Le journaliste Albin Njilo s’est aussi prononcé sur l’affaire Savannah Energy qui a éclatée depuis quelques jours. Dans un exposé portant sur les enjeux profonds qui sous-tendent cette affaire, ledit journaliste distille des informations précieuses concernant Savannah.
Trois ans après la mise en service du pipeline Tchad Cameroun, le pays était dans les regrets. Grace au boom du prix du pétrole, alors que le consortium avait déjà réussi à rembourser des dettes de plus de 2400 milliards de FCFA contractées auprès de la banque mondiale pour ce projet, le Cameroun se contentait des maigres revenus sur le droit de transit évalués à 06 milliards de FCFA.
C’est après de multiples démarches qu’en 2013 à travers une commission ad hoc ministre de l’industrie et des finances le Cameroun obtint une légère amélioration qui désormais passait de 195 francs CFA (0,41 dollars) le baril, à 618 francs CFA (1,30 dollars) le baril, améliorant les gains de la partie camerounaise sur l’exploitation de l’oléoduc Tchad-Cameroun. Malgré l’entrée en production de nouveaux champs pétroliers au Tchad avec China Petrolium, ce droit de transit n’a jamais évolué.
Les enjeux
Le pipeline Tchad Cameroun ne fonctionne qu’à 50% de ses capacités. China Petrolium détient le permis en RCA, à la frontière Tchad-Centrafrique. La RCA envisage produire 2 millions de barils par jour soit une production annuelle de 60 millions de barils. Contrairement au Soudan, le Cameroun a le meilleur avantage pour le transit du pétrole centrafricain.
Le 20 Avril 2023 , le Cameroun à travers la SNH a racheté le capital de Cotco dans le projet du pipeline Tchad Cameroun faisant passer ses parts désormais de 05 à 15 % contre 25 % pour le Tchad .Ce deal conclu entre la SNH et Savannah à 26 milliards de FCFA est pour le Tchad, une trahison car Ndjamena accuse son voisin d’avoir conclu dans son dos avec une entreprise qu’elle ne souhaite pas voir dans son pétrole .Pour le gouvernement tchadien, le pétrole représente un secteur qui représente 80 % de son budget .Ndjamena exige pour remplacer Exxon Mobil, une entreprise du même calibre.
« Nous acceptons le solde de tout compte mais la seule condition, nous ne voulons pas de Savannah parce qu’elle n’a pas la capacité technique de reprendre vos actifs et d’opérer comme vous. Trouver n’importe quelle société qui a votre gabarit et nous approuverons la transaction. A notre grande surprise, le 9 décembre, la PDG et quelques employés étrangers qui étaient encore au Tchad ont quitté le pays et c’est de l’étranger qu’on nous a informé par mail que désormais Esso a conclu toutes les cessions de leurs actifs à Savannah Energy dans le projet Doba aussi bien que dans le projet pipeline et que l’interlocuteur est à compter de la date, la société Savannah Energy », rapporte Djerassem Le Bémadjiel , ministre des Hydrocarbures et de l’Energie.
Qui est donc Savannah ?
Présent au Nigeria, Savannah détient une participation majoritaire importante dans une entreprise intégrée de production et de distribution de gaz à grande échelle qui fournit actuellement du gaz à environ 24 % de la capacité de production d'énergie thermique du Nigéria et génère des flux de trésorerie importants.
Au Niger, Savannah a des intérêts sous licence couvrant 13 655 km2, soit environ 50 % du principal bassin pétrolier du pays, le bassin du Rift d'Agadem dans le sud-est du pays. Elle a mené une campagne d'exploration très réussie au Niger avec cinq découvertes dans cinq puits répartis sur cinq champs pétrolifères. Elle fait progresser la construction et l'exploitation du premier parc éolien du Niger dans la région de Tahoua du pays, avec une capacité de production d'électricité installée proposée pouvant atteindre 250 MW.
En même temps au Cameroun, elle vient de signer une convention pour le développement du barrage de Bini A Warrack dans l’Adamaoua, 75 MW, ensuite un barrage réservoir et de nouvelles lignes de transport.
Une crise diplomatique est désormais actée entre les deux pays voisins et frères. Alors que le Tchad dit Non à l’accord signé entre Savanah Energy et Exxon Mobil, bloquant ainsi l’augmentation des parts du Cameroun sur le pipeline, le Cameroun refuse de se prononcer sur le rachat des actifs de Petronas par le gouvernement Tchadien.
La question sur toutes les lèvres est de savoir ce que venait faire Franck Biya dans les différentes négociations au Tchad pour le compte de Savannah ? Lobiyiste pour le compte de la SNH ou de l'entreprise Britannique ?