Elecam: en colère, les agents saisissent Paul Biya

ELECAM Justificatif Rejet Listes Les agents d'ELECAM ont saisi Paul Biya par rapport à leurs conditions de travail

Wed, 16 May 2018 Source: www.camerounweb.com

A quelques mois des élections législatives et présidentielle, la grogne monte dans le rang du personnel d’Election Cameroon (ELECAM).

Dans un mémorandum rendu public hier mercredi, le collectif des personnels a décidé de saisir le président de la République Paul Biya pour lui faire part de leurs conditions de travail et de leurs différentes revendications.

Ci-dessous l’intégralité du mémorandum:

Excellence Monsieur le Président de la République,

Il pourra paraitre ambigüe aux yeux de l’opinion publique nationale et internationale, que nous, personnels de l’organe indépendant en charge de la gestion de l’ensemble du processus électoral et référendaire au Cameroun, vous adressions des doléances, surtout à la veille d’échéances aussi importantes, et ce d’autant plus que vous êtes entre autres président d’un parti politique proche du pouvoir, lequel parti a d’ailleurs pour habitude de participer à toutes les consultations électorales organisées dans notre pays.

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Aussi, nous tenons à préciser que nous nous adressons à vous Excellence, tout d’abord parce qu’en tant que Chef de l’Etat, vous êtes l’incarnation de l’unité nationale si chère à notre pays bien aimé, vous avez la charge ô combien délicate de veiller au fonctionnement régulier des institutions de la République, et en tant que le seul élu de la nation toute entière, vous êtes la plaque tournante, la clé de voûte de tout le système politique camerounais. Nous nous adressons aussi à vous Excellence Monsieur le Président de la République, en tant que père ; un père aimant, qui aime tous ses enfants, et comme le rapportent les Saintes Ecritures « un père qui aime son enfant peut-il lui donner un serpent, alors que l’enfant lui demande du pain ? ». A nos yeux, vous êtes le père de tous les camerounais.

Excellence Monsieur le Président de la République,

Nous sommes conscients qu’en tant qu’employés d’une quelconque structure, nous sommes soumis au devoir de réserve qui commande qu’un salarié ne doit pas mettre sa structure en difficulté. Cette obligation de réserve prend encore tout son sens dans notre cas où nous sommes des employés d’une institution qui a la charge de gérer une fonction régalienne très délicate et de la plus haute importance, à savoir l’organisation des élections.

Mais nous savons aussi que ce devoir de réserve est atténué par les droits dont bénéficie chacun à l’instar entre autres, de la liberté d’expression, de la liberté d’opinion, des droits syndicaux et du droit à une vie meilleure pour ne citer que ceux-là. Aussi , nous nous excusons d’entrée de jeu pour la démarche que nous avons retenue pour lancer ce cri de détresse du fond de notre enfer quotidien ; en fait, c’est le seul moyen dont nous disposons pour nous exprimer car malgré plus de 3000 (trois mille) employés que compte ELECAM, nous ne disposons pas depuis 08 ans que la structure existe, de délégués du personnels susceptibles de porter nos aspirations vers la très haute hiérarchie.

Excellence Monsieur le Président de la République

Le personnel d’ELECAM depuis sa mise en place à ce jour a eu à gérer 04 (quatre) élections majeures avec le succès que vous-même et l’ensemble des partenaires au processus électoral luiavez toujours reconnu. Ce personnel a toujours fait son travail avec professionnalisme, dévouement, abnégation et à la limite même du renoncement. En effet, Excellence Monsieur le Président de la République, le personnel jusqu’à ce jour a renoncé à se plaindre :

– Du gel des avancements depuis bientôt 04 ans pour la quasi-totalité du personnel ;

– Du non paiement des arriérés des avancements datant de 05 ans ;

– De l’absence de protection sociale due au non reversement de nos cotisations CNPS depuis 03 ans déjà ;

– De la détérioration sans cesse croissante de nos conditions de vie et de travail ;

GEL DES AVANCEMENTS

Excellence Monsieur le Président de la République


Tel que le prévoit le statut du personnel d’ELECAM, lui-même adossé sur la législation en la matière au Cameroun, tout personnel a le droit d’avancer d’un échelon tous les 02 ans. Mais à ELECAM, les avancements représentent un véritable serpent de mer. La quasi-totalité du personnel a commencé à bénéficier des avancements après 05 années de service, soit en 2015, et depuis cette date, ils se font « à la tête du client » du fait de la mise en place du clientélisme et des réseaux mafieux. On se retrouve ainsi avec des personnels qui n’avancent pas pour la grande majorité d’entre eux, ce qui nous amènent à nous poser des questions sur notre profil de carrière et sur l’autonomie de gestion que nous a conféré le législateur, laquelle autonomie devrait permettre à nos dirigeants de mieux suivre la carrière des personnels mis à leur disposition.

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NON PAIEMENT DES ARRIERES DES AVANCEMENTS

Comme indiqué précédemment, nous avons bénéficié pour la plupart des avancements d’échelons après 05 années de service, ce qui nous donnait droit au paiement des arriérés y relatifs. A ce sujet, non seulement nous ne comprenons pas déjà la base de calcul évidemment discriminatoire qui a permis d’aboutir aux états qui ont été établis, au regard des différences abyssales qu’on observe entre des employés par exemple recrutés le même jour, à la même catégorie et au même échelon.

Nous ne comprenons non plus pourquoi à ce jour, on ne nous a versé que la moitié des arriérés à nous dus jusqu’à l’année 2015. Autant vous le dire clairement Excellence,ayant pour la plupart débuté le travail à ELECAM en 2010, et rendu à 08 ans plus tard, nous sommes encore rétribués comme si nous étions en 2014.

ABSENCE DE PROTECTION SOCIALE

Excellence Monsieur le Président de la République


En vertu des lois de la République, tout travailleur a droit à la protection sociale à travers la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS) qui gère les prestations familiales, les prestations de vieillesse, d’invalidité et de décès et les prestations d’accident de travail et des maladies professionnelles.

Depuis notre tout premier mois de travail à ELECAM jusqu’à ce jour, et ce pour l’ensemble du personnel, notre employeur n’a jamais oublié de retenir à la source les cotisations pour la CNPS, cependant, depuis bientôt trois ans ce personnel est dans l’impossibilité de bénéficier de la moindre prestation à la CNPS du fait que, dans cette autre structure de l’Etat on nous répond qu’ELECAM ne reverse pas ses cotisations. Non seulement nous parcourons le Cameroun profond sans protection et dans les pires conditions imaginables en quête de nouveaux électeurs, mais aussi, un péril grave plane sur nos vieux jours avec de fortes chances de nous retrouver le moment venu sans pension vieillesse.

DETERIORATION GRAVE DE NOS CONDITIONS DE VIE ET DE TRAVAIL

Excellence Monsieur le Président de la République


Si tout ce que nous venons d’évoquer est suffisamment de nature à dégrader les conditions de travail du personnel d’ELECAM qui reste malgré tout mobilisé, conscient de l’importance de sa mission, l’absence de moyens matériels et financiers constituent deux causes centrales de notre désarroi. S’agissant des moyens matériels, permettez-nous d’entrée de jeu de vous dire que le matériel d’inscription à notre disposition est en fin de vie.

Nous ne pouvons pas vous dire combien de fois nous avons connu le désagrément de voir l’ordinateur portable encastré dans le kit d’inscription, s’éteindre tout bonnement alors que nous avions en face de nous une file de potentiels électeurs en attente pour se faire inscrire sur les listes électorales, alors que cela fait plus de 02 ans qu’on nous annonce l’arrivée imminente de nouveaux kits d’inscription. Toujours en termes de matériel, nombre de démembrements territoriaux d’ELECAM ne disposent plus de matériel roulant ; la plupart de ce matériel ayant été acquis entre 2011 et 2012.S’agissant des moyens financiers, ils concernent essentiellement le soutien logistique mensuel qui devrait permettre notre déploiement sur le terrain à la quête de nouveaux électeurs.

Non seulement nous ne l’avons jamais reçu tous les mois prévus, mais pour ce qui est de l’année 2017, nous ne l’avons reçu qu’une seule fois. Et pour l’année en cours, une seule fois aussi malgré les enjeux importants. Il faut déjà dire que quand bien même nous le recevons, il oscille entre 1000 (mille) et 5000 (cinq mille) francs par personnel et selon la taille du démembrement qui l’emploie.

La conséquence de tout ceci est que nous sommes contraints, et généralement sous la menace et les intimidations de toutes sortes, de mettre à contribution nos salaires pour descendre sur le terrain à travers les villages et les quartiers, lesquels salaires qui n’ont comme élément de gain, outre le salaire de base et l’indemnité de non logement, qu’une indemnité de transport de 5000 FCFA (cinq mille francs CFA).

Excellence Monsieur le Président de la République

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Comme si nous n’avions pas déjà assez de problèmes comme ça, la haute hiérarchie de notre institution, refuse systématiquement on ne sait pour quelle raison, de nous délivrer des attestions de virement irrévocable de salaire afin de nous permettre de contracter des prêts bancaires et réaliser des projets importants. Il ressort de tout ceci que le personnel d’ELECAM est réduit au stade de consommateur condamné qu’il est à vivre au jour le jour sans espoir d’un futur meilleur.

Excellence Monsieur le Président de la République

Nous sommes conscients des difficultés que rencontre le pays dues notamment à des facteurs exogènes. Nous ne demandons pas des augmentations de salaires, quoique…. mais nous savons que :

– Ce n’est pas vous qui avez instruit que nos avancements soient gelés ;

– Ce n’est pas vous qui avez instruit que ne nous soient plus payés nos arriérés d’avancement ;

– Ce n’est pas vous qui avez instruit que ne soient plus reversées nos cotisations à la CNPS ;

– Ce n’est pas vous qui avez instruit que nos conditions de travail et de vie soient volontairement détériorées.

Excellence Monsieur le Président de la République

Nous connaissons votre profond attachement aux valeurs de la République, au fonctionnement harmonieux des institutions, à la promotion du vivre-ensemble dans la diversité et au développement harmonieux de la Communauté Nationale.

Il faut déjà dire qu’il y’a une foultituded’autres griefs que nous aurions bien pu évoquer, en ce qui concerne les pratiques managériales très étranges qui ont cours à ELECAM, mais nous avons préféré nous focaliser sur les points qui touchent à nos droits en tant que travailleurs. Aussi, nous vous supplions de bien vouloir prendre toutes les mesures que vous jugerez nécessaires pour illuminer nos vies restées longtemps sans éclats.

Veuillez recevoir Excellence Monsieur le Président de la République, l’expression de notre profond attachement à l’institution que vous incarnez.

Le Collectif, YAOUNDE, LE 15 MAI 2018

Source: www.camerounweb.com