est ainsi que le légendaire guerrier Manimben Yi Tombi dit le lion noir Banen succomba sous les rafales des balles allemandes.
Certains historiens s’accorderaient à dire que, son exécution se serait déroulée au même moment que celui de Rodolphe Douala Manga Bell, c’est-à-dire le 8 Août 1914.
Après la mort de Manimben, les allemands ont reconnu en cet homme le courage et la bravoure et c’est la raison pour laquelle, ils ont érigé un monument en sa mémoire sur lequel est inscrit: « MANIMBEN Yi TOMBI, le lion noir Banen », et aujourd’hui encore ce monument qui surplombe l’entrée de la ville de Ndikiminiki, est un référent identitaire de la population.
Cette épopée du lion noir Banen serait dit-on à l’origine du nom que porte l’équipe nationale de football du Cameroun : les lions indomptables et aussi un symbole des forces armées camerounaises.
Aujourd’hui pour rendre hommage à ce valeureux guerrier, le peuple Banen a institué le festival MANIMBEN Yi TOMBI dit « le lion noir Banen », lequel est organisé tous les ans et à chacune des éditions les festivaliers sont conquis par la représentation des exploits du chef guerrier sous fond de sketch.
Source : Langues et cultures mbamoises