Il est 22h45 mn lorsque le téléphone sonne à l’unité «1500 » de la police sise à la délégation générale à la Sûreté nationale (DGSN) ce jeudi 4 mai à Yaoundé. Du haut-parleur, l’on entend : « Des gars fument du chanvre derrière ma maison au quartier Ndokoti. Et je viens de les entendre dire qu’ils vont aller cambrioler», explique l’appelant, la voix tremblotante. C’est la mobilisation dans la salle. L’inspecteur de police principal Arnaud Meke, chef d’équipe assis depuis 17h, bondit sur le répertoire téléphonique. Le délégué régional du Littoral est saisi.
Les minutes s’égrainent et l’attente se lit sur les visages des cinq policiers en poste. Alors que l’équipe du 1500 s’apprête à rappeler Douala, le délégué appelle : « Mes éléments viennent de prendre trois hommes et une femme disposant d’une arme à feu, un chargeur de 10 minutions et des filets de cannabis au lieu indiqué. L’information relayée par le monsieur est vraie. J’ai exigé l’ouverture d’une enquête et la perquisition de leurs domiciles ».
A peine le temps de souffler, et un autre coup de fil survient. « Je viens de me faire agresser dans un taxi qui m’a jeté à la descente Essomba. Ils sont partis avec mes 75 000 F et mon sac de pistache », rapporte la victime. Les équipes du 1500 se mettent en branle et le patron du GMI est informé. Vers 23h10, coup de fil du patron du GMI : « Mes éléments viennent d’appréhender un véhicule suspect au niveau de Shell Ahala avec trois hommes et une femme à bord. Je leur ai instruit de les conduire à la base. Demandez à la victime de se rendre au siège du GMI demain matin », instruit le patron. L’inspecteur de police principal Arnaud Meke rappelle la victime, la rassure et lui demande de se rendre au siège du GMI aux premières heures de la matinée.
Le 1500, numéro d’utilité publique a été instauré en 2010 par le Délégué général à la Sûreté nationale, Martin Mbarga Nguélé. Ceci pour permettre aux populations de dénoncer les tracasseries policières et fournir des renseignements utiles. Chaque policier de l’unité est devant un téléphone fixe. Ils répètent la formule « Allô le 1500 de la police » plus de 100 fois par jour de travail. Mais sur dix appels, à peine trois sont utiles. C’est vers 20h que le nombre d’appels grimpe. Le reste étant des appels pour saluer, demander du crédit de communication, du travail et à un moment à lancer des blagues du genre qu’un bandit a volé des goyaves. Des histoires drôles relayées minute après minute par des enfants et des adultes. Parfois, ils poussent le bouchon loin en proférant des injures. C’est le cas des appels téléphoniques survenus dans la nuit du 4 au 5 mai denier. Ainsi, sur plus de 100 appels, seule une dizaine était sérieuse.
Des statistiques qui révèlent d’ailleurs que plus de 90% des appels sont fantaisistes. Pourtant le 1500 a été conçu pour servir de trait d’union entre la police et ses populations. Une façon de promouvoir une police de proximité par le chef de corps. Pour atteindre cet objectif, les policiers ne veulent pas laisser l’anarchie s’installer. Plus de 15 000 numéros des « perturbateurs » du 1500 sont actuellement enregistrés dans les listes noires de la police. Et il se murmure d’ailleurs qu’ils verront bientôt leurs lignes suspendues et seront traduits en justice pour trouble dans le service, outrage, injure…Une sorte de rappel à la discipline.